Marie
futurs combattants, ce n’est pas une mauvaise
expérience.
Joseph
d’Arimathie, attiré par le bruit, apparut dans la cour. Sa réputation de
sagesse et de grand savoir médical, associée à la renommée des esséniens de
Damas, le précédait en tout lieu. Aucun des nouveaux venus, cependant, n’avait
déjà eu l’occasion de le rencontrer.
Joachim
les lui présenta. Joseph d’Arimathie enveloppa leurs mains des siennes avec une
simplicité qui les mit aussitôt à l’aise.
— La
paix soit avec toi, répéta-t-il tour à tour à Lévi, Eléazar et Jonathan. Béni
soit Joachim d’avoir voulu cette rencontre.
Un instant
plus tard, Yossef les convia à s’asseoir autour de la grande table sous les
platanes. Commença un long bavardage où chacun narra les aventures de sa vie et
les malheurs de sa région, malheurs dont Hérode, toujours, était le
responsable.
Tout ce
temps, Halva et Miryem s’affairaient, garnissant la table de gobelets de lait
caillé, de fruits et de galettes qu’Abdias, les joues rouges, décollait
habilement des pierres brûlantes du four.
— J’ai
passé une demi-année chez un boulanger, confia-t-il fièrement à Halva qui
s’étonnait de sa dextérité. J’aimais bien.
— Et
pourquoi n’es-tu pas devenu boulanger à ton tour ? Le rire d’Abdias fut
plus moqueur qu’amer.
— As-tu
déjà vu un am-ha-aretz boulanger ?
Miryem
avait entendu l’échange. Elle croisa le regard d’Halva. L’une et l’autre ne
purent s’empêcher de rougir. Halva allait adresser une parole amicale à Abdias,
quand un brusque éclat de voix dans la cour la fit se retourner. Le sage Guiora
était devant les nouveaux venus, si raide et si tendu qu’on en oubliait sa
petite taille.
— Pourquoi
un tel vacarme ? J’entends vos cris jusque derrière la maison et je ne
peux plus étudier ! s’exclama-t-il en gesticulant.
Tous le
contemplèrent, stupéfaits. Joseph d’Arimathie dressa sa taille robuste et
s’approcha assez de Guiora pour que leur différence physique soit frappante. Il
sourit. Un sourire aimable, amusé et curieusement glacial. Sur ses traits,
Miryem devina une force difficile à ébranler.
— Nos
cris expriment notre joie d’être réunis, cher Guiora. Ces compagnons sont
arrivés ici après une dure marche dans la forêt. Dieu les a guidés jusqu’à
notre ami, qui les a conduits jusqu’à nous en se fiant aux étoiles.
— Se
fier aux étoiles !
La barbe
de Guiora s’agita. Ses épaules tremblèrent de fureur.
— Quelle
ineptie ! glapit-il. Toi, un fidèle des sages, tu oses répéter de
pareilles sornettes ?
Le sourire
de Joseph d’Arimathie s’accentua tout en restant glacial.
Abdias
avait quitté son four et se tenait tout près de Miryem. Elle devina qu’il
retenait un quolibet. Là-bas, les nouveaux venus s’étaient levés, embarrassés
par la colère de Guiora. Si Joachim paraissait amusé par la situation, Yossef
observait les deux esséniens avec inquiétude. Sans répondre à l’agression de Guiora,
Joseph d’Arimathie indiqua une place libre sur le banc.
— Guiora,
mon ami, dit-il paisiblement, joins-toi à nous. Prends place autour de la table
et bois un verre de lait. Il est bon que nous fassions connaissance.
— C’est
inutile. La seule connaissance que nous devons cultiver, c’est celle de Yhwh.
Moi, je retourne à ma prière pour la parfaire.
Il pivota
brusquement, lança un regard furieux vers Miryem, Abdias et Halva qui se
trouvaient sur son chemin, puis il se retourna encore, tout aussi brusquement.
— À
moins de commencer cette réunion pour laquelle nous sommes là et qu’on en
finisse ?
Joachim
secoua la tête.
— Nicodème
n’est pas encore arrivé. Il vaudrait mieux l’attendre.
— Le
Nicodème du sanhédrin ? grinça Guiora avec dégoût.
Joachim
hocha la tête.
— Il
vient de Jérusalem. La route est longue, il doit la suivre avec prudence.
— Ainsi
sont ces pharisiens ! Ils feraient attendre Dieu Lui-même.
— Laissons-lui
la journée pour nous rejoindre avant de lancer notre discussion, intervint
Joseph d’Arimathie, ignorant comme à son habitude les invectives de Guiora.
D’ailleurs, nos amis doivent prendre un peu de repos. La pensée n’est claire
que dans un corps en paix.
— Du
repos ! Un corps en paix ! ricana Guiora. Balivernes de Damas !
Priez et étudiez, si vous voulez avoir l’esprit clair. Voilà ce qui est utile.
Le reste n’est que foutaise et
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