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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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conduisit Odette par des chemins détournés, des corridors qu’il semblait très bien connaître, jusqu’à la petite porte par laquelle le roi lui-même était entré dans la galerie.
    Odette de Champdivers entra sans hésiter.
    Quelques minutes, Saïtano demeura là, écoutant, courbé, les yeux plissés, la figure convulsée, pareil à Méphistophélès méditant quelque chute d’ange…
    – Va, murmura-t-il. Va, Odette de Champdivers… va, Roselys !… va sourire à Jean sans Peur… à ton père !… C’est toi qui me le livreras !
    Jean sans Peur, à ce moment même, venait de voir Odette de Champdivers. Il la vit venir à lui. Et elle lui souriait… Il s’arrêta sur place, pétrifié, comme fasciné par ce sourire.
    Sa main levée, prête à désigner Charles VI, à le saisir peut-être, retomba lentement.
    L’ordre qu’il allait crier expira sur ses lèvres…
    Odette s’était arrêtée devant lui, tout près. Et Odette souriait ! Et Odette murmurait :
    – Messire duc, qu’allez-vous faire ? Quiconque attente au roi ne sera jamais aimé de moi…
    – Que dites-vous ? Que dites-vous ? bégaya Jean sans Peur, la tête en feu.
    Mais déjà Odette s’était retournée vers le roi et, lui montrant le duc de Bourgogne :
    – Sire, dit-elle, voici un fidèle et loyal duc qui vous défendra, si besoin est.
    – Sire, cria Jean sans Peur, c’est vérité pure, je suis tout à vous !
    Ce cri lui échappa, pour ainsi dire. Enivré de ce qu’il avait cru entrevoir dans les paroles d’Odette, il oubliait fureur, vengeance, ambition, rêve de puissance, et contemplait Odette. Elle était montée sur l’estrade, s’était approchée du trône, et, doucement, elle appuyait sa main sur l’épaule du roi, sans souci des rites, de cour, des règles d’étiquette, du respect dû à la majesté royale. Et en même temps, elle laissa tomber son regard loyal, clair, lumineux, sur le duc de Bourgogne, et lui dit :
    – Merci, monseigneur. Vous avez parlé en bon gentilhomme.
    Le duc s’inclina très bas, tout frémissant, tout ébloui, – et en lui-même :
    – Elle est à moi !…
    Louis d’Orléans, assista à cette scène rapide, sans la comprendre. Il eut l’impression nette qu’il venait d’échapper à la mort. Pourquoi ? Comment un mot de cette jeune fille avait-il pu bouleverser Jean sans Peur tout prêt à agir ? C’est ce qu’il remit à plus tard de s’expliquer, – et c’est ce que le malheureux prince n’eut pas le temps d’éclaircir, comme on va voir.
    Quant aux Bourguignons, ils se regardèrent d’abord avec stupeur. Plusieurs croyant à une feinte s’avancèrent vers l’estrade du trône ; Jean sans Peur se tourna vers eux et les foudroya du regard ; il y eut un recul effaré de la bande.
    Et déjà le duc de Bourgogne disait quelques mots à voix basse à Ocquetonville qui sortit furieux, les yeux pleins de rage, et grognant force jurons : ces mots, c’était l’ordre formel de faire évacuer à l’instant même l’Hôtel Saint-Pol ! C’était fini. Le coup était manqué. L’occasion se représenterait-elle jamais, aussi favorable, en d’aussi faciles circonstances ?…
    Au moment où Odette vint poser sa main sur son épaule, Charles VI tremblait. La sueur pointait à la racine de ses cheveux qui se hérissaient. Ses yeux devenaient hagards…
    La crise se préparait !
    Le poison de démence agissait !
    Le poison que, la nuit de l’orage, Saïtano avait remis à la reine !

XVII – RÉCONCILIATION DE JEAN SANS PEUR ET DE LOUIS D’ORLÉANS
    Ce qu’il y eut de plus étonnant, ce fut la disparition de la reine. Pendant la période de quinze jours qui suivit, le roi, malgré les exorcismes des moines, malgré les efforts des guérisseurs, demeura en état de démence, et on lui cacha l’événement dont s’occupait tout l’Hôtel Saint-Pol.
    Disons tout de suite qu’Odette de Champdivers, en proie elle-même à une fièvre violente, ne parut pas auprès du roi. Cette fièvre s’était déclarée le jour même où Saïtano avait pénétré dans son appartement et lui avait un instant touché la main.
    En cette période, aussi, Louis d’Orléans renforça la garnison de l’Hôtel Saint-Pol. La leçon avait été cruelle. Il en profita. Trois ou quatre capitaines d’armes furent disgraciés. Une demi-compagnie de Suisses fut licenciée. Le capitaine qui s’était tué fut pendu en effigie pour avoir laissé surprendre la porte.

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