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L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

Titel: L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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paralytiques dans les asiles. En plus de cela, j’ai eu l’occasion d’inoculer quatorze à quinze étudiants volontaires, à Berlin. Ce sont les seuls sujets d’expériences volontaires que j’ai eus.
    A. – Connaissiez-vous la nationalité de vos sujets d’expériences.
    S. – Je ne sais pas. J’avais besoin d’un interprète.
    A. – Connaissiez-vous la profession de ces prisonniers ?
    S. – Non, je ne l’ai pas demandée.
    A. – Savez-vous que vous avez fait des expériences sur des prêtres catholiques ?
    S. – Des prêtres ? Je ne savais pas, je n’ai pas demandé, je le regrette. Je peux simplement expliquer que je me souciais aussi peu que possible des à-côtés ; je faisais mon devoir tel qu’il m’avait été ordonné.
    A. – Docteur Schilling, un grand nombre de ces prisonniers, non seulement n’acceptèrent pas les expériences, mais protestèrent auprès de vous.
    S. – Il n’y en a eu trois ou quatre. Je leur ai expliqué ce qu’on allait faire d’eux, et je leur promis de les guérir.
    A. – Comment pouviez-vous garantir la guérison dans ces expériences ? Il ne s’agissait pas de traitement, il s’agissait d’immunisation, de vaccination.
    S. – En ce qui concerne le traitement, nous avons eu près de cent pour cent de guérisons en deux ou trois mois. La meilleure méthode était constituée par deux séries d’atébrine, à raison de trois grammes pendant cinq jours, à intervalles de dix jours, puis un nouveau traitement avec l’atébrine.
    A. – Pouvez-vous dire qu’il n’y a pas eu un seul cas de mort à la suite de vos expériences ?
    S. – Je ne puis pas le dire.
    A. – Savez-vous que certains des prisonniers sur lesquels vous avez expérimenté sont morts ?
    S. – Oui, certains moururent, mais pas à cause du paludisme ; ils moururent de tuberculose ou de pneumonie. J’ai chez moi une liste des causes de la mort de ces malades, après inoculation et traitement. Si un homme est tuberculeux, ou typhique, et présente un paludisme spontané ; s’il n’est pas traité pour le paludisme, et qu’il meure d’une autre maladie, le paludisme n’est que la cause secondaire de la mort.
    Ainsi donc, comme on vient de le voir, les « tsiganes de sang mêlé » furent un « matériel humain » digne d’intérêt pour les expérimentateurs du camp de Dachau. Aux quatre expériences principales abordées dans ce chapitre, il faudrait ajouter d’autres essais secondaires portant sur la nourriture, les phlegmons, les médicaments comme le Polygal ou différents poisons, qui se soldèrent par plusieurs dizaines de morts dont au moins vingt tsiganes. Un vieux médecin français déporté à Dachau à qui je demandais : « Mais pourquoi choisir des tsiganes pour ces expériences ? », me répondit :
    — « Tout le monde méprisait les tsiganes, les tsiganes en général de race pure ou métis, les déportés comme les S.S. Alors pourquoi se priver ? Qui revendiquerait ? Qui se plaindrait ? Qui témoignerait ? Les tsiganes étaient moins que les juifs. Les tsiganes n’avaient aucune représentation dans les États qui les avaient vus naître. Ils n’existaient pas au niveau national et international. À la limite nous avons assisté là à des crimes parfaits. Des crimes sans cadavres. Qui voulez-vous – encore aujourd’hui – qui réclame un tsigane ?

NEGRO
    La chronique de Mauthausen, l’une des mieux connues parce que parfaitement étudiée, complétée par des Amicales exemplaires en France comme en Autriche ou en Allemagne, reste pratiquement muette sur les tsiganes de ce camp : quelques notations rapides inutilisables pour une étude d’ensemble : quant aux témoignages de déportés ils s’attachent à la description d’un personnage « inoubliable », un Kapo tsigane, un de plus, dont la bestialité par son énormité fait oublier qu’à côté de lui vivaient des tsiganes ordinaires.
    Matéo Aguerez s’est établi aujourd’hui en Italie. Raflé dans la région de Pamiers par la gendarmerie ariégeoise de Foix, il partagea l’internement des républicains espagnols du camp du Vernet avant de débarquer à Mauthausen. Il travailla « jusqu’à la presque mort » à la construction de la citadelle aux miradors coiffés de chapeaux chinois.
    — « J’étais un tsigane espagnol. C’est tout. Personne ne s’est douté que j’étais tsigane parce que je ne l’ai dit à personne. Espagnol et pas tsigane. Nous

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