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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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ses instructions. À l’extrémité de la salle (située au premier étage) s’ouvrait une étroite baie sans porte. Là commençait un escalier tournant qui descendait au rez-de-chaussée dans une salle que nous allons visiter. Les trois gentilshommes suivaient le maître, mais, malgré eux, leurs regards se tournaient vers le sac qui, là-bas, sur la table, leur semblait un soleil.
    – Il faut tout prévoir, dit Jean sans Peur, même le cas où cet homme vous tiendrait tête à tous quatre…
    – Tous trois, rectifia Courteheuse.
    – Tous quatre : Ocquetonville sera avec vous. Donc, au cri de Notre-Dame, vous sortez, la dague à la main. Si l’homme vous tient tête, et que vous n’arriviez pas à l’abattre, vous le pousserez, l’acculerez, le forcerez à chercher refuge dans cet escalier. Le reste ne vous regarde pas.
    Ce fut tout. Merveilleusement dressés, d’ordinaire, un mot leur suffisait pour connaître leur besogne. Cette fois-ci le maître faisait bonne mesure, ils avaient eu tout un discours.
    Jean sans Peur descendit l’étroit escalier de pierre. Il aboutissait à une porte de fer au delà de laquelle on se trouvait dans une salle basse assez spacieuse, mais entièrement vide. Des murs de pierre, un plafond de pierre, et de la pierre dure sur le sol. Il y avait sur les dalles et sur les murs quelques éclaboussures brunâtres. Et le duc de Bourgogne eut un léger frisson quand il entra. Si les pierres parlaient, elles eussent peut-être expliqué ce frisson… si elles parlaient !… Mais celles-ci parlaient !… Ces éclaboussures, c’étaient sinon leur voix, du moins leur écriture. Elles disaient clairement : Prenez garde, vous qui entrez, ici on tue !
    Bruscaille, Bragaille, Brancaillon, à l’entrée de Jean sans Peur, se figèrent en une immobilité de respect. Ils étaient là depuis une heure. Ils savaient ce qu’on allait leur demander.
    – Écoutez bien, drôles ; depuis quelque temps j’ai à me plaindre de vous ; d’abord, vous n’avez pu mettre la main sur l’homme que je vous avais désigné ; ensuite, vous avez cessé de surveiller, sans en avoir reçu l’ordre, le chevalier de l’auberge de la « Truie Pendue ». Cela ne peut durer ainsi, et je vais être forcé de vous renvoyer à la Cour des Miracles d’où je vous ai tirés.
    Les trois s’entre-regardèrent d’un air de stupéfaction profonde.
    – Écoutez-moi, reprit le duc. Il y a là-haut, sur la table, un sac plein d’or, vous entendez ?
    – Plein d’or ! s’écria Brancaillon, les yeux écarquillés.
    – Dans ce sac, quand vous remonterez d’ici, vous aurez le droit de plonger chacun votre main et d’emporter chacun ce que tiendra cette main – si toutefois le sac y est encore. Écoutez et tâchez de comprendre. Un homme va venir. Ce sac d’or lui est destiné.
    – Mais alors… observa Brancaillon, candide.
    Jean sans Peur reprit :
    – Si l’homme prend le sac, il ne descendra pas ici, et alors vous n’avez rien à faire. Mais s’il ne prend pas le sac, alors, peut-être sera-t-il obligé de descendre jusqu’à vous… et…
    – Et il ne remontera jamais, dit Bruscaille, la figure soudain terrible.
    – Je m’en charge, dit Bragaille, aspirant le massacre.
    – Je l’assomme ! rugit Brancaillon dont les yeux se firent sanglants.
    Ce qu’il y avait en eux d’instincts de meurtre se déchaînait. Ils eussent tué pour rien. Mais le sac d’or ajoutait à leur frénésie.
    – C’est bien, dit Jean sans Peur. Je vois que vous avez compris. Je veux que la chose se fasse doucement et qu’on n’entende aucun bruit ; quand ce sera fini, vous savez ce qui vous reste à faire ?
    Ils protestèrent que toute nouvelle instruction eût fait injure à leur intelligence. Ils connaissaient leur métier, ventre-pape ! Un beau sac tout neuf devait engloutir le gaillard ; à ce sac on attacherait une bonne pierre, et le tout serait, sans esclandre, confié à la Seine qui ne trahissait pas les secrets de ce genre.
    Jean sans Peur approuva d’un signe de tête amical et remonta satisfait, la conscience tranquille, car pour lui, comme pour beaucoup d’honnêtes gens, conscience et terreur avaient le même sens. Certain donc de se débarrasser promptement et sans risque du « bravo » à qui il allait demander d’assassiner le duc d’Orléans, au cas où ce bravo eût refusé, il attendit tranquillement l’arrivée du chevalier de Passavant.

XXIII – LE

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