L'Héritage des Templiers
s’emparer de mon journal.
— J’avais entendu dire que vous étiez un homme étrange.
— Je suis un homme malheureux qui n’a plus envie de vivre. Quelque chose en moi regrette cette situation. Pour mon fils, que j’aime. Et pour ma femme qui m’aime à sa façon. Mais je n’ai plus le désir de vivre.
— N’y a-t-il pas de moyens plus rapides de mourir ?
— Je déteste les armes, fit Nelle avec un haussement d’épaules, et il y a quelque chose de choquant à employer du poison. Saigner à mort ne me disait rien, alors j’ai opté pour la pendaison.
— Cela paraît égoïste.
— É goïste ? Je vais vous dire ce qui l’est : ce que les gens m’ont fait. Ils sont persuadés que Rennes-le-Château abrite tout un tas de secrets, touchant aussi bien aux héritiers de la monarchie française qu’aux extraterrestres. Combien de chercheurs ont-ils profané la région avec leur matériel ? Des murs ont été abattus, des cavités et des tunnels creusés. Ils sont même allés jusqu’à ouvrir certaines tombes pour exhumer des corps. Les théories les plus farfelues ont vu le jour, tout ça pour l’argent. »
Ce discours bizarre préalable au suicide laissait de Rochefort perplexe.
« J’ai vu des médiums tenir des séances de spiritisme et des voyants converser avec les morts. Les inventions ont été si nombreuses que la vérité paraît fade en comparaison aujourd’hui. J’ai été obligé de relayer ces absurdités. J’ai dû à mon tour souscrire à leurs idées fanatiques pour vendre des livres. Le public était friand de ce type d’insanités. C’est ridicule. Je me fais rire moi-même. Égoïste ? Ce sont tous ces crétins qui méritent ce qualificatif.
— Quelle est la vérité sur Rennes-le-Château ? demanda de Rochefort calmement.
— Je suis sûr que vous aimeriez bien la connaître.
— Vous vous rendez compte que vous êtes peut-être le seul à pouvoir résoudre l’énigme de Saunière ? fit de Rochefort, changeant de tactique.
— Mais je l’ai déjà résolue. »
De Rochefort se souvint du cryptogramme qu’il avait vu dans le compte rendu du maréchal conservé dans les archives de l’abbaye, celui que l’abbé Gélis et Saunière avaient découvert dans leurs églises, celui qui avait peut-être coûté la vie à Gélis.
— Ne pouvez-vous rien me dire ? insista-t-il d’un ton un peu trop suppliant à son goût.
— Vous êtes comme les autres, en quête de réponses faciles. Où est le défi dans tout ça ? Il m’a fallu des années pour déchiffrer ce cryptogramme.
— Et je suppose que vous avez pris peu de notes.
— À vous de le découvrir.
— Quel homme arrogant vous faites.
— Non, je suis un paumé. Il y a une différence. Voyez-vous, tous ces opportunistes venus pour trouver une satisfaction personnelle et repartis les mains vides m’ont appris quelque chose. »
De Rochefort attendit qu’il s’explique.
« Il n’y a absolument rien à découvrir.
— Vous mentez.
— Peut-être, qui sait ? »
De Rochefort décida de laisser Lars Nelle à ses occupations. « Puissiez-vous trouver la paix, dit-il en tournant les talons.
— Templier ! » s’écria Lars Nelle.
De Rochefort se retourna.
« Je vais vous faire une faveur. Vous ne le méritez pas car les frères que vous avez envoyés après moi m’ont causé beaucoup de soucis. D’un autre côté, votre ordre ne méritait pas non plus le sort qui lui a été réservé. Aussi vais-je vous donner un indice. Un petit coup de pouce. Vous ne le trouverez nulle part, pas même dans le journal. Vous serez le seul à l’avoir et, si vous êtes malin, vous pourrez même résoudre l’énigme. Vous avez de quoi noter ? »
De Rochefort revint sur ses pas, tira un petit carnet et un crayon de sa poche et les tendit à Nelle. Celui-ci s’en servit pour griffonner quelque chose, puis les lui rendit.
« Bonne chance », s’exclama-t-il avant de sauter du muret. De Rochefort entendit la corde se tendre et le cou du vieil homme se briser. Il approcha le calepin de ses yeux et à la pâle lueur de la lune déchiffra le message de Lars Nelle :
GOODBYE ST É PHANIE
La femme de Nelle s’appelait Stéphanie. Il secoua la tête. Ça n’avait rien d’un indice. De simples mots d’adieu qu’un homme adressait à sa femme .
Mais aujourd’hui, il n’en était plus si sûr.
Il avait décidé de laisser le mot sur le corps pour accréditer la
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