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L'Eté de 1939 avant l'orage

L'Eté de 1939 avant l'orage

Titel: L'Eté de 1939 avant l'orage Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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recevaient des malades atteints de tuberculose, ou alors simplement désireuses de se refaire une santé dans ce climat vivifiant.
    Cela conférait de curieuses caractéristiques à l’architecture locale: les façades des résidences s’ornaient de balcons sur lesquels pouvaient prendre place des chaises longues, et d’immenses fenêtres laissaient entrer le soleil.
    Une fois leur repas avalé dans le restaurant de l’hôtel Maurice, un vaste édifice confortable, Renaud s’engagea sur le Chemin-du-Tour-du-lac, jusqu’à un chalet spacieux au revêtement de planches horizontales. Une galerie contour-nait presque la bâtisse, assez grande pour recevoir une large compagnie sur des fauteuils Adirondacks, tous placés de façon à permettre de voir l’étendue d’eau. Les cadres des fenêtres peints en vert, les arbres où les bourgeons ne pointaient pas encore, procuraient à l’ensemble une allure sympathique.
    Un homme les accueillit sur le pas de la porte, heureux de leur faire visiter les lieux. Ce notaire servait d’intermédiaire au propriétaire, à qui les misères de la crise pesaient au point de vouloir tirer un revenu de la location d’une résidence d’été. Au rez-de-chaussée, celle-ci comptait une cuisine bien équipée, une salle à dîner et une salle de séjour vastes, avec d’amples croisées donnant sur le lac. Les meubles vieillots, défraîchis, dataient de la décennie précédente. En plus d’une salle de bain complète, une dernière pièce offrait un espace de travail idéal, avec un large pupitre de chêne, une chaise recouverte d’un cuir usé, décoloré par endroits. Deux fauteuils de rotin permettaient d’y recevoir des visiteurs.
    Ã€ l’étage se trouvaient quatre chambres et une autre salle de bain. Les matelas répandaient une légère odeur de moisi. Les fenêtres ouvertes toute une journée suffiraient à résoudre cette difficulté. En redescendant, Renaud expliqua au notaire:
    â€” Si vous voulez nous excuser quelques minutes, je dois consulter ces dames.
    â€” Je vais sortir…
    â€” Non, non. Nous nous rendons un moment sur la galerie.
    Un instant plus tard, assis sur trois chaises rapprochées les unes des autres, les yeux perdus dans le lac d’un bleu soutenu, l’avocat demanda:
    â€” Alors, qu’en pensez-vous?
    â€” Georges aimerait certainement passer les vacances ici, risqua Nadja.
    â€” Je comprends donc que ton chat voudra venir. Est-ce que tu seras prête à l’accompagner?
    â€” Oui, je viendrai avec lui.
    Cette question réglée, Renaud interrogea son épouse du regard.
    â€” Je serai là trois semaines. Au moins.
    â€” Et toutes les fins de semaine?
    â€” Toutes les fins de semaine.
    â€” Tu te souviens que nous devons aller à New York en août? Cela fera encore une longue absence.
    â€” … Je me rappelle, admit la jeune femme après une hésitation.
    â€” Bon, après une décision aussi rapide, j’aurai du mal à convaincre ce type de baisser son prix. Tant pis.
    En réalité, rentré dans la maison son chéquier à la main, il n’essaya même pas de négocier. Dix minutes plus tard, l’avocat revenait avec un bail d’une durée de deux mois, la préférence s’il décidait de rester deux mois de plus, et deux jeux de clés. Au moment de mettre le chèque dans sa poche, le notaire avait précisé:
    â€” Si vous vouliez acheter, le propriétaire acceptera certainement de réduire son prix du montant que vous venez de me donner.
    â€” Mais nous n’en sommes pas là, de beaucoup s’en faut.Ensuite, la famille s’attarda tellement longtemps près du lac que la Packard ne revint à Montréal qu’une fois l’obscurité tombée.

10
    Une secrétaire, rejointe au téléphone dès l’ouverture des bureaux, l’avait assuré que le doyen de la Faculté de médecine pourrait le recevoir en matinée. Après leur dernière rencontre, l’accueil menaçait d’être orageux.
    Un peu fourbu par son expédition dans les Laurentides de la veille, Renaud Daigle se présenta tôt le lundi 29 mai, rue Saint-Denis, à l’Université de Montréal. Étienne Pouliot se trouvait dans un

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