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Londres, 1200

Londres, 1200

Titel: Londres, 1200 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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grand malheur et la plus grande douleur que vous puissiez
jamais avoir.
    Celui qui était le chef et le père, le puissant
et le vaillant roi des Anglais, Richard est mort.
    Hélas ! Mon Dieu, quel deuil et quelle
perte ! Quelle nouvelle pénible à entendre ! Il a le cœur bien dur
l’homme qui peut la supporter. Le roi est mort, et mille ans se sont passés
sans qu’il mourût un homme dont la perte fût aussi grande.
    Jamais il n’a eu son pareil !
    Jamais personne ne fut aussi loyal, aussi
preux, aussi hardi, aussi généreux ! Alexandre, ce roi qui vainquit
Darius, ne donna jamais davantage.
    Je ne crois pas que Charlemagne ni Arthur le
valussent.
    Pour dire la vérité, il se fit, partout,
redouter des uns et chérir des autres. Voilà qui m’étonne bien, c’est qu’en ce
monde si pervers ne puisse subsister un homme libéral et courtois !
    La mort vient de nous montrer ce qu’elle peut
faire de pis en nous enlevant d’un seul coup tout le mérite, toute la gloire,
tout l’esprit, toute la joie de ce siècle.
    Hélas ! Vaillant seigneur, que deviendront
désormais les belles passes d’armes et les grands tournois à l’épaisse mêlée,
et les brillantes cours, et les belles et grandes largesses, maintenant que
vous n’êtes plus là, vous qui en étiez le chef et la source ?
    Que deviendront, abandonnés au malheur, ceux
qui s’étaient mis à votre service, et qui attendaient que la récompense
arrivât ?
    Que deviendront, réduits à se donner la mort,
ceux que vous aviez fait parvenir au faîte de la richesse ? Ils traîneront
dans de longs ennuis une pénible existence.
     
    Les dernières strophes furent prononcées avec une
extrême affliction, assortie de sons si mélancoliques et lancinants qu’ils
ressemblaient à des pleurs, aussi, quand il eut terminé, le silence tomba dans
la salle. Nombreux étaient les chevaliers, pourtant tous plus cruels et féroces
les uns que les autres, qui essuyaient des larmes.
    Une nouvelle fois, Guilhem salua avant d’annoncer
la plus connue et la plus talentueuse des ménestrelles de France.
    Anna Maria entra, joyeuse et souriante, pinçant
les cordes de sa petite harpe, et commença aussitôt une vieille ballade
anglaise apprise à Huntington et que tout le monde connaissait dans
l’assistance :
     
    — Je
te donnerai, bonhomme, une année ou deux
    Pour
chercher à travers l’Europe, depuis l’Espagne jusqu’à Byzance,
    Et tu
ne trouveras jamais, quelque étendue que soit la revue,
    Un
homme aussi heureux que le carme déchaussé.
    Le
monarque, bah ! le prince a été connu
    Pour
avoir changé sa robe contre le froc et le capuchon ;
    Mais
lequel d’entre nous a jamais eu le vain désir
    De
troquer contre une couronne le capuchon gris du carme déchaussé.
     
    Pendant qu’elle chantait ainsi, la chanson ayant
plusieurs couplets, Bartolomeo jonglait avec les gobelets et lorsqu’elle parla
du capuchon gris du carme déchaussé, refrain de la ballade, il le fit
répéter en chœur par toute l’assistance.
    Guilhem franchit la tenture et vit qu’il n’y avait
plus aucun garde. Tous étaient de l’autre côté pour voir et entendre Anna
Maria.
    Il attendit un instant, observant le banquet en
écartant une tenture. On servait le chevreau et toutes sortes de rôts. Le vin
avait déjà embué bien des esprits.
    Anna Maria salua et remercia son public avant de
commencer une nouvelle ballade dont Bartolomeo devait mimer grotesquement les
personnages.
    Tandis que s’élevait la voix cristalline de la comtesse
de Huntington, Guilhem s’éclipsa, sachant qu’elle et son frère parviendraient à
retenir l’attention des hommes d’armes pendant un moment. En s’éloignant, il
entendit :
     
    — La
garde d’une fille est chose mal aisée,
    Instruisez-la,
vous la rendrez rusée.
    Sans
peine à vous tromper, elle réussira.
    Rendez-la
sotte, hélas ! Simple sans artifice,
    Par
ignorance, elle fera
    Ce
que fait l’autre par malice…
     
    Il se précipita dans l’escalier qu’il descendit
quatre à quatre, évitant quand même de faire du bruit, car il ignorait si des
hommes se trouvaient en bas.
    Il déboucha dans une salle identique à la salle
des gardes, mais encore plus sombre, car à peine éclairée par une lanterne à
huile. Elle était meublée d’un grand lit fermé et de coffres massifs.
    L’obscurité n’embarrassait pas Guilhem, car, grâce
aux indications de Furnais, il se repérait parfaitement. Il distingua la

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