Marcof-le-malouin
jour.
– Tu as raison.
– Où est Henrique ?
– Il dort.
– Réveille-le promptement et descends. Je t’attends en bas.
– Va ; je te suis.
Hermosa courut vers la chambre où reposait son fils. Diégo descendit dans la cour. Les chevaux étaient bridés. Jasmin, tenant les rênes réunies dans sa main droite, attendait au pied de l’escalier. Le ciel était pur. Des myriades de diamants étincelants étaient semés sur l’horizon à la teinte bleue foncée. Quelques nuages blancs s’élevaient gracieusement et enveloppaient au passage la blanche Phébé dans un brouillard semblable à une gaze diaphane.
Diégo frappait sa botte molle du manche de son fouet. Enfin Hermosa parut. Elle tenait son fils par la main. Diégo souleva dans ses bras l’enfant mal réveillé et le jeta sur le cou du cheval qui lui était destiné. Puis, se retournant vers sa compagne, il lui tendit sa main ouverte en se baissant un peu. Hermosa releva sa jupe, appuya sur la main de Diégo un pied fort élégamment chaussé et assez mignon pour celui d’une Italienne, et s’élança en selle en écuyère habile. Diégo enfourcha alors sa monture, prit Henrique entre ses bras, et, appelant le domestique :
– Jasmin, dit-il.
– Monsieur le comte ?
– Attache à ton bras la bride du cheval de main et prends la tête.
– Quelle route, monsieur ?
– Celle de Brest.
Et Jasmin, sur cette réponse, piqua en avant, tenant soigneusement les rênes du cheval sur lequel il avait placé le coffre. Hermosa et Diégo le suivirent.
Ils ne pouvaient pas songer, à cause de leurs montures, à traverser les champs de genêts. Il fallait suivre la route. Or, cette route conduisait précisément dans la direction qu’avaient prise le marquis de Loc-Ronan, Julie, et Jocelyn une demi-heure auparavant pour se rendre auprès de la vieille fermière.
– Diégo, dit tout à coup Hermosa, si au lieu de gagner Brest, où nous n’arriverons que demain, nous nous dirigions vers Audierne, où nous pourrions être facilement en moins d’une heure ?
– Crois-tu que nous trouvions à nous embarquer ?
– Sans aucun doute ! Avec de l’argent ne trouve-t-on pas tout ce que l’on veut ?
– Alors, fit Diégo, piquons vers Audierne.
Et il transmit l’ordre à Jasmin qui, arrivé à un endroit où la route se bifurquait, continua de courir en ligne droite, au lieu de suivre le chemin qui conduisait à Brest.
– Tu as eu une excellente inspiration, reprit Diégo en se penchant vers sa compagne.
– Certes ! répondit celle-ci. Nous ne saurions être trop tôt à l’abri des recherches que va provoquer Yvonne d’une part, en racontant ce qu’elle sait, et de l’autre le cadavre de Raphaël que l’on trouvera dans la chambre.
– Puis nous ne saurions trop nous presser également d’arriver à Rennes.
– Ah ! les deux millions te tiennent au cœur.
– Énormément !
– J’en suis fort aise.
– Pourquoi ?
– Parce que tu es habile, Diégo, et que, si tu emploies dans cette affaire tout le génie d’intrigue dont le ciel t’a si amplement pourvu, nous réussirons.
– Je n’en doute pas, belle Hermosa.
Et tous deux activèrent encore les allures rapides de leurs chevaux. Ainsi qu’Hermosa l’avait dit, en moins d’une heure ils aperçurent les premières maisons de la petite ville maritime. Ils étaient alors au sommet d’une colline.
– Demeure ici avec Henrique et Jasmin, fit Diégo en s’adressant à Hermosa. Le galop de nos chevaux au milieu du silence de la nuit pourrait éveiller l’attention des habitants d’Audierne. Je vais aller frapper seul à la porte d’un pêcheur et obtenir de gré ou de force qu’il nous embarque sur l’heure.
– Voici précisément un canot qui rentre au port, répondit Hermosa en désignant du geste le rivage sur lequel venaient doucement mourir les vagues.
Diégo regarda attentivement.
– Tu te trompes, dit-il, c’est une barque qui gagne la haute mer.
– Peux-tu distinguer ce qu’elle contient ?
– Oui, quatre personnes.
– Y a-t-il une femme parmi ces gens ?
– Attends !
Diégo posa la main sur ses yeux pour concentrer leurs rayons visuels.
– Oui… oui, répondit-il vivement ; je distingue une coiffe blanche.
– Si c’était Yvonne ?
– Que nous importe, maintenant !
– Nous pourrions peut-être gagner de vitesse sur cette embarcation. Elle n’est montée que par trois hommes : prends-en
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