Marie Leszczynska
mais d’un feu, d’un spirituel, d’un brillant que je n’ai vu à aucune femme. Elle était arrondie dans toutes ses formes, comme dans tous ses mouvements. » Bref, comme l’écrit Dufort, « tout homme l’aurait voulu avoir pour maîtresse ».
Louis XV l’a côtoyée plusieurs fois lors de chasses au cerf dans la forêt de Sénart, qui ont lieu tous les ans à l’automne. Mais l’histoire reste muette sur la première rencontre du souverain et de Jeanne-Antoinette. Seule certitude : en février 1745, Louis XV partage à plusieurs reprises le lit de cette jeune femme séduisante et pleine de gaieté.
La bourgeoise devient marquise
Très amoureux, le roi l’installe dès leurs premières rencontres dans les appartements de feu la duchesse de Châteauroux. Le duc de Luynes ne prend pas l’affaire au sérieux. « Ce n’est qu’une galanterie et non pas une maîtresse », dit-il. Pour ce maître de l’étiquette et de la bienséance, le roi ne peut se commettre avec une bourgeoise. Barbier, lui, parle déjà de « maîtresse déclarée ». Au bout de quelques semaines, Luynes se ravise : « On dit qu’elle aime éperdument le roi et que cette passion est réciproque. » Il écrira même, un peu plus tard : « Tout le monde trouve Madame de Pompadour extrêmement polie ; non seulement elle n’est point méchante et ne dit de mal de personne, mais elle ne souffre même pas que l’on en dise chez elle. »
La mort subite de l’empereur germanique Charles VII, le 20 janvier 1745, a bouleversé les objectifs de la guerre. Son fils préférant soutenir l’époux de Marie-Thérèse
d’Autriche plutôt que de tenter à son tour l’aventure impériale, la guerre en Allemagne n’a plus de raison d’être. Dès lors, le conflit ne dure que par la volonté des Anglais dont le rêve est d’affaiblir la France. S’il est exclu de les attaquer directement, ils sont vulnérables en Flandre. Dans l’espoir de mettre un terme rapide aux affrontements, le roi décide de rejoindre son armée. Cette fois sans aucune favorite, mais en compagnie du dauphin ! Et comme il en a pris l’habitude, le roi tient la reine éloignée des affaires du royaume pendant la vacance du pouvoir…
Pendant que Louis XV et le dauphin guerroient en Flandre, la situation de Jeanne-Antoinette d’Étiolles change. Son mari, furieux mais conscient du poids de son rival, finit par consentir à une séparation de corps et de biens, prononcée le 7 mai 1745. Il faut procurer rapidement à Madame d’Étiolles une terre ancestrale dont elle puisse porter le nom afin d’être présentée à la cour. Pendant l’absence du roi, ses ministres trouvent la solution : avec la disparition de la marquise de Courcillon s’éteint la descendance des Pompadour, son gendre, le duc de Chaulnes, renonçant à en relever le nom.
Le 24 juin, jour de son entrée victorieuse dans la citadelle de Tournai, le roi signe le contrat qui fait de sa jeune maîtresse la nouvelle marquise de Pompadour. Jeanne-Antoinette reçoit le précieux brevet lui conférant le titre à Étiolles, où elle s’est retirée pour attendre Louis XV. Les deux amants correspondent quotidiennement par le truchement de Pâris de Montmartel
qui reçoit les lettres royales portant la devise « discret et fidèle ». On raconte même que plusieurs complices, dont le futur cardinal de Bernis et Voltaire, nommé historiographe du roi et gentilhomme ordinaire de sa chambre depuis le 1 er avril, apportent leur aide à la nouvelle marquise pour y répondre.
En examen face à Marie
Le roi et le dauphin rentrent à Paris dans les premiers jours de septembre. Ils sont longuement fêtés, alors que la cour s’impatiente : Versailles attend la présentation officielle de la nouvelle marquise de Pompadour, et tout le monde s’interroge sur le nom des deux élues qui vont parrainer la « fille Poisson ». La cérémonie a lieu le 14 septembre en fin d’après-midi. Bien avant l’heure, une foule de courtisans fait déjà le pied de grue dans l’antichambre du roi et dans celle de la reine. Ils sont tous venus voir la petite-bourgeoise se ridiculiser sous les ors de la grande Galerie. En habit de cour à longue traîne, elle arrive, fine et gracieuse, en compagnie de la princesse de Conti [3] et de la comtesse d’Estrades [4] . La marquise ne peut maîtriser l’affolement de son coeur en franchissant le seuil du cabinet du roi. Mais elle réussit
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