L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes
suis né le 24 juillet 1871. J’ai dirigé le département des maladies tropicales à l’institut Robert Koch depuis 1905. J’ai pris ma retraite en 1936. C’est le ministre de la Santé publique du III e Reich, le docteur Conti qui me rappela à l’activité et me fit comparaître devant Himmler en 1941 ou janvier 1942. À ce moment je venais d’Italie où j’avais entrepris des recherches sur un vaccin contre le paludisme et il me demanda de continuer ces recherches à Dachau… Il n’était pas possible de refuser d’exécuter l’ordre de Himmler. Je commençai mes expériences sur les prisonniers du camp en février 1942 et je continuai jusqu’au 13 mars 1945… Je pense avoir expérimenté sur neuf cents à mille sujets… si j’avais refusé j’aurais peut-être été envoyé moi aussi dans un camp de concentration. J’essayais de découvrir une méthode qui aurait sauvé des millions d’hommes.
— Après (185) avoir survécu à différents camps de concentration, j’arrivai à Dachau le 25 mai 1944. Je fus utilisé comme médecin du Revier ; en même temps, j’ai été nommé représentant du camp par les Hollandais, et plus tard, les Danois et les Norvégiens. En tant que chef du service d’expériences sur les prisonniers, le professeur Schilling en tuait des centaines et des centaines. Des prisonniers, particulièrement des Polonais, des Russes et des tsiganes, furent amenés là de force ; on leur injecta du sang de paludéens, ils contractèrent le paludisme, et subirent tout un tas de traitements expérimentaux qui n’étaient pas basés sur la thérapeutique actuelle du paludisme.
— Lorsqu’ils devenaient trop malades, ils étaient transférés à la section de médecine, où je devais les traiter. Aucun malade n’avait le droit de mourir dans le service du paludisme. Pendant la dernière année, j’eus à m’occuper d’innombrables victimes du paludisme qui moururent des conséquences directes de cette maladie, et de nombreux malades atteints des complications du paludisme, pneumonies, maladies du foie et du cœur ; ils en moururent, et aussi beaucoup d’autres, empoisonnés par les traitements expérimentaux. Je me rappelle entre autres qu’en vingt-quatre heures, je reçus quatre malades dans le coma, empoisonnés par une énorme dose de pyramidon. Lorsqu’on découvrait des cas de paludisme dans notre service, nous devions les transférer au service du paludisme, où nous savions que le traitement était pire que dans nos propres salles, et nous essayions de les garder avec un faux diagnostic. Le professeur Schilling a été l’assassin de centaines de prisonniers de différentes nationalités.
Le professeur Schilling fut condamné à mort et exécuté. Il venait d’avoir soixante-quatorze ans. Ses dernières paroles furent :
« Tous ces gens n’ont rien compris. Maintenant il est trop tard. Ce sont eux les criminels. »
Au cours de son dernier interrogatoire, Klaus Schilling livra sans doute son véritable visage en répondant ainsi aux questions du procureur Astor.
Astor. – Quand les prisonniers arrivaient à votre service, leur disait-on qu’ils étaient libres de ne pas subir l’expérience, s’ils ne le voulaient pas ?
S. – Non.
A. – Savez-vous docteur, que les prisonniers à Dachau, avaient appris, dès le premier jour, qu’ils devaient obéir à tout ordre donné par les S.S., les gardes, les Kapos, ou quelque supérieur que ce soit ?
S. – Je pense que c’est une chose bien entendue dans n’importe quel camp de prisonniers.
A. – Vous pensez que ces prisonniers devaient obéir à l’ordre de subir cette expérience, ou alors qu’il leur arriverait quelque chose d’aussi grave qu’il vous serait arrivé à vous-même, si vous n’aviez pas obéi à l’ordre de Himmler ?
S. – C’est exact, si j’avais refusé, j’aurais peut-être été envoyé dans un camp de concentration.
A. – Je vous demande maintenant, en tant que professionnel des règles médicales, en conscience, que serait-il arrivé à un prisonnier de Dachau qui aurait refusé de se soumettre à votre inoculation du paludisme ?
S. – Il aurait été puni.
A. – Dois-je comprendre que vous ne vous intéressiez pas à la sélection de ces hommes ; vous les preniez comme ils venaient, et vous pratiquiez vos expériences.
S. – Oui.
A. – Avant de venir à Dachau, avez-vous inoculé le paludisme à des Allemands ?
S. – Oui, à des
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