L'Ile du jour d'avant

jamais qu’on peut chercher usant ungventum armarium  ! Si il serait possible, le inventait un jésuite. Cela n’a aucun rapport avec longitudes, moi t’expliquerai comment bien je fais mon travail et toi tu vois comment il est différent…
    — Mais en somme, demanda Roberto, vous cherchiez les Îles de Salomon ou vous vouliez résoudre le mystère des longitudes ?
    — Mais les deux choses, non ? Tu trouves les Îles de Salomon et tu as connu où est le cent quatre-vingtième méridien, tu trouves le cent quatre-vingtième méridien et tu sais où les Îles Salomon sont !
    — Mais pourquoi ces îles doivent être sur ce méridien ?
    — Oh mein Gott, le Seigneur me pardonne pour ce que Son Très Saint Nom en vain j’ai prononcé. In primis, après que Salomon le Temple construit avait, il avait fait une grosse flotte, comme dit le Livre des Rois, et cette flotte arrive à l’île d’Ophir, d’où on lui rapporte (comment dis-toi ?)… quadringenti und viginti…
    — Quatre cent vingt.
    — Quatre cent vingt talents d’or, une beaucoup grosse richesse : la Bible dit beaucoup peu pour dire tant et tant, comme dire pars pro toto. Et aucune lande près d’Israël avait une aussi tant grosse richesse, quod significat que cette flotte aux derniers confins du monde était arrivée. Ici.
    — Mais pourquoi ici ?
    — Parce qu’ici est le méridien cent et quatre-vingts qui est exactement celui qui la Terre en deux sépare, et de l’autre part est le premier méridien : tu comptes un, deux, trois, pendant trois cent soixante degrés de méridien, et si tu es à cent quatre-vingts, ici c’est minuit et dans ce premier méridien, c’est midi. Verstanden ? Tu devines maintenant pourquoi les Îles de Salomon ont été ainsi appelées ? Salomon dixit coupe bambino en deux, Salomon dixit coupe la Terre en deux.
    — J’ai compris, si nous sommes sur le cent quatre-vingtième méridien, nous sommes aux Îles de Salomon. Mais qui vous dit que nous sommes sur le cent quatre-vingtième méridien ?
    — Mais la Spécula Melitensis, non ? Si toutes mes preuves précédentes ne suffiraient, que le cent quatre-vingtième méridien passe précisément là, me l’a démontré la Spécula. » Il avait entraîné Roberto sur le tillac en lui montrant la baie : « Tu vois ce promontorium au nord là où grosses arbres sont avec grosses pattes qui marchent sur l’eau ? Et or tu vois l’autre promontorium au sud ? Toi trace une ligne entre les deux promontoria, vois que la ligne passe entre ici et le rivage, un peu plus apud le rivage que non apud le navire… Vue la ligne, je dis une geistige ligne que tu vois avec les yeux de l’imaginatione ? Gut, cette ligne est la ligne du méridien !

    Le jour suivant le père Caspar, qui n’avait jamais perdu le compte du temps, avertit que c’était dimanche. Il célébra la messe dans sa cabine, consacrant une particule des rares hosties qui lui étaient restées. Il reprit ensuite sa leçon, d’abord dans sa chambre entre mappemonde et cartes, puis sur le tillac. Et aux observations de Roberto, qui ne pouvait pas supporter la pleine lumière, il avait sorti d’une de ses armoires des lunettes, mais avec les verres fumés, qu’il avait utilisées avec succès pour explorer la bouche d’un volcan. Roberto avait commencé à voir le monde dans des couleurs plus faibles, au fond très agréables, et il se réconciliait peu à peu avec les diurnes rigueurs.

    Pour comprendre ce qui suit, je dois faire une glose, et si je ne la fais pas, moi aussi je m’y perds. La conviction du père Caspar était que la Daphne se trouvait entre le seizième et le dix-septième degré de latitude sud et à cent quatre-vingts de longitude. Quant à la latitude, nous pouvons lui accorder tout crédit. Mais allons jusqu’à imaginer qu’il avait mis dans le mille pour la longitude aussi. D’après les notes confuses de Roberto, on présume que le père Caspar calcule pour trois cent soixante degrés tout ronds à partir de l’île du Fer, à dix-huit degrés à l’ouest de Greenwich, comme voulait la tradition depuis les temps de Ptolémée. Donc, si lui pensait être à son cent quatre-vingtième méridien, cela signifie en réalité qu’il était au cent soixante-deuxième est (de Greenwich). Or les Salomon se trouvent bien disposées autour du cent soixante-deuxième méridien est, mais entre les cinq et les douze degrés de latitude sud. Donc la Daphne se