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L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

Titel: L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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travail pour six semaines seulement. En fait, ce fut six ans. On ne pouvait nous accuser d’aucun délit. En été nous voyagions en roulotte, en hiver nous vivions ici, à Brückhaufen. Ils avaient emmené mon père à Dachau, ma belle-mère et mes petites sœurs en Pologne. Arrivés à Ravensbrück on nous a d’abord donné des habits, ensuite j’ai travaillé dans les sablières, puis dans les briqueteries de 6 heures du matin jusqu’à l’appel du soir. Nous avons tout d’abord vécu avec les femmes qui étudiaient la Bible, puis je suis allée chez les tailleurs où l’on travaillait pour les soldats. C’est seulement parce que je m’appliquais dans mon travail que les choses allèrent mieux pour moi. Et pourtant trois fois j’ai été punie. La première fois, j’ai dû rester plusieurs heures debout après rappel. Une autre fois je fus sévèrement battue parce que j’avais été dormir près de ma tante pour me réchauffer. Une autre fois je fus condamnée à rester dans le noir et sans nourriture parce que j’avais rétréci mon uniforme du camp après quatre ans de déportation. Lorsqu’en été 1944, le long train qui transportait les nôtres arriva d’Auschwitz, nous sortîmes en courant pour chercher nos familles. Je voulais y trouver ma belle-mère et mes sœurs. En fait, d’après ce que l’on m’a dit alors, elles étaient mortes à Litzmunnstadt. « Nous étions avant une grande famille. »
    — Quelques (118) mois après l’installation dans la région des lacs du Mecklembourg du grand camp de concentration pour femmes, très vite après que les premières prisonnières y eussent été parquées, on vit arriver un transport qui différait totalement de tous les précédents. C’était le premier transport de femmes et de jeunes filles provenant des « colonies » tsiganes du Burgenland, de la région de Vienne et de la Basse-Autriche. Dans un document « confidentiel » de la R.S.H.A. il est dit que les femmes dont les maris, les pères ou les frères avaient été emmenés à Dachau devaient être « à tout prix protégées du danger de la prostitution ». Cela n’empêcha pas trois ans après, le Reichsführer S.S. Himmler d’ordonner par un autre document « confidentiel », de choisir parmi ces mêmes femmes « asociales » de Ravensbrück du personnel pour le bordel du camp.
    — Un matin on vit les femmes tsiganes s’asseoir sur la grande place entre les bâtiments de la cuisine et les baraquements, accablées, abruties par la peur après avoir été arrachées brutalement à leur environnement et à leur famille. Les « anciennes » prisonnières entendaient leurs plaintes et leurs lamentations. Les petites filles s’agrippaient aux jupes de leur mère et se mettaient à hurler dès qu’un S.S. faisait son apparition. Pendant deux jours et une nuit les S.S. les laissèrent ainsi accroupies sur le sol sablonneux, sous les coups et les quolibets, soumises le jour au soleil brûlant et la nuit au froid, jusqu’à ce qu’enfin ils se décident à les « enregistrer », à les déshabiller, à les baigner avant de les installer dans un Block. Très peu d’entre elles devaient assister à la fin de la guerre et à la libération du camp.
    — La (119) « chronologie courante » que les anciennes prisonnières de Ravensbrück ont pu constituer grâce à des récits individuels, et qui couvre une période allant jusqu’au 1 er  avril 1945, indique le premier transport de 440 femmes et enfants tsiganes en provenance du Burgenland qui devaient porter les numéros 1514 à 1953. Ce premier transport comportait des jeunes filles à peine sorties de l’école – c’est-à-dire entre 14 et 17 ans – et souvent sans leurs parents. Au début, ces jeunes prisonnières durent déblayer le sable, porter des briques, faire des routes. Plus tard, un grand nombre d’entre elles furent employées dans des ateliers, dans des vanneries, par des tailleurs ou des teinturiers. Plus que dans les autres camps les femmes tsiganes furent petit à petit englobées dans la communauté du camp. De femme à femme, de mère à mère, se tissèrent des liens de solidarité qui naturellement furent très précieux, surtout pour les enfants. Maria Mrozek, aujourd’hui directrice d’un Institut d’éducation en Pologne, nous a envoyé un court récit sur l’époque où elle était la doyenne du Block dans les baraquements des tsiganes.
    — « Dans le Block, il y avait

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