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L'Étreinte de Némésis

L'Étreinte de Némésis

Titel: L'Étreinte de Némésis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Saylor
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persécutions et les destructions
de Marius et Cinna, il pouvait s’attendre à un accueil chaleureux. Sa famille y
avait des attaches déjà anciennes ; son père y avait servi comme préteur
et Marcus y avait passé pas mal de temps dans sa jeunesse. Au lieu de cela, il
trouva des colons romains totalement terrorisés par Marius. Personne ne voulait
lui parler et encore moins l’aider. Pire, il risquait d’être trahi et livré aux
partisans de Marius. Alors il a quitté la ville. Mais pas seul. Tu étais arrivé
avec des compagnons, je crois ?
    — Oui.
Trois amis et dix esclaves, dit Crassus.
    — C’est
cela. Donc Crassus a quitté la ville avec ses trois amis et ses dix esclaves.
Il a longé la côte et a fini par atteindre la propriété d’une vieille
connaissance de son père. Son nom m’échappe…
    — Vibius
Paciacus, dit Crassus, avec un sourire mélancolique.
    — Ah
oui, Vibius. Or, dans sa propriété il y avait une grande grotte, juste au bord
de la mer, que Crassus avait visitée lorsqu’il était enfant. Il décida de s’y
cacher avec les siens, sans le dire à Vibius. Il ne voyait aucune raison de
mettre en danger son vieil ami. Mais bientôt, les vivres vinrent à manquer.
Crassus envoya donc un esclave à Vibius afin de savoir ce qu’il pouvait faire
pour lui. Le vieil homme fut ravi d’apprendre que Crassus avait pu s’échapper.
Il demanda à son intendant de préparer chaque jour de la nourriture et de la
déposer en un point isolé, sur les falaises.
    — Oh !
cette grotte ! l’interrompit Crassus. J’y avais joué enfant. Elle me
semblait alors aussi mystérieuse et envoûtante que celle de la sibylle.
Entourée de falaises abruptes, elle était tout près de l’eau, mais suffisamment
en hauteur pour être sûre. Un sentier y descendait, raide, étroit, difficile à
trouver. A l’intérieur, la voûte s’élevait à une hauteur impressionnante. A la
base des falaises, une source pure jaillissait, aussi disposions-nous de toute
l’eau que nous voulions. Des fissures dans la paroi nous déversaient la lumière
du jour ; tout en étant protégés de la pluie et du vent. Grâce à l’épaisseur
de la roche, l’endroit n’était ni humide ni froid. L’air restait sec et pur. Je
me sentais aussi heureux que lorsque j’étais enfant, libre de toutes
contraintes, dissimulé, en sécurité.
    « Un
matin, l’esclave envoyé pour nous apporter nos provisions me parut très agité,
il pouvait à peine parler. Il a fini par nous expliquer que deux déesses, une
blonde et une brune, avaient surgi de la mer et qu’elles se promenaient sur la
plage. Elles se dirigeaient même vers notre grotte. J’ai alors rampé vers l’ouverture
pour essayer de les voir de derrière les rochers. Si elles sortaient de la mer,
elles étaient curieusement sèches de la tête aux pieds. Et si elles étaient des
déesses, leurs robes étaient étrangement ordinaires et beaucoup moins belles
que les jeunes femmes elles-mêmes.
    « Je
me suis montré à elles. Elles se sont avancées vers moi sans hésitation. La
blonde m’a dit qu’elle s’appelait Alethea, qu’elle était esclave et me demanda
si j’étais son maître. Je réalisai alors que Vibius les envoyait. Le vieil
homme savait que je n’avais pas connu de femme depuis mon départ de Rome et il
voulait être le meilleur hôte possible pour un jeune homme de vingt-cinq ans.
Alethea et Diona m’ont rendu beaucoup plus agréable mon séjour.
    — Et
comment cela s’est-il terminé ? demandai-je.
    — La
nouvelle de la mort de Cinna finit par circuler. Marius étant enfin vulnérable,
je rassemblai mes fidèles et rejoignis Sylla.
    — Et
les esclaves, les deux jeunes filles ? demanda Fabius.
    Crassus
sourit.
    — Quelques
années plus tard, je les ai achetées à Vibius. Leur beauté n’était pas encore
fanée ; ma jeunesse non plus. Nous nous sommes retrouvés avec beaucoup de
plaisir. Je leur ai trouvé une place dans ma maison de Rome. Elles m’y servent
depuis lors. Je me suis assuré qu’elles ne manquent jamais de rien.
    — Charmant
épisode dans une vie aussi turbulente et exaltante ! dit Dionysius en
battant des mains. A dire vrai, cette histoire m’a toujours fasciné. Elle
ressemble presque trop à une fable pour être réelle. Penses-tu qu’une telle
chose puisse se reproduire ? Que des circonstances aussi étranges puissent
être de nouveau réunies, en d’autres lieux et en d’autres

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