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Ma mère la terre - Mon père le ciel

Ma mère la terre - Mon père le ciel

Titel: Ma mère la terre - Mon père le ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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fâché si elle rentrait tard, mais la botte d'herbe qu'elle avait récoltée valait bien une gronderie.
    Cette botte était lourde, mais Chagak était forte. Elle pensa aux tissages qu'elle devait faire — de nouveaux rideaux pour la pièce qu'elle et Traqueur de Phoques partageraient bientôt — et elle se mit à chantonner.
    Il faisait une journée exceptionnelle avec un ciel bleu sans nuage et un soleil brillant. Les collines étaient recouvertes de plantes : canne-berges, rhodioles odorantes aux feuilles pâles, fougères à feuilles dentelées, bruyères roses à longues tiges.
    Chagak s'arrêta et changea son sac de baies d'un bras à l'autre. Elle n'était plus loin de son village. Déjà elle sentait l'air salé qui soufflait de la mer avec un arôme de poissons et d'animaux de la mer.
    Puis elle vit un buisson d'airelles, ces petites baies noires brillantes à moitié cachées par la bruyère, et s'arrêta pour en cueillir. En posant son sac par terre elle fit glisser sa botte d'herbes de son épaule, frotta les muscles de son bras endolori à force de tenir le sac à l'écart de son suk, et elle mangea lentement quelques baies, savourant ses dernières minutes de solitude avant de retourner au sein de sa famille dans le bruyant ulaq. Il était agréable parfois d'être seule, d'avoir le temps de penser et de faire des plans, de vivre dans un rêve.
    Elle redressa encore son dos pour l'assouplir et jeta sa botte d'herbes sur son dos, mais, quand elle se baissa pour ramasser son sac de baies, elle entendit un cri, presque un hurlement, qui semblait venir de la plage.
    Chagak saisit son amulette et abandonna à la fois l'herbe et les baies pour se mettre à courir en direction du village. Quelqu'un était mort, elle en était sûre. Peut-être un chasseur.
    Pas son père. Pas Traqueur de Phoques, pria-t-elle.
    En s'approchant de la crête de la montagne, une lueur éclaira le bleu et le pourpre du ciel et elle s'arrêta au sommet de la colline, abasourdie par ce qu'elle voyait.
    Un ulaq était en feu, le toit en herbe flambait. Des hommes couraient d'un ulaq à l'autre, des hommes au corps trapu, avec de longs cheveux. Leurs parkas ne ressemblaient pas aux familières peaux de cormoran noires mais étaient constitués par un mélange de marron et de blanc comme s'ils étaient confectionnés à partir de peaux de différents rongeurs rassemblées n'importe comment.
    Ces hommes tenaient des torches et mettaient le feu aux toits de chaume avant de les lancer à l'intérieur des ulas.
    La peur paralysa les pieds de Chagak et serra à ce point sa gorge qu'elle ne put crier.
    Deux hommes tenant chacun deux grandes outres d'huile en versèrent le contenu sur l'ulaq de son père et jetèrent une torche à l'intérieur par le trou du toit. Des flammes jaillirent, embrasant la bruyère et le chaume. Même à travers le crépitement du feu, Chagak crut entendre les cris de sa mère.
    Le frère aîné de Chagak surgit du trou, en haut du toit. Tenant le harpon de son père à la main, il renversa un des hommes, mais l'autre l'attrapa par la taille et le poussa par-dessus l'ulaq.
    En se relevant le premier homme se jeta dans l'ulaq et quand il en sortit il brandissait une lance ensanglantée. Chagak combattit une envie de vomir.
    Sa mère apparut ensuite, tenant dans ses bras
    Pup, son petit frère né au printemps dernier. La malheureuse essaya de courir entre les hommes mais ils la saisirent. L'un d'eux voulut lui arracher le bébé mais elle le lança sur le côté, tandis que l'autre coupait le cordon à la taille retenant le tablier couvrant ses genoux.
    Au même moment, la jeune sœur de Chagak émergea de l'ulaq. Échappant aux hommes, sa mère se précipita vers la fillette et la prit dans ses bras. Elles restèrent debout, silhouettes sombres devant le toit en flammes, se tenant dans les bras l'une de l'autre tandis que les hommes s'approchaient avec leurs lances. L'un d'eux leva son arme en direction du visage de l'enfant et Chagak se couvrit la bouche des deux mains, avalant l'air à grosses goulées pour s'empêcher de hurler.
    En voyant le second homme approcher, la mère de Chagak se glissa devant sa fille. L'homme tira un couteau de son étui fixé à sa taille et frappa la femme sur la poitrine avant de s'avancer vers la fillette.
    — Aka, supplia Chagak, Aka, non. Aka, s'il te plaît !
    Malgré ses blessures, d'un mouvement rapide, la mère de Chagak attira sa fille dans ses bras et l'entraîna dans

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