L'Orient à feu et à sang
civils dont tu auras besoin, charpentiers, forgerons, etc. Choisis les légionnaires toi-même. Ne laisse pas Acilius Glabrio te refiler les pires.
Le visage de Mamurra se fendit d’un sourire.
Tandis que Ballista s’éloignait, Maximus lui dit en celte, à voix basse :
— Si ton jeune patricien ne te détestait pas encore, c’est maintenant chose faite.
Les telones, en les voyant descendre la rue principale, surent que l’heure n’était pas au divertissement. Pas non plus au laxisme, encore moins à l’extorsion. Le boukolos entreprit immédiatement de chasser une famille de nomades et leurs ânes qui bloquaient le passage, poussant brutalement hommes et bêtes, leur reprochant de traînasser et les maudissant grossièrement. Avertis par un gamin des rues qui leur servait de garçon de course, les dix légionnaires du contubernium mirent précipitamment fin à leur partie de dés et sortirent de la salle de garde en catastrophe. Rajustant leur équipement, ils se mirent au garde-à-vous.
Le Dux Ripæ tira doucement sur les rênes de son cheval. Il leva la main et sa suite de quatre hommes s’arrêta derrière lui.
Les douaniers observèrent le Barbare tandis qu’il regardait par-delà la porte de la Palmyrène. Dieu qu’il était énorme, énorme et féroce, comme tous ceux de sa race !
— Bonjour, telones, dit le Barbare avec affabilité.
Il répéta son aimable salut à l’attention des légionnaires, puis fit signe à ses hommes d’avancer avant de sortir de la ville.
— Une sinistre brute, pas vrai ?
Le telones hocha la tête.
— Vraiment patibulaire. Je me garderais bien de le contrarier. Un caractère de sauvage avec ça – comme tous ceux de sa race.
À environ un demi-mille des portes de la ville, à l’endroit où la nécropole finissait, Ballista arrêta Cheval Pâle. Il observait les tombes en forme de tours. Il devait y en avoir au moins cinq cents. Excepté à Palmyre, il n’avait jamais rien vu de pareil. Chacune reposait sur un socle comportant des marches, de la taille d’un homme ou même plus grand. Ce socle était surmonté d’un premier étage, de deux ou trois fois sa hauteur, décoré de colonnes en relief. Deux, parfois trois autres étages ressemblant à des maisons à toits plats et dont les dimensions allaient s’amenuisant, surplombaient le tout.
Les morts étaient placés dans des niches ornant les murs intérieurs, avec tous les objets précieux qu’ils emporteraient dans l’autre monde. Les parents en deuil entraient par l’unique porte et gravissaient un escalier intérieur jusqu’au toit où ils partageaient un repas funéraire. Le scellement des niches et la garde des tombes incombaient aux pompes funèbres.
« Leur construction a dû prendre des générations », pensa Ballista, « et nous avons trois mois pour les abattre. » Laissées en l’état, elles protégeraient les assaillants des projectiles lancés depuis les remparts, serviraient de postes d’observation, seraient converties en tours d’artillerie ou détruites par les Perses afin de fournir des matériaux pour les travaux de siège. Les citoyens d’Arété n’aimeraient pas cela, mais le lieu de repos éternel de leurs ancêtres allait devoir être rasé.
— Demetrius !
Ballista s’aperçut que son secrétaire avait déjà son stylet en main.
— Nous allons avoir besoin de grues équipées de boulets de démolition. Et il nous faut penser au charriage : beaucoup de chars à bœufs pour les gros débris et des ânes pour les gravats. (Il marqua une pause pour laisser le temps à son secrétaire de tout inscrire.) Et beaucoup de main-d’œuvre. Le nombre d’esclaves en ville est évalué à dix mille. Nous réquisitionnerons tous les hommes valides – nous devrions en avoir deux mille cinq cents. Ensuite, nous enrôlerons les citoyens et emploierons les troupes – c’est un dur labeur, mais les soldats aiment démolir. Dans les zones où personne ne travaille, les balistaires pourront se servir des tombes comme cibles d’entraînement. (Ballista perçut une certaine hésitation de la part de son secrétaire.) Oh, et bien sûr, nous laisserons les familles retirer leurs chers disparus au préalable.
Ballista caressait les oreilles de Cheval Pâle.
— N’oublie pas d’inscrire une note sur la sécurité aux portes de la ville. Les poternes du sud et du nord doivent être fermées, à moins que je ne donne l’ordre de les ouvrir. La garde à la
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