L'Iliade et l'Odyssée
Troyens ! cria-t-il à ses
compagnons. Enfoncez le mur et mettez le feu aux
vaisseaux. »
Tous les Troyens l’entendirent et se jetèrent
sur le mur. Mais Hector fit plus encore. Près de la porte, il
saisit une énorme pierre, large à la base et pointue au sommet.
Deux hommes n’auraient pu aisément la charger sur un char. Mais
Zeus la lui rendit légère. Il la lança contre les vantaux de la
porte que verrouillaient deux barres.
Les vantaux volèrent en éclats, les gonds
sautèrent et la porte s’abattit dans un fracas épouvantable.
Hector bondit dans le camp, son visage pareil
à la nuit. Son corps brillait de l’éclat du bronze, et il tenait
deux lances à la main. Seul un dieu eût pu l’affronter, quand il
pénétra dans le camp, criant aux Troyens de le suivre. Aussitôt les
uns escaladèrent le mur, les autres franchirent la porte. Les Grecs
s’enfuirent parmi les vaisseaux, et un tumulte sans fin
s’éleva.
À ce moment, Nestor, quittant sa baraque,
rencontra les rois blessés, Diomède, Ulysse et Agamemnon, qui
revenaient de leurs vaisseaux, fort loin de la bataille. Car le
rivage, tout vaste qu’il était d’un cap à l’autre cap, n’avait pu
contenir tous les vaisseaux : aussi, les avait-on tirés sur
plusieurs lignes. Ainsi donc les rois, désireux de voir la
bataille, avançaient ensemble, s’appuyant sur leur lance, l’âme
affligée au fond de leur poitrine.
En voyant le mur écroulé et les Troyens à
l’intérieur du camp, Agamemnon fut découragé. « Tirons à l’eau
les vaisseaux qui sont le plus près de la mer, puis mouillons-les
au large, dit-il. Ensuite nous pourrons, de nuit, tirer à l’eau les
autres vaisseaux. »
« Insensé, lui répondit Ulysse, tais-toi
de peur qu’un Grec n’entende ces paroles, et alors tout sera
réellement perdu. C’est une armée de lâches que tu devrais
conduire, si tel est ton projet. »
« Tes paroles sont dures, Ulysse, mais
c’est toi qui as raison, reconnut Agamemnon. Je ne donnerai pas
l’ordre aux Grecs de tirer les vaisseaux à la mer. Mais si
quelqu’un a un avis meilleur, écoutons-le. »
« Il faut marcher au combat, dit le brave
Diomède. Nous nous tiendrons à l’écart, étant blessés, mais nous
pourrons encourager les autres. »
Ils partirent donc, et, en chemin, ils
rencontrèrent Poséidon, sous les traits d’un vieillard. Le dieu
adressa à Agamemnon des paroles de réconfort et redonna courage aux
Grecs. Ceux-ci repoussèrent les Troyens jusqu’au moment où Zeus
envoya Apollon pour jeter la panique parmi les Grecs.
Tandis que les Grecs étaient, une fois de
plus, acculés à leurs vaisseaux, Patrocle arriva, tout en larmes,
vers Achille.
« Mon cher Patrocle, dit Achille,
pourquoi pleures-tu ? On croirait voir une fillette, qui court
à côté de sa mère et s’accroche à sa robe : elle pleure et
veut qu’on la prenne. Qu’y a-t-il donc ? Aurais-tu reçu
quelque message de notre pays ? Ou est-ce sur les Grecs que tu
te lamentes ? Ils souffrent pourtant par leur propre
faute. »
« Oh ! Achille, soupira Patrocle, ne
m’en veuille pas. Trop grand est le malheur des Grecs : les
meilleurs d’entre eux sont blessés. Si ton cœur est à ce point
cruel que tu ne veux pas renoncer à ta colère, laisse-moi du moins
emmener les Myrmidons et revêtir tes propres armes, pour essayer de
sauver les Grecs. »
Ainsi implorait-il, le pauvre fou, sa propre
mort. Et le fier Achille lui répondit par ces mots :
« Sans doute as-tu raison : je ne
devrais pas toujours garder cette colère. Je pensais attendre que
la rumeur du combat arrive près de mes vaisseaux. Mais va, prends
mes armes et conduis au combat nos braves Myrmidons, puisque les
Troyens, comme un nuage sombre, assiègent nos vaisseaux et que les
Grecs sont acculés au rivage.
« Va, tombe sur eux avec ardeur. Sauve
nos vaisseaux, et procure-moi une grande gloire. Mais quand tu
auras écarté l’ennemi des vaisseaux, reviens tout de suite. Même si
Zeus t’offre de remporter la victoire, tu ne devras pas combattre
et amoindrir ma gloire. Ne va pas jusqu’aux murs de la ville, de
crainte qu’Apollon qui aime chèrement les Troyens ne se mette sur
ta route. Reviens donc, dès que tu auras sauvé les
vaisseaux. »
Or, pendant qu’Achille et Patrocle parlaient,
Ajax qui défendait son grand vaisseau, se trouvait être à bout de
forces. Son casque résonnait sous les coups, son épaule gauche se
fatiguait à porter
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