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Les spectres de l'honneur

Les spectres de l'honneur

Titel: Les spectres de l'honneur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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en savait le contenu. De plus M e Roussarié avait cru de son devoir de faire de longues digressions sur ce qui était donné ; sur ce qui serait reçu selon la coutume :
    E si lung horn o lungnha femna moria ses testament o ses adordenament de sas causas, que tug sei bei fosso de sos effantz, e si effantz no avia que fosso de sos pus probdas parentz : li quai parent fosso agardat per ung an. E si parentz no i apparia, que tug li bei predig fosso del senhor, paguatz primeirament totz los deutes del mort o de la morta, e facha almoina per la anima del mort o de la morta, a conoguda dels cossols de la dicha vila (409) .
    « Quel seigneur ? Castelreng ne dépend de personne. Si nous mourions ensemble tous les trois, à peine serions-nous mis en terre que la bonne gent du pays viendrait despiécer le châtelet pour y rober de quoi bâtir, affermir ou agrandir ses maisonnelles. Ni Paindorge, ni Lemosquet et Lebaudy ne pourraient s’opposer à la démolition. Le donjon deviendrait une mitre de Knolles ! »
    Nonobstant, il pouvait se montrer satisfait : il venait solennellement d’authentiquer la présence de Maguelonne à Castelreng. Elle ne lui avait jamais rien demandé. Elle n’avait jamais aventuré une allusion à quelque droit sur la chevance, non point pour elle mais pour son fils, à l’inverse, certainement, d’Aliénor. Le vieux Thoumelin que cette gaupe croyait avoir subjugué avait été suffisamment artificieux, selon M e Roussarié, pour ne lui rien céder. C’était pourquoi, dès le retour du véritable hoir 206 , elle avait de rage et de déception mêlées décidé d’enherber le vieillard. On avait retrouvé le corps de cette gaupe dans l’Hers avant celui d’Olivier. Des gens de Mirepoix les avaient reconnus. Les consuls et les hommes de la Prévôté avaient mené une inutile enquête. Personne ne s’était expliqué cette double mort ; pas même, semblait-il, le père et la mère de la défunte derrière l’écran de leurs lanternes. Jamais ils ne s’étaient aventurés à Castelreng bien que sachant certainement par ceux qui en avaient été exclus comment le châtelet était revenu à son légitime propriétaire.
    « Tiens !… Il en a terminé. »
    M e Isarn Roussarié énumérait les témoins :
    –  Hujus rei testes 207  : Robert Paindorge, cavaliers 208 …
    « Merdaille ! ce notaire, bientôt, voudra lui donner la colée. »
    –  Girard Lebaudy, cavaliers ; Yvain Lemosquet, cavaliers…
    « Plus tard, quand je serai poussière, quelqu’un qui lira cet acte pensera que j’avais pour témoins des prud’hommes. »
    –  Pons de Missègre, capelas Clinquant de Limoux, capelas ; Peire Massol, faouré 209 …
    D’autres noms suivirent. Ceux des familiers de Villerouge : Petiton, Jovelin, les soudoyers, Blondelet, le portier, jusqu’à ce que le notaire, quelque peu essoufflé – il était pourtant jeune – conclût :
    –  E Isarn Roussarié notaris public de Limoux que per precs e per requesta del dig senhor Tristan aquesta carta… partidas escrius 210 .
    C’était fini. Maguelonne semblait avoir écouté sans entendre. Hélie, lui, n’avait rien compris. Cependant, il était heureux d’avoir vu son père, vêtu de fer et de mailles, entouré d’un grand respect.
    On se congratula. On s’assit autour d’une longue table. On mangea gaiement et le notaire narra quelques histoires ressortissant à ce qu’il appelait son ministère. Comme il se faisait tard, on logea les invités tant bien que mal au donjon et dans différents logis.
    Au creux de leur chambre silencieuse, sachant Maguelonne éveillée, Tristan chuchota :
    – Te voilà désormais anoblie.
    – Aurais-tu fait tabellionner cet acte si j’étais bréhaigne ?
    – Sûrement.
    Après tout, cette question n’était pas si étrange. Maguelonne ne manquait ni de clairvoyance ni de rectitude. Au contraire d’Aliénor, elle ne l’avait point épousé par ambition, ni même, au cas où elle ne l’eût pas aimé, pour quitter Villerouge. Il la connaissait sous un double visage : l’épouse grave, tourmentée parfois par des obligations domestiques qui altéraient son sommeil et, certains jours, la rendaient inquiète, fiévreuse, mélancolière, et la jeune mère dont l’enfant, son chef-d’œuvre, méritait de particulières attentions. Elle était constamment écartelée par ces tendances contraires. Elle avait hérité de ses humbles parents l’obsession d’une sécurité

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