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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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les autres à comprendre.
    — Nous n'avons pas beaucoup de temps, objecta Petit Couteau.
    — C'est vrai, concéda Samig. Mais il faut essayer. Trois Poissons, tu dois parler aux femmes. Exprime-toi posément. La première fois, évoque peut-être en riant tes propres peurs. Raconte-leur encore ce qui est arrivé à ton village et à ton peuple. Puis, tu dois faire la chose la plus difficile.
    Trois Poissons se redressa et coula un regard en coin à Petit Couteau.
    — Ce soir, reprit Samig pour son épouse, quand les hommes se réuniront près du feu, tu viendras me trouver. Fais semblant d'avoir peur et supplie-moi de t'emmener.
    Trois Poissons cligna ses petits yeux.
    — Ça, je peux le faire.
    — Je parlerai un moment à mon père et aux autres, poursuivit Samig. Ne viens pas avant que je ne t'aie fait signe.
    — Quel signe?
    — Je me mettrai debout pour m'étirer, puis je me rassiérai. Pendant la soirée, agis comme si tu étais triste. Garde les yeux baissés lorsque tu serviras la nourriture. Cache ton visage quand tu coudras. Fais semblant de pleurer.
    Trois Poissons éclata de rire.
    — Et moi, que dois-je faire? s'enquit Petit Couteau.
    — Parle à Premier Flocon et à Longues Dents de tes craintes au sujet d'Aka. Puis, ce soir, si tu en trouves l'occasion, et si tu te sens suffisamment fort, raconte les morts dans les ulas des Chasseurs de Baleines.
    — Je suis assez fort.
    Amgigh observait dans l'ombre de la grotte tandis que Petit Couteau et Trois Poissons quittaient Samig. Samig resta un moment dehors, les yeux sur la mer. Il avait grandi pendant son année chez les Chasseurs de Baleines, mais il n'était pas aussi grand qu'Amgigh, malgré ses épaules plus larges.
    Amgigh avait entendu Samig répéter à leur père, une fois, deux fois, trois fois qu'il fallait quitter l'île, suivre la terre à l'est, s'éloigner d'Aka.
    Loin des baleines, songeait Amgigh. Loin de toute chance que mon père et moi apprenions à chasser la baleine.
    La colère d'Amgigh était comme un morceau de lave bouillonnant dans sa poitrine. Samig revient avec une épouse et un fils déjà grand, se dit-il. Il revient en sachant chasser la baleine. Moi, je n'ai rien : ni femme, ni fils. Et voilà qu'il veut guider notre père dans ses actes.
    Alors, les paroles de Waxtal lui revinrent : Samig se moquait de Kayugh, il ne respectait pas le pouvoir de Kayugh. Samig essaierait d'être chef.
    Peut-être était-il temps de parler aux autres hommes du vrai père de Samig. Les craintes de Waxtal semblaient justifiées. Le mal qui était dans le vrai père de Samig était venu en Samig, il s'était frayé un chemin dans son esprit et lui dictait sa conduite. Sinon, pourquoi Samig, plus garçon qu'homme, chercherait-il à supplanter son père comme chef du village ?
    Une fois allumés les feux de nuit, Petit Couteau s'approcha de Samig.
    — Je n'ai pas eu à les convaincre, chuchota-t-il. Longues Dents et Premier Flocon pensent comme nous. Et Trois Poissons dit que, parmi les femmes, seule Chagak refuse de partir. Petit Canard ne répond rien. Elle est trop proche de la mort pour s'inquiéter.
    Ce soir-là, Samig fut le dernier à venir près du feu. Il s'assit face à la grotte afin de voir quand Trois Poissons serait prête. Petit Couteau s'installa à côté de lui, à l'opposé se trouvaient Oiseau Gris et Longues Dents.
    Samig avait songé à de nombreuses façons d'aborder le sujet du départ et il décida finalement de parler directement dès que serait passé le temps rituel du silence.
    Samig attendit, assis sur ses talons, mains serrées sur ses genoux. Craignant soudain que sa voix ne résonne comme celle d'un garçon, haut perchée et cassée, il agrippa son amulette. Là résidait le pouvoir de deux tribus.
    Puis, pour se donner du courage, il murmura dans l'air humide et nocturne :
    — Je suis Samig, père de Petit Couteau, appeleur de phoques, chasseur de baleines, alananasika parmi mon propre peuple. Quel autre homme possède autant?
    Samig ferma les paupières un moment, se concentrant sur les pouvoirs qui étaient siens et, quand il les rouvrit, il était prêt, sa force profonde et assurée dans sa poitrine.
    — Je veux parler.
    Il vit le regard de son père posé sur lui. Rarement un autre que Kayugh brisait le silence de l'assemblée nocturne. Mais Samig refusa de songer au pouvoir de Kayugh. Toujours, de quelque infime façon, un homme restait un enfant aux yeux de son père. Cependant

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