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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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à prendre ta vie, je le tuerai comme j'ai tué le Petit Homme sur l'île des Chasseurs de Baleines. Comme j'ai tué le Petit Homme pendant que Oiseau Gris se cachait de peur derrière moi.
    Oiseau Gris la toisa en ricanant, puis éclata de rire, puis se tut.
    Petit Couteau se leva et fit le tour du cercle jusqu'à Samig.
    — Je suis ton fils, dit-il avec calme. Si un de ces hommes veut se battre contre toi, il lui faudra aussi se battre contre moi.
    Samig regarda Kayugh dans l'espoir de lire un peu d'affection sur le visage de son père, mais les yeux de Kayugh étaient rivés sur Chagak.
    — Je pars demain, annonça Samig. Moi, mon fils et ma femme. Ce soir, nous prendrons nos affaires et resterons au-dehors.
    Il pivota vers la grotte, vit Chagak debout, les mains toujours sur les armes. Samig était un homme maintenant, il n'avait pas le droit de toucher sa mère, mais il tendit la main vers elle, la prit dans ses bras, sentit la chaleur de ses larmes sur ses joues. Il n'éprouva nulle honte.
    59
    Samig alluma un feu de bois flotté et d'os de phoque et ferma ses oreilles aux plaintes de Trois Poissons.
    — Je serais bien restée dans la grotte une nuit de plus, ronchonna-t-elle en fourrant ses cheveux noués dans le col de son suk et en tournant le dos au vent. Il fait trop froid, ici.
    — Tu voulais partir, rétorqua Samig. Nous partons. Dors, maintenant. Demain, tu dois pagayer l'ik, et seule.
    Ils avaient déjà empaqueté leurs quelques possessions. Chagak leur avait fourni trois estomacs de phoque de poisson séché et un conteneur d'huile. Longues Dents leur avait donné plusieurs peaux de phoque.
    Ils s'en iraient dès que Samig et Petit Couteau auraient pu trouver un peu de sommeil. Pour le moment, Samig assurait le guet, les yeux sur les chemins qui menaient à la grotte; Petit Couteau dormait. Les pensées de Samig étaient concentrées sur Amgigh. Pourquoi son frère en était-il venu à le haïr? Ce n'étaient pas eux qui avaient choisi lequel irait chez les Chasseurs de Baleines, lequel resterait au village pour épouser Kiin.
    Kiin, songea Samig. Kiin, morte. Ces jours passés au milieu de son peuple avaient aussi été des jours de deuil, deuil qu'il ne pouvait partager avec personne. Il n'était pas le mari de Kiin; il n'avait pas souffert de la perte qu'avait soufferte Amgigh. Mais combien de fois au cours de son séjour chez les
    Chasseurs de Baleines s'était-il imaginé racontant à Kiin des épisodes de sa vie là-bas? Les sottes manières des femmes Chasseurs de Baleines, toujours à se quereller, toujours en colère. La façon paresseuse dont elles se procuraient de l'huile : elles fourraient des bandes de graisse dans une peau de phoque retournée, poils au-dedans, puis elles laissaient la graisse fondre toute seule. Un homme, désireux de faire un bon repas de poisson et de graisse de phoque, se retrouvait les dents pleines de poils. Il voulait lui raconter que ces femmes étaient si fainéantes qu'elles pouvaient mettre jusqu'à quatre jours pour dépecer une baleine. Il voulait lui raconter les plaisanteries des Chasseurs de Baleines, leurs histoires. Désormais, il ne partagerait rien de tout cela.
    Il se rappelait combien il avait été affolé à l'idée de trouver le corps de Kiin dans les ulas détruits, mais quand Amgigh lui avait annoncé la mort de Kiin, c'était comme si les mots n'étaient que des mots en rêve, comme si Amgigh ne disait pas la vérité.
    Maintenant, il allait perdre non seulement Kiin, mais tout son peuple. Mais, se dit-il, je ne souffre pas plus que Petit Couteau ou Trois Poissons. Il leur était arrivé le même malheur.
    Samig dormit pendant que Petit Couteau veillait, il rêva, les songes s'empilant l'un au-dessus de l'autre, se cognant l'un à l'autre comme des morceaux de glace brisée au bord d'une rivière. Les rêves étaient si forts que, lorsque Petit Couteau secoua Samig pour le réveiller, il fut aussi secoué dans son rêve, comme par les secousses d'Aka; Samig s'éveilla en rage contre les esprits de la montagne, qui avaient tant pris à un peuple qui les honorait.
    — Ton père, ton père, murmura Petit Couteau.
    La première réaction de Samig fut de joie. Mais, au souvenir de la veille au soir, il s'empara de sa lance. Il était un Petit Homme. Tout Premier Homme pourrait décider de le tuer.
    Il se leva et son père s'approcha lentement, mains ouvertes.
    — Je suis un ami. Je n'ai pas de couteau.
    Samig vit la tristesse dans les

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