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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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elle, est morte !… morte !… et je suis une…
    – Une folle d’écouter les contes ridicules d’un insensé, s’écria Mrs Lechmere avec une précipitation qui avait pour objet d’empêcher Abigaïl de terminer sa phrase ; cette malheureuse fille est morte depuis longtemps, comme nous le savons, et nous n’avons pas besoin de raisonner à ce sujet avec un homme privé de raison.
    – Privé de raison ! s’écria Ralph avec le ton de l’ironie la plus amère ; non, non. Il y a quelqu’un qui en est privé, comme vous et moi nous le savons, mais ce n’est pas moi qui suis fou. C’est plutôt vous qui êtes folle, femme. Vous avez déjà fait perdre la raison à quelqu’un, voudriez-vous en priver encore un autre ?
    – Moi ! dit Mrs Lechmere, en fixant ses regards sans se déconcerter sur les yeux ardents du vieillard ; le Dieu qui donne la raison la retire à son gré ; ce n’est pas moi qui exerce un tel pouvoir.
    – Qu’oses-tu dire, Priscilla Lechmere ? s’écria Ralph en faisant trois pas rapides qui lui permirent de lui saisir le bras avec sa main desséchée ; oui, je t’appellerai encore Priscilla, quelque indigne que tu sois de ce nom. Tu prétends n’avoir pas le pouvoir de faire perdre la raison ? Dis-moi donc ce qu’est devenu le chef de ta race si vantée, le riche et respectable baronnet du Devonshire, autrefois l’heureux compagnon des princes, ton neveu Lionel Lincoln ? Est-il dans le château de ses pères ? protège-t-il ses vassaux ? conduit-il les armées de son roi, ou habite-t-il une cellule sombre et solitaire ? Tu sais où il est, tu le sais, femme ! et ce sont tes infâmes manœuvres qui l’y ont conduit !
    – Quel est celui qui ose me parler ainsi ? s’écria Mrs Lechmere faisant les derniers efforts pour repousser cette accusation avec mépris ; si vous connaissez véritablement mon infortuné neveu, vous pouvez juger vous-même de la fausseté de cette indigne inculpation.
    – Si je le connais ! Demande-moi plutôt ce que je ne connais pas. J’ai eu les yeux ouverts sur toi, femme ; j’ai suivi toute ta conduite, et tout ce que tu as fait m’est connu. Et quant à cette autre pécheresse, je sais aussi tout ce qu’elle a fait. Parle, Abigaïl Pray ; ne t’ai-je pas rendu compte de tous tes crimes les plus secrets ?
    – Oui ! oui ! s’écria Abigaïl avec une terreur superstitieuse ; il n’est que trop vrai qu’il sait ce que je croyais n’avoir été vu que par l’œil de Dieu.
    – Je te connais de même, misérable veuve de John Lechmere, je connais aussi Priscilla. Ne connais-je donc pas tout ?
    – Oui, tout ! s’écria encore Abigaïl.
    – Tout ! répéta Mrs Lechmere d’une voix presque éteinte ; et au même instant elle tomba sans connaissance sur sa chaise.
    Le vif intérêt qu’il prenait à cette scène ne put empêcher Lionel de courir au secours de sa tante ; mais Abigaïl Pray, qui paraissait habituée jusqu’à un certain point aux discours énergiques de Ralph, l’avait, déjà prévenu, et, lorsqu’il entra dans la chambre, il vit qu’elle donnait déjà à Mrs Lechmere les secours ordinaires en pareil cas. Comme elle respirait péniblement, il devint nécessaire de la délacer, et Abigaïl, assurant à Lionel qu’elle n’avait besoin de l’aide de personne, le pria de se retirer, parce qu’elle était certaine que sa présence inattendue pourrait être fatale à sa tante quand elle reprendrait connaissance.
    Lionel sortit de la chambre, et vit Ralph au haut de l’escalier en échelle. Il le suivit sur-le-champ, dans l’intention de lui demander l’explication de ce qu’il venait de voir et d’entendre. Il trouva le vieillard assis dans une petite chambre, une main appuyée sur son front de manière à préserver ses yeux de la faible lumière d’une misérable chandelle, et paraissant enfoncé dans de profondes réflexions. Lionel s’approcha de lui sans paraître attirer son attention, et fut obligé de parler pour lui annoncer sa présence.
    – Job m’a dit que vous désiriez me voir, lui dit-il, et me voici.
    – C’est bien, répondit Ralph.
    – Peut-être devrais-je ajouter que j’ai été le témoin fort surpris de votre entrevue avec Mrs Lechmere, et que j’ai entendu les discours hardis et inconcevables que vous avez cru devoir adresser à cette dame.
    Le vieillard leva la tête, et Lionel vit redoubler l’éclat de ses yeux.
    – En ce cas, dit-il,

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