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L'Orient à feu et à sang

L'Orient à feu et à sang

Titel: L'Orient à feu et à sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harry Sidebottom
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Il n’en parlait jamais, mais laissait croire qu’il était né esclave.
    Le quartier du théâtre dans la vieille ville de Délos était un dédale de ruelles étroites et tortueuses surplombées par les murs penchés de maisons délabrées. La lumière du soleil peinait à y pénétrer, lorsqu’elle y parvenait. Maintenant que le soleil se couchait au-dessus de l’île de Rhénée, l’obscurité était presque totale. Les frumentarii n’avaient pas songé à apporter une torche ou à louer les services d’un porteur de torche.
    — Merde ! s’exclama l’Espagnol.
    — Qu’y a-t-il ?
    — Il y a que je viens juste de marcher sur un gros tas de merde !
    Les compères remarquèrent alors à quel point la ruelle puait.
    — Voilà une indication pour guider le marin à bon port.
    Sculpté à hauteur d’œil, on distinguait un grand phallus, au gland orné d’un visage souriant. Les espions empruntèrent la direction indiquée, l’Espagnol s’arrêtant de temps à autre pour racler sa sandale.
    Après avoir parcouru une petite distance, ils arrivèrent devant une porte flanquée de deux phallus sculptés. La grosse brute faisant office de portier les fit entrer et une vieille mégère d’une laideur inimaginable les escorta jusqu’à un banc devant une table. Elle leur demanda de payer d’avance, puis leur apporta leur boisson : deux volumes de vin pour cinq d’eau. Les seuls autres clients étaient deux vieux du coin, en grande conversation.
    — Parfait. Le comble de la foutue perfection, dit l’espion originaire de Subura.
    L’odeur qui régnait à l’intérieur était peut-être pire que celle du dehors. Les vapeurs de vin éventé et la vieille sueur s’alliaient à l’odeur dominante d’humidité et de pourriture, de pisse et de merde.
    — Comment se fait-il que vous autres soyez des scribes bien payés et respectés au service du Dux, alors qu’un Romain de souche, un fils de Romulus comme moi, doit jouer le rôle d’un simple messager ?
    — Est-ce notre faute si tu écris si mal ? rétorqua l’Espagnol.
    — Va chier, Sertorius. (Le surnom dont il l’avait affublé se référait au célèbre rebelle romain qui avait vécu en Espagne.) Rome n’est rien de plus qu’une belle-mère pour toi et l’Hannibal de pacotille qui t’accompagne.
    — Chest vrai que cha doit être merveilleux d’être né dans la foche d’aisance de Romulus, dit le Nord-Africain.
    Ils cessèrent de se chamailler lorsqu’une vieille prostituée s’approcha pour servir le vin coupé d’eau. Elle était outrageusement maquillée, portait une tunique très courte et un bracelet d’où pendait une série d’amulettes : un phallus, la massue d’Héraclès, une hache, un marteau et l’effigie tricéphale de Hécate [21] .
    — Si elle a besoin de tout ça pour se protéger du mauvais œil et de la jalousie, imaginez un peu à quoi doivent ressembler les autres !
    Ils burent.
    — Une autre trirème impériale a mouillé dans le port, dit l’Espagnol. Elle amène à Rome un procureur de l’empire de la province de Lycie. Le Dux avait peut-être prévu de le rencontrer ?
    — Sauf qu’il n’est pas encore venu le voir, répondit celui qui était si fier d’être né dans la ville de Rome.
    — C’est d’autant plus louche.
    — Conneries ! Notre barbare de Dux est venu ici parce qu’il a su qu’il y avait un arrivage d’esclaves perses à vendre et qu’il voulait se payer une autre paire de fesses ; un Perse avec un joli cul rond comme une pêche pour remplacer le petit Grec qui doit être éreinté.
    — J’ai parlé à Demetrius, l’ accenchus. Il pense que tout chela est l’affirmation d’une politique. Apparemment, il y a très longtemps, les Grecs se sont servis de ce misérable îlot comme d’un quartier général pour mener leur guerre de religion contre les Perses. Et que faisons-nous d’autre que défendre la civilisation contre une nouvelle bande de Perses ? On dirait que notre Barbare de Dux se veut le porte-étendard de la civilisation.
    Les deux autres, pourtant dubitatifs, hochèrent la tête.
    La porte s’ouvrit et trois autres clients entrèrent. Comme tout membre de la suite se devait de le faire, les trois frumentarii se levèrent pour saluer Mamurra, le prœfectus fabrum. Ils s’adressèrent aussi au garde du corps Maximus et au valet Calgacus. Les nouveaux arrivants leur retournèrent leur salut et allèrent s’asseoir à une autre table. Les

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