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L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

Titel: L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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dur. Outre l’entretien du camp, les Kommandos dits extérieurs faisaient des travaux de terrassement assez simple. Les ouvriers spécialisés : maçons, électriciens, plombiers, menuisiers, venaient du camp des hommes. Et quel ouvrier ne désirait pas ardemment venir travailler au camp tsigane ? Beaucoup de jeunes avaient appris un métier au camp et étaient devenus des ouvriers de première classe. Lorsque des membres de la Maurerschule (école de maçonnerie) par exemple arrivaient, les jeunes filles et les jeunes femmes tsiganes oubliaient où elles étaient. Parfois des habitants des autres camps venaient à la désinfection chez nous : c’étaient des occasions de rencontres.
    — La Sauna du camp tsigane reçut un jour les membres du Sonderkommando. La population du camp fut consignée dans les Blocks car les membres de ce Kommando ne devaient avoir aucun contact avec les autres détenus, mais la surveillance exercée par les S.S. était plutôt de façade. On voyait les « ouvriers » du Sonder parler avec les femmes et ce fut surtout l’occasion pour les trafics. Au début, le Sonderkommando était composé presque exclusivement de juifs polonais. Alors les potentats polonais, maîtres de l’intendance, trafiquaient directement avec eux car ils parlaient la même langue. Mais après les « renouvellements » successifs de ce Kommando, ses membres étaient presque tous des juifs français, grecs, et finalement hongrois. Les potentats polonais avaient donc besoin d’interprètes. C’est ainsi que je fus appelé par un Polonais de l’intendance.
    — « Hé, toi, viens. Dis-lui à ce juif que l’autre jour il m’a donné une musette de dents en or où il y avait aussi de l’os. Je lui donne aujourd’hui six saucissons et une douzaine de pains et qu’il m’apporte des dents, mais surtout pas de bridges avec de l’os. S’il veut des cubes de margarine qu’il m’apporte des diamants. Je n’ai pas besoin de montres. »
    — Un autre jour, un fonctionnaire subalterne me confia un petit sac de toile de un kilo environ contenant des montres en or, des colliers, des diamants. Je devais le cacher dans ma paillasse. Je fus heureux le surlendemain quand il vint le reprendre car pendant ces deux jours l’appétit et le sommeil m’avaient fui, remplacés par la peur d’être découvert. Refuser de le garder, il ne fallait pas y songer. Ces potentats n’avaient pas le droit de vie et de mort, mais ils avaient le pouvoir de vie et de mort.
    — À plusieurs reprises je fus obligé « d’expertiser » et d’estimer des pierres.
    — « Comment, un juif et médecin par-dessus le marché qui ne sait pas estimer une pierre ? À qui racontes-tu ça, Kurwa ? »
    — Voilà la réponse à mes protestations d’incompétence.
    — Combien différent d’eux était le jeune Polonais Roman Dambrowski. Il cherchait à s’instruire et aimait particulièrement la langue française. Il me demandait, dès que nous avions la possibilité de nous rencontrer, de lui parler de la littérature française et de l’histoire de France. Je ne me rappelle pas à quelle époque il fut nommé chef de l’intendance. Son meilleur ami, Tadeusz Lach, était employé à la pharmacie. Un jour, Roman me dit confidentiellement, en français, que le « médecin chauve » du Block 32, lui avait volé une grande quantité d’or et de diamants. Les deux amis avaient en quelques mois accumulé une fortune fabuleuse. Je crois savoir comment ils y étaient parvenus mais lorsque nous vîmes à quoi elle leur servit, nous en fûmes tous heureux. Elle leur servit à organiser et à réussir, après avoir acheté plusieurs S.S., une évasion d’importance. Ils ne furent jamais repris et il est certain qu’ils contribuèrent à faire connaître au monde ce qui se passait à Auschwitz. Ils méritent tous les deux notre gratitude.
    — Le docteur Wrona avait fait vœu de ne jamais parler allemand. Il me dit aussi qu’étant « médecin-chef » du Block, il ne s’occuperait d’aucun malade sauf s’il était appelé par nous en qualité de consultant. Je lui répliquai que soigner les tsiganes n’était pas travailler pour l’Allemagne, au contraire, mais il resta inébranlable. Il avait comme secrétaire une jeune tsigane allemande brune, vive, gaie, assez belle. Le docteur Wrona était âgé et il parlait très bien le russe, ayant fait ses études médicales sous le régime russe, je crois. Il vivait sous le

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