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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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demander. Cependant, je
me voyais mal lui déclarer abruptement : « Accordez-moi la permission
de partir. » Je commençai donc à la manière des Han par une
circonlocution :
    — Il y a longtemps, Sire, j’ai eu l’occasion de
déclarer : « Jamais je ne pourrais sciemment donner la mort à une
femme. » Lorsque j’ai prononcé ces paroles, un de mes esclaves, plus sage
que je ne l’aurais pensé, m’a répondu : « Vous êtes encore
jeune. » Je n’aurais pu le croire à l’époque, mais j’ai récemment été la
cause de la mort de la femme qui m’était la plus chère au monde. Et je ne suis
plus jeune, à présent. Je suis un homme entre deux âges, ayant déjà bien entamé
la quarantaine. Cette mort m’a causé une violente douleur, et tel un éléphant
blessé j’incline à me traîner vers la solitude de mon pays natal pour y
cicatriser ma blessure ou pour m’en lamenter. Je demande votre permission,
Sire, et, je l’espère, votre bénédiction, pour que mon père, mon oncle et
moi-même quittions votre cour. Je ne suis plus très jeune, mais eux sont déjà
vieux, et il serait bon qu’ils puissent rentrer mourir chez eux.
    — Et moi, je suis plus vieux encore...,
soupira-t-il. Le rouleau de ma vie s’est déroulé bien plus loin que d’une main
à l’autre. Et à chaque nouveau tour qu’il fait sur son axe, l’image qu’il
révèle montre moins d’amis assemblés autour de moi. Un jour, Marco, tu envieras
ta dame perdue. Elle est morte dans l’été de sa vie et n’a pas eu à voir la
verdure et les fleurs qui l’entouraient brunir, se flétrir et tomber en
tourbillonnant au sol telles les feuilles d’automne poussées au vent. (Il
frissonna, comme s’il sentait déjà les rafales de l’hiver.) Je serai navré de
voir partir mes amis Polo, mais ce serait mal récompenser les longs services de
votre famille et votre fidélité sans faille que d’insister pour les prolonger.
Avez-vous déjà préparé votre voyage ?
    — Bien sûr que non, Sire. Pas sans votre
permission.
    — Vous l’avez, bien sûr. Mais c’est moi, à
présent, qui vais vous demander une faveur. Une dernière mission pour vous, que
vous pouvez accomplir en rentrant et qui facilitera votre retour.
    — Vous n’avez qu’à commander, Sire.
    — J’aimerais te demander si toi, Nicolò et Matteo pourriez délivrer un chargement de
valeur et d’une certaine délicatesse à mon petit-neveu Arghun, en Perse.
Lorsque celui-ci a pris la succession de cet ilkhanat, il a choisi une épouse
persane, un geste politique à l’égard de ses sujets. Il a sans doute d’autres
femmes, bien sûr, mais il souhaite à présent prendre pour première épouse une
pure Mongole, de sang comme d’ascendance. Il m’a donc officiellement demandé de
lui fournir une fiancée correspondant à ses vœux, et je lui ai sélectionné une
dame nommée Kukachin.
    — La veuve de votre fils Chingkim, Sire ?
    — Non, non. Elle porte le même nom mais n’a aucun
lien de parenté, et tu ne l’as jamais rencontrée. C’est une jeune fille venue
droit des plaines, d’une tribu appelée Bayaut. J’ai prévu pour elle une riche
dot, ainsi que le trousseau ordinaire d’une jeune mariée et une suite de domestiques
mâles et femelles ; elle est à présent prête à rejoindre en Perse son
futur époux. Cependant, l’envoyer par voie de terre signifierait qu’elle doive
traverser les territoires de l’ilkhan Kaidu. Ce lâche cousin est toujours aussi
indiscipliné, et tu sais quelle inimitié il nourrit depuis longtemps envers ses
cousins à la tête de l’ilkhanat de Perse. Je crois Kaidu capable de capturer
Dame Kukachin en cours de route et la garder prisonnière... soit pour en tirer
rançon de la part d’Arghun, soit seulement pour savourer la malveillance de
l’exploit en lui-même.
    — Souhaitez-vous que nous l’escortions à travers
ces peu sûrs territoires ?
    — Non. Je préférerais qu’elle évite ces dangers.
Mon idée est de lui faire parcourir le trajet par voie maritime. Cependant,
tous mes capitaines sont des Han, et vakh !... les marins han se
sont comportés de si piètre façon au cours de notre tentative d’invasion du
Japon que j’hésite à leur confier cette mission. En revanche, toi et tes oncles
êtes issus d’un peuple de marins. Vous êtes familiers de la haute mer et de la
conduite des bateaux.
    — C’est vrai, Sire, mais nous n’en avons jamais
vraiment conduit,

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