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L'Orient à feu et à sang

L'Orient à feu et à sang

Titel: L'Orient à feu et à sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harry Sidebottom
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veillerait sur ses arrières et quelqu’un qui lui enseignerait le celte.
    Maximus, à la différence d’autres esclaves, n’était pas obsédé par l’idée de reconquérir sa liberté. Les Romains recouraient à la manumission avec une libéralité peu commune – mais uniquement parce que l’affranchissement de nombreux esclaves était la carotte faisant pendant au bâton de la crucifixion, les empêchant de commettre un acte désespéré, de s’enfuir en masse ou de se soulever. Au niveau individuel, c’était un moyen pour l’élite romaine de montrer sa magnanimité. De plus, affranchir beaucoup d’esclaves permettait d’alimenter la demande pour de nouveaux esclaves. Pour Maximus, la liberté était restreinte par tout un réseau d’expectatives et d’obligations. Il ne se souciait guère d’avoir un toit au-dessus de sa tête et se fichait que ce toit lui appartînt ou non. Il voulait avoir le ventre plein, de boisson comme de nourriture ; il voulait un cortège de filles consentantes, même si parfois la réticence avait son charme, et il aimait à se battre. La violence lui seyait et il se savait taillé pour elle. S’il était resté au pays et avait réussi à rester en vie, il aurait accédé à ces choses au sein de la suite d’un roitelet hibernien [27] . Ici, au service de Ballista, il en disposait à sa guise, avec du vin en plus de la bière et un plus large choix de femmes. Et puis, il n’était pas question de liberté avant d’avoir payé sa dette envers Ballista. Il se repassait souvent la scène dans son esprit : les clous de ses godillots glissant sur le sol de marbre (jamais plus il n’en porterait), son épée lui échappant dans sa chute (toujours garnir le pommeau d’une dragonne de cuir), le visage féroce à la peau foncée, le bras tenant le glaive s’élevant pour le coup de grâce, et enfin, le coup d’épée de Ballista qui avait sectionné ce bras.
    Lorsqu’il était jeune, alors même qu’il n’avait jamais voyagé, son caquetage incessant lui avait valu le nom de Muirtagh de la Longue Route. Aujourd’hui, ce nom était conforme à la réalité ; seul Ballista l’appelait ainsi et encore, seulement à l’occasion.
    Il était bien assez heureux là où il se trouvait. Bien sûr, il aimerait revenir au pays un beau jour, mais seulement une fois et pas pour longtemps – juste le temps qu’il faudrait pour tuer les hommes qui l’avaient capturé, violer leurs femmes et brûler leurs maisons.
    Le voyage du Concordia suivait son cours de la plus fluide des manières, tel l’eau s’échappant d’une clepsydre là-bas, à la cour impériale. Un chaud soleil d’octobre et une douce brise les avaient accompagnés pendant les deux jours qu’ils avaient mis à rallier Cnide [28] depuis Délos. Ils avaient d’abord mis le cap à l’est, sur l’île d’Ikaria [29] , puis au sud-est, le long de l’archipel des Sporades, avant de filer entre les puritains de l’île de Cos et les décadents des côtes d’Asie Mineure et d’arriver enfin à Cnide sur la péninsule. Ils s’y étaient arrêté une journée, le temps de faire de l’eau et d’aller voir les cuisses tachées de sperme de l’Aphrodite de Cnide [30] .
    Le matin où ils appareillèrent, une brume de mer était apparue. Le capitaine expliqua que le brouillard n’était pas rare dans les eaux du sud de la mer Égée – même s’il n’était pas habituellement aussi épais – et que pendant au moins six mois de l’année, le temps y était brumeux. Avec une visibilité réduite à moins de deux milles, le Concordia fit route le long de la côte sud de Cnide jusqu’au cap Onougnathos avant de filer au sud-est vers la côte nord de l’île de Symi. Un navire marchand à l’ancre leur indiquait la proximité de Symi. Le Concordia le dépassa, s’apprêtant à mettre le cap sur Rhodes.
    — Deux voiles. Droit devant. Des pirates. Des Goths !
    Il y eut du remue-ménage sur le pont du Concordia avant que le capitaine, dans un rugissement, demandât le silence. Le brouhaha s’apaisa et il ordonna à tout le monde de s’asseoir. Ballista l’accompagna jusqu’à la proue.
    Ils étaient là, émergeant de la brume à deux milles devant eux. La forme des vaisseaux ne laissait aucun doute : les deux extrémités recourbées si caractéristiques, l’avant comme l’arrière semblant dessiner une proue. Un mât central, un aviron de gouverne à tribord et, pendus à chaque bord, de

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