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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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l’aspect qu’avait pris soudain Paris, admira que Jean sans Peur eût eu cette idée de se déclarer publiquement pour les bourgeois et le peuple.
    Ceci ne vient pas de cette brute sanguinaire qui ne sait que lever et abattre le bras. Il y a du Berry là-dessous. Voilà ce qu’il pensa. Mais il fit fermer toutes les portes de l’Hôtel Saint-Pol, plaça aux machicoulis des chaudrons pleins d’huile qu’on devait faire bouillir au bon moment, bourra les tours d’arbalétriers, disposa des archers tout le long des créneaux du mur d’enceinte, et enfin, dans la cour des joutes passa en revue un gros de quatre mille hommes d’armes à qui furent distribuées des masses de fer hérissées de pointes et des haches de guerre, sans compter les piques, les lances, les hallebardes.
    Cela fait, il porta à Jean sans Peur un coup terrible : simplement, il envoya des émissaires à tous les personnages convoqués pour le fameux conseil où l’on devait remédier à la misère du peuple ; en raison de la santé du roi, le conseil était renvoyé au premier jour de novembre. D’ici-là, les portes de l’Hôtel Saint-Pol resteraient fermées.
    En même temps, il fit annoncer sur toutes les places publiques que jusqu’à l’ouverture du conseil les commis de gamelle, collecteurs d’impôts aux halles et autres rongeurs détestés ne devaient pas se montrer. C’était en somme la suppression des impôts quotidiens qui consistaient à prélever une taxe sur toute vente qui se faisait aux Halles, et à forcer les Parisiens à prendre leur sel à l’entrepôt royal.
    Jean sans Peur fut atterré. Il ne pouvait songer à donner l’assaut à l’Hôtel Saint-Pol. Il avait compté y entrer par surprise avec ses troupes et, profitant de la terreur, imposer ses volontés au roi de France… et peut-être… La ruse de Louis d’Orléans déjouait ce plan, et bientôt un autre sujet d’ennui et de colère se présenta encore pour lui. En effet, les Parisiens commençaient, au bout de quelques jours, à trouver que les choses traînaient en longueur.
    Le cri relatif aux impôts avait apaisé pour le moment beaucoup de bourgeois. Beaucoup d’autres se disaient que le duc de Bourgogne trahissait leur cause. Le peuple des Halles et de la marine demeurait seul debout, sombre et résolu. Enfin, les Parisiens qui s’étaient disputés l’honneur d’héberger les gens d’armes de Bourgogne se lassèrent au bout de huit à dix jours. Ils trouvèrent ces hôtes insupportables, avides, goinfres, ivrognes… Jean sans Peur dut les faire sortir de Paris, et on établit pour eux un camp dans le Pré aux Clercs.
    Tel était l’état des partis, qu’il nous a fallu présenter avec précision, faute de quoi, notre récit, à nous, se fût agité dans le vide et eût manqué de clarté.
    Le 1 er novembre arriva. On n’avait toujours pas de nouvelles du duc de Berry, retranché à Wincestre, et de la reine Isabeau de Bavière, disparue, disait-on, avec le dauphin.
    Dans la nuit, Jean sans Peur fit rentrer dans Paris ses six mille Bourguignons (Suisses pour la plupart) et les disposa sans bruit dans les ruelles qui avoisinaient l’Hôtel Saint-Pol. Ses cinq cents chevaliers se tinrent dans la rue Saint-Antoine.
    Lorsque l’heure du conseil arriva, il se présenta avec une faible escorte, au moment où le recteur et les docteurs de l’Université, tous en robe, passaient le pont-levis. Le duc entra derrière eux avec une douzaine de gentilshommes et, voyant que les deux tours de la porte étaient pleines d’archers, cria au capitaine qui commandait ce poste important :
    – Vous faites bien d’être sur vos gardes, car les damnés Parisiens ont de mauvaises intentions. Au surplus, pour la défense du roi, je vais vous aider à garder la porte. Vive le roi !
    À ce cri poussé d’une voix éclatante, les chevaliers rangés dans la rue Saint-Antoine accoururent en vociférant, eux, aussi : « Vive le roi ! » Et avant même que le capitaine eût vu de quoi il retournait, ils occupaient la voûte, le pont-levis et une partie de la cour. Là, face à Paris, ils avaient l’air de braver d’invincibles rebelles, et ils crièrent :
    – Capitaine, disposez de nous pour la défense de l’Hôtel et du roi. Nous sommes à vos ordres !…
    Le capitaine d’armes vit qu’il était joué. Les Bourguignons, maîtres de cette porte, étaient maîtres de l’Hôtel Saint-Pol, et déjà on voyait s’avancer l’avant-garde des six

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