Marie
belles histoires du Livre ! Ils peinaient à
l’imaginer. Le désir les démangea de la questionner encore. Miryem protesta,
sérieuse de nouveau :
— Ne
perdons pas de temps en bavardages. Chaque heure qui passe, les mercenaires
d’Hérode font souffrir mon père. Plus tard, je vous le promets, je vous
raconterai.
— Et
ton père aussi, répliqua Abdias d’un ton assuré. Quand Barabbas l’aura délivré,
il faudra qu’il nous raconte.
*
* *
Tournant à
gauche et à droite, en un zigzag qui ne semblait pas les mener bien loin, ils
parvinrent dans une rue plus large. Les maisons qui la bordaient, moins
délabrées, étaient ornées de jardins. Quelques femmes y travaillaient. Elles
jetèrent des regards intrigués vers leur groupe. Reconnaissant les enfants,
elles se remirent aussitôt à l’ouvrage.
Abdias,
bifurquant encore à droite, s’enfonça dans une venelle encaissée entre d’épais
murs de briques nues : une vieille construction romaine. Çà et là, des grenadiers
sauvages et des tamaris avaient poussé entre les fissures, les masquant autant
que les élargissant. Certains étaient si grands et si forts que leurs masses
enlacées dépassaient les murs d’une hauteur d’homme.
Miryem
s’aperçut qu’une partie des enfants était demeurée en arrière, à l’entrée de la
ruelle. Sur un signe d’Abdias, des gamins coururent en avant.
— Ils
vont faire le guet, expliqua le petit chef.
Et,
aussitôt, il l’attira sans ménagement vers un gros buisson de tamaris. Le tronc
s’était démultiplié en branches rêches, mais assez souples pour que l’on puisse
les écarter afin de passer au travers.
— Dépêche-toi,
souffla Abdias.
Son
manteau la gêna. Elle le dégrafa maladroitement. Abdias le lui prit des mains
tout en la poussant en avant.
De l’autre
côté, à sa surprise, elle se retrouva dans un champ de fèves à peine levées,
ponctué de quelques amandiers aux troncs rabougris. Abdias sauta à son côté,
suivi de deux de ses compagnons.
— Cours !
ordonna-t-il en lui fourrant le manteau entre les mains.
Ils
longèrent le champ de fèves et parvinrent à une tour à demi en ruine. Abdias,
la précédant, grimpa un escalier jonché de briques cassées. Ils pénétrèrent
dans une pièce carrée dont le mur du fond avait été largement abattu. Au
travers de la brèche, Miryem devina le dos d’une autre construction. Elle aussi
romaine et très ancienne. Le toit de tuiles rondes était partiellement écroulé.
Abdias
désigna un pont de bois branlant qui, depuis la faille du mur, pénétrait dans
une lucarne de la bâtisse romaine.
— On
passe là-dessus. Tu risques rien, c’est solide. Et de l’autre côté, il y a une
échelle.
Miryem s’y
aventura, retenant son souffle. C’était solide, peut-être, mais terriblement
branlant. Elle se glissa dans la lucarne, se laissa doucement tomber sur un
plancher de bois. La pièce où elle se redressa ressemblait à un petit grenier.
De vieux couffins servant à transporter des jarres, mangés par l’humidité et
les insectes, s’entassaient dans un coin. De la paille, du tressage rompu et
délité crissèrent sous ses pas. Elle devina le volet rabattu d’une trappe alors
que, derrière elle, Abdias sautait à son tour sur le plancher.
— Vas-y,
descends, l’encouragea-t-il.
La pièce
au-dessous était à peine éclairée par une porte étroite. Cependant le peu de
lumière suffisait pour s’apercevoir que le sol de dalle était loin du plancher
où Miryem se trouvait. Au moins quatre ou cinq fois sa hauteur.
À tâtons,
de la pointe des pieds, elle chercha les barreaux de l’échelle. Abdias, un
sourire moqueur aux lèvres, s’inclina vers elle, lui tenant complaisamment le
poignet.
— C’est
pas si haut, s’amusa-t-il. Moi, des fois, je prends même pas l’échelle. Je
saute.
Miryem
devina les échelons qui vacillaient sous son poids et, s’abstenant de répondre,
les descendit en serrant les dents. Puis, avant qu’elle touche le sol, deux
mains puissantes lui enlacèrent la taille. Elle poussa un cri pendant qu’on la
soulevait pour la déposer sur le sol.
— J’étais
sûr qu’on se reverrait, déclara Barabbas, un sourire dans la voix.
*
* *
Une lumière
chiche l’éclairait à contre-jour. Elle distinguait vaguement son visage.
Dans son
dos, Abdias se laissa glisser comme une plume le long de l’échelle. Barabbas
lui ébouriffa tendrement la tignasse.
— Je
vois que
Weitere Kostenlose Bücher