L'Héritage des Templiers

contradictions. Ils font vœu de pauvreté mais disposent de biens et d’un savoir d’une inestimable valeur. Secrets mais sociables. Moines et guerriers. Le stéréotype hollywoodien n’a pas grand-chose à voir avec la véritable nature des chevaliers du Temple. Ne vous laissez pas emporter par la fiction. C’étaient des brutes.
    — Comment l’ordre a-t-il pu survivre pendant sept siècles sans que personne ne le sache ?
    — Comment les insectes et les animaux survivent-ils dans la nature sans que personne ne les remarque ? Des milliers de nouvelles espèces sont pourtant répertoriées tous les jours. »
    C’est juste, se dit Malone sans être pour autant tout à fait convaincu. « Qu’est-ce qui est en jeu, au fond ?
    — Lars était à la recherche du trésor des Templiers.
    — Quel trésor ?
    — Au début de son règne, Philippe le Bel dévalua la devise pour stimuler l’économie du royaume de France. La mesure fut impopulaire au point que des émeutiers menacèrent d’attenter à sa vie. Il fuit son palais pour se réfugier au Temple. C’est à cette occasion qu’il eut un premier aperçu de la richesse de l’ordre. Des années plus tard, ayant désespérément besoin de fonds, il concocta un plan visant à faire accuser l’ordre d’hérésie. Souvenez-vous que tous les biens des hérétiques étaient saisis au profit de la couronne. Cependant, après les arrestations de 1307, Philippe le Bel découvrit que le coffre du Temple de Paris, mais aussi ceux d’autres commanderies à travers la France étaient vides. Pas une once de l’or des Templiers ne fut découverte. Jamais.
    — Et Lars pensait trouver ce trésor à Rennes-le-Château ?
    — Pas forcément au cœur du village, mais quelque part en Languedoc. Les indices sont suffisamment nombreux pour nous permettre de croire à cette théorie. Cela dit, les Templiers ne nous ont pas facilité la tâche.
    — Et que vient faire dans cette histoire le livre que vous avez acheté ce soir ?
    — Eugène Stüblein était maire de Fa, village voisin de Rennes-le-Château. C’était un érudit, musicien et astronome amateur. Il commença par écrire un récit de voyage sur la région avant de s’attaquer à Pierres gravées du Languedoc. Un curieux volume décrivant les pierres tombales du cimetière de Rennes-le-Château et des environs. Étrange passion, je vous le concède, mais pas si originale que cela – le sud de la France est célèbre pour ses tombes originales. Dans le livre on trouve le croquis d’une stèle qui l’avait particulièrement frappé. Le croquis est d’autant plus intéressant que la tombe n’existe plus.
    — Voulez-vous me montrer ce dont vous parlez ? » demanda Malone.
    Le vieil homme se leva pour s’approcher à grand-peine d’une table d’appoint. Il revint s’asseoir le livre dans les mains. « Livré il y a une heure. »
    Malone l’ouvrit à la page marquée par un signet.
     

     
    « En partant du principe que le croquis de Stüblein est fidèle à l’original, d’après Lars, cette stèle nous met sur la voie du trésor. Lars a recherché ce livre pendant des années. Un exemplaire devrait se trouver à la Bibliothèque nationale où l’on conserve une copie de tous les livres parus en France. Pourtant, bien que le titre figure au catalogue, l’exemplaire n’est pas en rayon.
    — Lars était-il le seul à connaître l’existence de cet ouvrage ? demanda Malone.
    — Aucune idée. La plupart des gens ne croient pas en son existence.
    — D’où provient cet exemplaire ?
    — J’ai vérifié auprès du commissaire-priseur. Il appartenait à un ingénieur des chemins de fer ayant conçu la ligne reliant Carcassonne au sud des Pyrénées. Il a pris sa retraite en 1927 et est décédé en 1946. L’ouvrage faisait partie des biens de sa fille. À la mort de celle-ci, son fils l’a confié à la salle des ventes. L’ingénieur s’intéressait au Languedoc, particulièrement à Rennes-le-Château, et répertoriait lui aussi les inscriptions funéraires.
    — Qui a averti Stéphanie pour la vente aux enchères ? insista Malone que la réponse de Henrik avait laissé sur sa faim.
    — Là est la question, répondit le vieil homme.
    — Stéphanie, à l’hôtel, vous m’avez dit qu’un mot accompagnait le livre. L’avez-vous sur vous ? »
    Elle fouilla dans son sac et en tira un vieux carnet tout abîmé à reliure de cuir. Entre ses pages, elle avait