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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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marin Han nous traduisit ses
propos :
    — Cet homme a sans doute été victime d’un
poisson-pierre qui est la plus venimeuse créature des mers. Touchez-le et vous
endurerez une si terrible agonie qu’elle vous rendra fou avant de vous tuer. Si
ce malheur survenait à nouveau, découpez un durian bien mûr et
appliquez-le sur la blessure. C’est le seul remède.
    Je savais que le durian avait de louables
qualités – j’en mangeais voracement, ayant découvert qu’il poussait ici en
abondance –, mais jamais je n’aurais soupçonné ses vertus médicinales. Peu
après, l’une des coiffeuses de Kukachin également partie se baigner revint
atteinte de la même piqûre au bras, et le médecin lui administra bien sûr le
traitement au durian. La jeune fille ne souffrit pas plus que de la
douleur ordinaire d’une blessure au bras, et le praticien ajouta à ses notes
médicales : « Pour autant que je puisse en juger, la pulpe du durian absorbe, digère littéralement le venin du poisson-pierre avant qu’il
fasse effet. »
    Nous assistâmes également à ce qui causa la perte de
deux autres membres du groupe. La pluie avait fini par cesser, et le soleil
s’était montré ; nos capitaines, debout sur le pont, scrutaient les deux,
attendant de voir si le beau temps allait durer suffisamment longtemps pour
nous permettre de lever l’ancre et de nous éloigner. Beaucoup murmuraient des
incantations dans ce sens. Le vert de jade de la mer de Java était si attirant,
ce jour-là, que je fus à deux doigts d’y plonger – c’était un doux clapotis,
brillant d’éclats de lumière comme les écailles d’un poisson. Il tenta en effet
Koja et Apushka, deux des trois émissaires arrivés de Perse pour accompagner
Kakuchin. S’étant défiés mutuellement pour une course à la nage jusqu’à un
récif peu éloigné, ils plongèrent depuis le chuan et s’éloignèrent en
battant l’eau de leurs bras, répandant autour d’eux de vives éclaboussures,
tandis que nous étions tous rassemblés sur le pont pour les encourager.
    Soudain, une grappe d’albatros surgit du ciel et
fondit sur eux. Je supposai que l’interminable déluge les avait privés un temps
de nourriture, car ils tentaient d’attraper nos restes et semblaient affamés.
Ils commencèrent par plonger à plusieurs reprises sur les nageurs et frappèrent
de leurs longs becs crochus ce qui dépassait de l’eau, en l’occurrence leurs
têtes. Koja et Apushka cessèrent de nager, tentant tout à la fois d’éloigner
les oiseaux rassemblés et de se maintenir à flot. Nous les entendîmes crier,
puis émettre des jurons effrayés qui se transformèrent en hurlements, tandis
que le sang ruisselait sur leurs visages. Dès que les albatros leur eurent
mangé les yeux, ils se laissèrent couler, désespérés. Forcés de remonter le
temps de prendre une goulée d’air, ils tentèrent de le faire une fois ou deux,
mais les oiseaux les attendaient. Finalement, les deux hommes se laissèrent
couler, préférant se noyer plutôt qu’être horriblement déchiquetés vifs. Dès
que leurs corps remontèrent et commencèrent à flotter mollement à la surface,
pâteux et détrempés, les albatros s’y perchèrent et s’en délectèrent pour le
reste de la journée.
    Il était triste de périr ainsi brusquement, et de
façon si peu mongole, après avoir traversé par voie de terre les innombrables
dangers qui séparaient la Perse de Kithai puis navigué de là-bas jusqu’ici.
Cette perte nous affecta tous cruellement, surtout Kukachin. Nul ne songea
alors à y voir le présage de pertes futures, peut-être encore plus douloureuses
– même mon père, qui eût pu murmurer, par exemple : « Les malheurs
arrivent toujours par trois. » Pourtant, comme nous le prouvèrent les
événements qui suivirent, il y avait bel et bien là un sinistre augure.
    Le temps étant resté beau et clair pendant deux jours,
nos capitaines décidèrent que l’on pouvait s’y fier. Les équipages
s’installèrent le long des immenses barrots et déployèrent les rames qui
propulsèrent lentement nos puissants bateaux hors de l’embouchure du fleuve
jusqu’à la haute mer, où les vastes voiles à lattes furent hissées, et bientôt
le vent nous poussa vers l’ouest, vers notre pays natal. Mais, dès que nous
eûmes contourné par le sud un cap proéminent tourné vers l’ouest, une vigie, du
haut de son mât, fît entendre un appel. Ce ne fut pas l’un de

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