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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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elle, ce soir. Sois doux.
    Et Samig avait refusé de laisser passer Amgigh tant qu'il n'avait pas promis d'un signe de tête.
    Amgigh avait possédé une femme auparavant — une vieille Chasseur de Baleines qui s'était glissée dans sa couche un jour qu'il était parti en voyage de troc avec son père. Elle l'avait pris rapidement, le chevauchant comme si elle était l'homme. Le lendemain, Amgigh s'était senti bête et lourdaud.
    Mais avec Kiin... Elle avait promené ses mains vigoureuses sur son ventre, puis caressé ses épaules, son dos, ses fesses et ses cuisses, le titillant jusqu'à ce que ses reins cognent et lui disent qu'il ne pouvait plus attendre. Mais il s'était rappelé la prière de Samig. Il avait été doux.
    Amgigh souriait dans le noir.
    Samig épouserait une femme Chasseur de Baleines, tapageuse, vulgaire et dominatrice. Oui, Samig apprendrait à chasser la baleine. Mais il avait promis d'enseigner à Amgigh. Alors, Amgigh saurait à son tour. Amgigh saurait et il aurait aussi Kiin. Amgigh poussa un soupir et attira Kiin si près qu'il perçut la douceur de ses cheveux.
    Peut-être, au printemps prochain, aurai-je un fils ?
    12
    Qakan se réveilla de bonne heure, avant que sa mère n'ait lissé les mèches des lampes et vidé les paniers de nuit. Il grimpa au sommet de l'ulaq de son père et regarda dans la semi-obscurité l'ulaki-daq et la plage.
    Il avait faim. Il aurait dû prendre quelque chose dans la réserve, mais il était déjà sur le toit. Rentrer de nouveau serait trop de tracas. De toute façon, sa mère ne tarderait pas à se lever. Elle lui apporterait à manger.
    Il bâilla. Tout était immobile. Même le vent s'était calmé, laissant la mer rouler paisiblement jusqu'au rivage. Un mouvement près d'un autre ulaq attira le regard de Qakan. Sans doute Chagak. Il n'y avait nulle paresse chez cette femme. Mais non, c'était Kiin. Elle vidait les ordures de la nuit.
    Qakan sourit. Pour elle, Kayugh avait payé seize peaux et un couteau.
    Ainsi, Kiin était la femme d'Amgigh. Si la pensée du mariage de Kiin amenait le rire dans la bouche de Qakan chaque fois qu'il songeait au prix payé par Kayugh, elle apportait aussi de la colère. À cause de la cupidité de son père, Qakan n'avait plus qu'à oublier le plan si soigneusement élaboré pendant plus de trois ans.
    Pourquoi Kayugh avait-il accepté de payer autant? Il savait que Kiin n'était rien. Pendant des années, elle n'avait eu ni nom, ni âme. Oiseau Gris lui avait affirmé qu'elle ne serait jamais une épouse et, quand Oiseau Gris serait trop vieux pour chasser, que deviendrait-elle? Elle irait vivre avec Qakan, lui apporterait la nourriture nécessaire à ses propres épouses et à ses enfants. Et à lui-même.
    Combien de fois son père lui avait-il dit, ainsi qu'aux chasseurs des autres tribus, aux marchands qui venaient au village, que Kiin avait volé le droit d'aînesse de Qakan, le droit d'être le premier à téter le sein de sa mère, à prendre une place dans l'ulaq de son père? Qui pouvait savoir quels autres pouvoirs elle lui avait volés? Certes, leur mère avait sevré Kiin très tôt afin de pouvoir donner un autre enfant — un fils — à son mari. Et si la plupart des enfants sevrés si rapidement mouraient, sa sœur — gourmande de vie — avait bel et bien vécu.
    Elle avait marché de bonne heure. Ses petites jambes vigoureuses trottinaient tandis qu'elle apprenait à aider sa mère, portant des charges trop lourdes pour une enfant, disant des mots trop difficiles pour une enfant; et tout ce temps, lui, Qakan, était resté allongé, se contentant d'observer, parce qu'elle avait pris son pouvoir, le pouvoir de parler et de marcher. Mais Qakan comprit enfin qu'il devait se battre et lui aussi marcha et parla. Les esprits remarquèrent ses efforts et ils prirent quelques-uns des nombreux mots de sa sœur pour les lui donner, si bien que la fille se mit à bégayer. Les années passèrent et Qakan conçut son plan fantastique. Il l'avait tramé alors qu'il était encore un petit garçon. Et voilà qu'il s'apprêtait à devenir un homme.
    Qakan plissa les yeux, bâilla de nouveau et porta son regard sur l'étendue sombre et délavée de la mer. Il détestait la mer, l'eau éternellement autour de son ikyak, même au-dessus de lui, suspendue, grise, dans les nuages. Il détestait le poids du harpon dans ses mains, les lignes qui s'entortillaient et faisaient des nœuds, l'ikyak qui tanguait au moindre

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