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Les voyages interdits

Les voyages interdits

Titel: Les voyages interdits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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ses
propres termes. Les femmes adorent cela, paraît-il. Encore ne le saurai-je,
pour ma part, que lorsque je serai mariée.
    — Dio me varda, marmonnai-je.
    — Et, bien sûr, il va de soi que tu n’auras pas à
le faire toi-même, risquant ce faisant de toucher l’horrible corps de Lumière.
Elle pratiquera ce petit étirement grossissant par elle-même, avec sa propre
main. Elle demandait juste ta permission.
    — Mademoiselle aurait-elle encore envie de
quelque chose ? crachai-je d’un ton acide. Dis donc, pour une créature
monstrueuse, elle a l’air sacrement tatillonne !
    — Non, mais je rêve, vous entendez ça ? se gaussa
encore Phalène. Te voilà dans une compagnie que tout homme t’envierait, avec
des créatures de sang royal qui t’enseignent des pratiques sexuelles que la
plupart ignorent... Tu nous seras reconnaissant, Marco, le jour où tu voudras
faire jouir une femme au mihrab desserré : tu nous béniras, ce
jour-là, de t’avoir appris cette astuce. Et, à son tour, elle t’en sera
reconnaissante. Maintenant, avant que Lumière arrive, j’aimerais que tu me
procures à moi aussi, une fois ou deux, l’occasion de t’être reconnaissante.
En d’autres termes...

 
24
    Durant plusieurs jours, autant pour nous instruire que
pour nous distraire, nous assistâmes, Phalène et moi, aux séances de la cour
royale de justice. On l’appelait tout simplement le Divan, du fait de la
profusion de coussins sur lesquels s’asseyaient le shah Zaman, le wazir Jamshid,
divers vénérables muftis de la loi musulmane et parfois quelque émissaire
mongol de l’ilkhan Abagha en visite. On faisait comparaître devant eux les
criminels en attente de jugement et des citoyens ayant des plaintes à déposer
ou des faveurs à demander. Les officiels prêtaient une oreille attentive à
leurs doléances, puis conféraient entre eux et rendaient leurs jugements, leurs
décisions et leurs sentences.
    En tant que simple spectateur, je trouvai le Divan
instructif. Mais si j’avais été un criminel, j’aurais mille fois redouté d’être
traîné devant ce tribunal. Et si j’avais été un citoyen porteur d’une requête
ou d’une réclamation quelconque, il aurait fallu que celle-ci fût vraiment d’une
importance capitale pour que j’ose ne serait-ce que la porter à la connaissance
du Divan. Car, sur la terrasse qui s’ouvrait à la sortie de la salle, était
posé un énorme brasero sur lequel mitonnait un chaudron rempli d’huile
bouillante, entouré de plusieurs de ces robustes gardes du palais et du
bourreau officiel du shah prêt à se servir de ce matériel punitif. Phalène me
confia que son usage était réservé non seulement aux bandits convaincus d’actes
malfaisants, mais aussi aux citoyens qui formulaient des accusations
injustifiées, des plaintes malveillantes ou de faux témoignages. Les gardes du
chaudron n’avaient rien de rassurant, mais le bourreau proprement dit, masqué,
capé et costumé d’un rouge plus rouge que le feu de l’enfer, ne pouvait inspirer,
lui, que de la terreur.
    Je ne vis qu’un seul malfaiteur se faire condamner au
chaudron d’huile bouillante. Sans doute l’aurais-je jugé avec davantage
d’indulgence, pour ma part, mais après tout je ne suis pas musulman. Il
s’agissait d’un opulent marchand persan dont le harem personnel se composait
des quatre femmes légalement autorisées, en plus des nombreuses concubines
habituelles. L’offense pour laquelle il comparaissait devant ses juges fut lue
à voix haute : l’homme s’était rendu coupable de khalwat, autrement
dit de « promiscuité compromettante ». Les détails de son acte
d’accusation étaient plus explicites : on reprochait au négociant d’avoir
pratiqué la zina avec deux de ses concubines en même temps, tandis que
ses quatre femmes et une autre concubine assistaient à la scène, circonstances
considérées comme haram au regard de la loi musulmane.
    À l’écoute de la lecture de ces charges, je ressentis
instinctivement de l’empathie pour l’accusé, en même temps qu’un certain
malaise personnel, sachant que je m’adonnais moi-même presque chaque nuit à la zina avec deux femmes qui n’étaient point mes épouses. Mais ayant lancé à la
dérobée un regard vers ma compagne, la princesse Phalène, je ne détectai sur
son visage nulle trace de culpabilité ni d’appréhension. Je découvris au fil
des débats qu’aucune offense faite aux lois musulmanes

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