Londres, 1200
rançon. La somme que vous voudrez…
— Où est le testament ? lui demanda
Guilhem sans répondre.
— Dans mon coffre… dans la cale.
Il perdit connaissance et s’écroula.
Les prisonniers, ainsi que deux soldats blessés,
mais encore valides, avaient transporté des pierres de la rive jusqu’au bateau,
tandis que Jehan et Cédric avaient brisé le bordage à coups de hache. Ayant
ainsi construit un passage, ils avaient fait descendre les deux chevaux
restant : deux magnifiques palefrois.
Tandis que Robert de Locksley et Furnais
transportaient Dinant, Guilhem retourna sur le pont où le pilote attendait les
ordres.
— Pouvez-vous faire remonter la nef jusqu’à
la Deptford et la camoufler ? lui demanda Guilhem.
— Oui, seigneur. Je la ferai tirer par les
prisonniers, puis je les mettrai à la rame.
— Faites-le. Essayez de la conduire jusqu’à
la crique où vous aviez mis votre barque. Sous les saules, elle sera invisible
de la rivière. Pendant ce temps nous avons un homme à interroger et à juger.
Ensuite, on enfermera les prisonniers dans la cale et vous rentrerez à Londres.
Il alla à l’écoutille de la cale arrière, l’ouvrit
et descendit dans la petite cabine. Il y avait quelques armes, des vêtements et
plusieurs coffres. L’un d’eux, en bois, était peint d’une tour crénelée. Il le
brisa à coups d’épée et en vida le contenu. C’étaient de riches vêtements et
des bijoux, ainsi qu’un coffret dont le sceau brisé représentait un cavalier
tenant une épée et un écu sur lequel on reconnaissait trois lions.
Guilhem l’ouvrit et déplia le parchemin se
trouvant à l’intérieur. Il était écrit en latin, mais il en savait assez pour
être certain qu’il avait trouvé le testament.
Il le glissa dans la sacoche, sous sa cotte, où se
trouvait le sauf-conduit du roi de France, puis il rassembla les bijoux dans
une pièce d’étoffe, fit un nœud et remonta. Les prisonniers étaient déjà
encordés pour tirer la nef.
Dinant avait été étendu sur la rive, inconscient.
Guilhem s’approcha de Locksley.
— Mauluc n’était pas à bord, lui dit le Saxon
en grimaçant.
Guilhem regarda Dinant, inanimé.
— Et lui ?
— Il passera sous peu.
— Transportons-le jusqu’à nos chevaux.
Les montures et les bagages attendaient près de
l’embouchure de la Deptford ainsi qu’Anna Maria.
Dans ses bagages, Anna Maria avait toujours une
flasque d’aqua ardens, un élixir de longue vie distillé dans un
monastère italien par les Jésuates, des religieux nommés aussi padri
dell’acquavita. C’était une distillation de vin mélangée à des herbes que
l’on utilisait pour soigner les graves maladies.
Elle en fit avaler plusieurs gorgées à Dinant. Au
bout d’un instant, ses joues redevinrent roses et il reprit conscience.
— Suis-je mort ? murmura-t-il.
— Pas encore. Mais si vous nous répondez franchement,
nous vous conduirons peut-être auprès d’un prêtre pour éviter de partir avec
une âme trop sale.
Dinant cligna des yeux, pour faire signe qu’il
acceptait.
— Pourquoi Mauluc a-t-il tué Mathilde ?
Avant de commencer, Dinant inspira longuement, provoquant
un long sifflement dans ses poumons.
— Mon roi voulait que j’écarte Mercadier qui
le gênait… Les fêtes de Bordeaux étaient une occasion inespérée. J’ai fait
voler sa dague… Je voulais tuer la femme du sénéchal et le faire accuser du
crime. Puis dame Aliénor m’apprit votre présence… Elle voulait vous empêcher
d’aller en Angleterre, Ussel…
— Pourquoi ? Comment savait-elle que j’y
allais ?
— Elle m’a juste dit que vous étiez au
service du roi de France… Que vous pouviez nuire à son fils.
Pendant que Dinant se confessait, Guilhem et
Locksley ne le quittaient pas des yeux. S’ils avaient observé Ranulphe, ils
auraient vu combien l’écuyer était pâle. Il suffisait d’un mot de Dinant pour
que son maître découvre qu’il était vraiment un félon.
— J’ai dit à Mauluc d’aller plutôt tuer votre
femme, Locksley. La duchesse vous aimait et aurait châtié Mercadier, quand on
aurait retrouvé sa dague, et vous ne seriez pas partis.
— Mais Mauluc a tué Mathilde…
— Oui, il s’est trompé, et vous avez reconnu
la dague… Vous avez tué Mercadier… Je ne l’avais pas prévu, mais c’était
satisfaisant pour moi. J’avais fait ce que mon roi m’avait demandé…
Il parut à nouveau perdre
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