L'Héritage des Templiers
sophistiqué.
Les deux hommes étendus sur le dallage étaient ceux de la maison des ventes. Mais qui les avait mis hors d’état de nuire ? Malone se baissa pour ramasser les armes et fouiller les deux hommes. Ils n’avaient aucun papier sur eux. L’un d’eux portait un talkie-walkie sous sa veste. Il le lui arracha, ainsi que l’oreillette et le micro qui l’accompagnaient.
« Vous me recevez ? demanda-t-il.
— À qui ai-je l’honneur ?
— Vous êtes l’homme de la cathédrale ? Celui qui vient d’assassiner Peter Hansen ?
— Vous avez en partie raison. »
Malone n’était pas dupe : personne ne se risquerait à passer aux aveux sur une fréquence non protégée. Le message était clair pourtant. « Vos hommes sont hors d’état de nuire.
— Grâce à vous ?
— J’aurais aimé pouvoir vous dire oui. Qui êtes-vous ?
— Cette question n’a aucun rapport avec notre conversation.
— Peter Hansen vous gênait-il donc tant que ça ?
— Je déteste être déçu.
— C’est un euphémisme. Mais quelqu’un a pris vos deux complices par surprise. J’ignore de qui il s’agit, mais il me plaît. »
Silence. Malone attendit un moment ; il s’apprêtait à parler lorsque la radio émit un grésillement. « J’espère que vous saurez profiter de votre bonne fortune et retournerez vendre vos livres. »
Il y eut un clic lorsque l’inconnu éteignit son récepteur.
12
Abbaye des Fontaines
Pyrénées françaises
23 h 30
Le sénéchal s’éveilla après s’être assoupi sur une chaise placée près du lit du maître. Un rapide coup d’œil au réveil lui apprit qu’il avait dormi une heure environ. Il se tourna vers le malade dont il n’entendait plus la respiration difficile. Grâce aux quelques rais de lumière artificielle qui filtraient dans la pièce, il vit que le vieil homme avait déjà les yeux vitreux.
Il lui prit le pouls.
Son maître s’était éteint.
Le courage du sénéchal l’abandonna et il s’agenouilla pour prier à la mémoire de son ami disparu. Vaincu par le cancer. La lutte était terminée. Un conflit de tout autre ampleur débuterait bientôt. Il pria le Seigneur d’accueillir au paradis l’âme du vieil homme. Personne ne méritait davantage d’être sauvé. Il lui avait tout appris ; ses échecs et sa solitude émotionnelle l’avaient conduit plusieurs années auparavant à se placer sous l’aile du vieil homme. Son apprentissage avait été court et il s’était toujours efforcé de ne pas le décevoir. Les erreurs sont tolérées, à condition qu’elles ne se reproduisent pas, lui avait-il dit une seule fois, puisque le maître ne se répétait jamais.
Bien des frères prenaient sa franchise pour de l’arrogance. D’autres lui reprochaient sa supposée condescendance. Mais personne n’avait jamais contesté l’autorité du maître. Un frère se devait d’obéir. À l’occasion du choix du successeur venait le temps des questions.
Voilà précisément ce qui l’attendait aujourd’hui.
Pour la soixante-septième fois depuis le commencement, qui remontait au début du XII e siècle, un nouveau maître serait choisi. Les soixante-six précédents n’avaient administré l’ordre que dix-huit années en moyenne et leur contribution pouvait être qualifiée d’insignifiante pour certains à d’exceptionnelle pour d’autres. Chacun d’eux cependant avait servi l’ordre jusqu’à la mort. Certains étaient même morts au combat, mais les jours de guerre ouverte étaient depuis longtemps révolus. Aujourd’hui, la quête était plus subtile, les batailles modernes se jouaient sur des terrains que les pères fondateurs de l’ordre n’auraient jamais imaginés. Les cours de justice, Internet, la littérature, la presse : l’ordre arpentait régulièrement ces lieux pour s’assurer que ses secrets étaient bien gardés, qu’il continuait à exister sans attirer l’attention. Les maîtres successifs, aussi inefficaces eussent-ils été, avaient réussi à atteindre cet objectif essentiel. Le prochain mandat serait décisif. Une guerre intestine se préparait, guerre que le vieil homme étendu devant lui avait réussi à prévenir avec une étonnante clairvoyance quant aux visées de son ennemi.
Le silence qui enveloppait le sénéchal rendait la rivière bouillonnante plus proche. L’été, les frères se rendaient souvent à la cascade et aimaient à nager dans l’étang glacé. Le
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