Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'Etoffe du Juste

L'Etoffe du Juste

Titel: L'Etoffe du Juste Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
Vom Netzwerk:
devais garder secrète, de peur qu’il ne soit pourchassé par ses ennemis. Maintenant que ma vie tire à sa fin, je te la transmets en sachant que tu la conserveras fidèlement.
    Il est vrai que, sur l’ordre de Pilatius Pontius, procurateur de Judée, Ieschoua a été cloué à la croix pour les fautes qu’on lui attribuait. Peu après, une faction des rebelles qu’il dirigeait a commencé à faire courir la rumeur qu’il était mort, qu’il avait été mis au tombeau et que, le troisième jour, il était ressuscité. Évidemment, avec un dieu à leur tête, ils se croyaient plus forts et espéraient que la cause de la rébellion contre Rome en profite. Leur mensonge est déjà en passe de devenir une religion dont le nombre de fidèles augmente sans cesse.
    Tout cela est faux. Aussitôt sa capture annoncée, quelques-uns des disciples de Ieschoua, parmi lesquels j’étais, ont fait en sorte de lui sauver la vie. Certains d’entre nous appartenaient à la secte des Esséniens, connus pour leur talent de guérisseurs. Ils avaient préparé une potion à base d’opium qui, une fois ingérée, le plongerait dans une torpeur pareille à la mort. Longinius, un centurion romain présent sur les lieux du supplice, était secrètement des nôtres. Au moment opportun, il a placé sur la pointe de sa lance une éponge imbibée de ce mélange et la lui a fait boire. Ieschoua s’est endormi et donnait l’apparence d’avoir trépassé. Trois heures plus tard, un soldat lui a percé le côté gauche avec sa lance pour en faire la preuve. Notre maître n’a rien senti. Aux yeux de tous, il avait cessé de vivre. En conséquence, ses jambes ne furent pas brisées, contrairement à l’usage qui voulait que l’on hâte la mort des suppliciés en les privant de la possibilité de se redresser pour respirer.
    La promptitude de son trépas a étonné les Romains, alors que les deux larrons qui l’entouraient hurlaient encore de douleur, mais après quelques négociations Pontius a accepté de nous livrer ce qu’il croyait être une dépouille. Nicodème et moi l’avons descendu de la croix. Il était dans un piètre état. Il avait des blessures aux poignets, aux pieds et au côté, ainsi que des lacérations laissées par le fouet et la couronne d’épines dont on l’avait coiffé pour le ridiculiser. Avec l’aide de quelques autres, nous l’avons transporté dans un tombeau que je venais de faire construire, non loin du mont Golgotha. Là nous attendaient ceux qui pouvaient soigner ses blessures. Ils l’ont enduit d’un onguent d’aloès et de myrrhe acquis auprès de marchands syriens. Puis il a été enveloppé dans un suaire où il a été laissé pendant trois jours et trois nuits, alors que nous veillions sur lui. Plusieurs fois, nous avons cru le perdre. Mais il y a sué l’opium accumulé dans son corps et ses plaies se sont refermées sans s’infecter.
    Ieschoua n’est pas ressuscité; il a simplement été relevé de son grabat, comme il l’avait lui-même fait pour d’autres malades. Dès qu’il a repris conscience, nous l’avons sorti du tombeau à la faveur de la nuit. Avant de partir, afin de détruire toute trace de son passage, j’ai emporté ce qui s’y trouvait. Le lendemain, on a trouvé l’endroit vide, et de là est né le mythe de sa résurrection. En passant par les rues les plus sombres de Jérusalem, nous avons conduit notre maître à d’autres disciples qui, malgré sa faiblesse, l’ont immédiatement emmené en Syrie. Là, il est resté quelques semaines pour se remettre de ses blessures, puis est passé à Alexandrie, en Égypte où, dans sa jeunesse, il avait été initié aux Mystères par les prêtres de l’endroit. Le chef de guerre qu’il était est devenu simple menuisier. Plus jamais il ne s’est mêlé des affaires de l’État. Je l’y ai visité moi-même voilà quelques années et tu peux imaginer mon bonheur de l’avoir trouvé heureux, entouré de ses enfants etpetits-enfants.
    Ieschoua est mort l’an dernier. Son seul regret, qu’il a emporté dans la tombe, a été d’être devenu, pour plusieurs, un dieu, lui qui n’aspirait qu’à libérer la Judée de l’oppression romaine.
    Plusieurs années après les événements, j’ai découvert par hasard que le suaire que j’avais emporté du tombeau portait l’image de notre maître. Je ne suis pas guérisseur, mais je suppose que le mélange d’herbes dont il avait été enduit a imprégné le

Weitere Kostenlose Bücher