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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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grand-père de Samig, lui enseignera la chasse à la baleine.
    Les mots frappèrent Kiin comme un coup qui lui coupa le souffle.
    « Cela vaudra mieux », dit son esprit, mais une part d'elle-même voulait hurler sa protestation. Elle comprit à cet instant que sa joie d'être la femme d'Amgigh tenait en partie au fait qu'elle voyait Samig chaque jour, préparait sa nourriture, aidait Chagak à confectionner ses vêtements.
    « Tu appartiens à Amgigh, dit son esprit. À Amgigh. Samig est un frère. Tu appartiens à Amgigh. »
    Kiin se tourna vers Chagak et vit la tristesse dans ses yeux.
    — Combien d-d-de temps, s-s-sera-t-il parti? s'enquit-elle.
    — Tout l'été, peut-être aussi l'hiver et l'été prochains.
    — Et-et Am-Amgigh ?
    — Kayugh et lui accompagneront Samig, resteront quelques jours et reviendront chez nous. Chacun de nos fils a reçu un don. Samig apprendra à chasser la baleine. Amgigh a reçu une épouse.
    Kiin se détourna vivement, s'empressant d'ajouter de la viande sur les nattes. Quel homme choisirait une femme de préférence à un tel art ? Quel homme la voudrait plus que l'honneur de devenir chasseur de baleine? Quand Samig reviendra l'été prochain ou le suivant, ce sera pire. N'importe quel homme peut trouver une épouse, même un piètre chasseur comme son père. Mais peu apprennent à chasser la baleine. Amgigh va me haïr, pensa Kiin, si ce n'est déjà fait.
    Ce jour s'étira, interminable. Kiin resta à l'intérieur de l'ulaq sauf pour vider les paniers de nuit et aller chercher de l'eau à la source. La douleur qui avait commencé à germer dans son cœur s'étendait à ses bras et à ses jambes; elle se sentait raidie comme si elle habitait encore chez son père, les muscles douloureux après les coups.
    Elle ne revit pas les frères avant la fin du jour, quand le crépuscule de la nuit d'été fut presque sur eux. Ils entrèrent ensemble, riant et bavardant. Kiin offrit de la nourriture, d'abord à Amgigh puis à Samig ; elle obligea son courage à venir en elle, aussi fort que lorsque son père la battait, et se contraignit à plonger son regard dans celui de son mari. Si Amgigh la haïssait, elle le verrait, car qui ignore que la haine se loge toujours dans l'esprit et se montre dans les yeux ?
    Kiin observa donc, mais elle ne lut que de la colère, peut-être, ou de la tristesse, mais pas de haine.
    Soulagée, elle se tourna vers Samig, lui tendit un bol de poisson que Chagak avait cuit dehors sur sa pierre à feu et, à cet instant, leurs yeux se rencontrèrent. L'esprit de Samig appela Kiin si vite qu'elle ne put détourner le regard. Et si Samig plissait les yeux dans un sourire, Kiin ne manqua pas d'y voir le chagrin, un chagrin plus profond que celui qui aurait dû habiter ceux d'Amgigh.
    Alors, Amgigh saisit Kiin par le bras.
    — Femme, mon frère s'en va demain chez les Chasseurs de Baleines. Je lui ai promis quelque chose dont il se souviendrait, quelque chose qui le ramènerait dans ce village une fois qu'il aurait appris ce qu'il y a à apprendre.
    Il s'empara de sa main et la posa sur l'épaule de Samig.
    — Va à Samig, ce soir. Qu'il sache ce qu'il perd en préférant les baleines à la possession d'une épouse.
    14
    Samig retint son souffle et guetta la réaction de Kiin. Amgigh aurait dû parler à Kiin en privé et lui demander si elle accepterait de passer la nuit avec Samig. Ainsi, elle aurait pu refuser, sans gêne, sans paraître s'opposer à son époux.
    Puis Samig se dit que peut-être Amgigh aimait le pouvoir qu'il avait sur Kiin en tant qu'époux et exiger d'elle obéissance.
    Mais non, ça c'était Oiseau Gris, pas Amgigh. Amgigh était jeune et marié depuis peu. Premier Flocon n'avait-il pas commis semblables erreurs avec Baie Rouge? Même maintenant, alors qu'ils étaient mariés depuis près de deux étés, Samig remarquait encore à l'occasion que le manque d'égards de Premier Flocon faisait grincer de colère les dents de Baie Rouge; plus souvent, elle riait de frustration. Et Baie Rouge était parfois sotte, elle aussi, courant dans l'eau pour souhaiter bonne chasse à son mari, quand chacun sait qu'une épouse doit observer son mari depuis le toit de l'ulaq et non depuis la plage, qu'un chasseur ne doit pas toucher sa femme avant de grimper dans son ikyak. Faute de quoi, les animaux marins sentent l'odeur de terre des femmes, sont fâchés et ne s'abandonnent pas au harpon du chasseur.
    Samig vit les yeux de Kiin s'ouvrir tout

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