Marie
fuyaient en laissant beaucoup de morts sur le terrain. Ou
si, supérieurs en nombre, ils résistaient, Matthias et Barabbas sonnaient des
retraites trop rapides pour que leurs ennemis soient capables de les
poursuivre. Le plus souvent, il était facile de piller les réserves ou de les
incendier.
Si bien
qu’en peu de mois l’inquiétude avait commencé à ronger les troupes d’Hérode.
Les mercenaires craignirent de se déplacer en petit nombre. Plus aucun
campement de Galilée n’était assez sûr pour eux. Les vols et les incendies des
dépôts désorganisaient l’intendance des légions. Les officiers romains si
pleins de morgue qui commandaient les places fortes manifestèrent eux-mêmes de
l’inquiétude.
— Mais
chez Hérode, la folie règne. Les Romains le redoutent et n’osent lui dire la
vérité, reprit Barabbas. Dans les palais, plus personne ne sait faire la
différence entre une vérité et un mensonge. Tout s’est passé exactement comme
je l’avais prévu. Il n’y avait pas de meilleur moment pour la révolte.
Chaque
jour, des hommes venaient les rejoindre pour se battre à leur côté. Dans les
villages de Galilée et du nord de la Samarie, on les accueillait à bras
ouverts. Les paysans ne se faisaient pas prier pour leur donner de la
nourriture et, au besoin, les cacher. En retour, lorsque les coups contre le
tyran et ses suppôts rapportaient un butin suffisant, c’était avec joie qu’il
était partagé entre tous, combattants et villageois.
Encouragés
par leur force nouvelle, Barabbas et Matthias avait décidé de porter leurs
attaques de plus en plus loin, hors de Galilée. Jamais de grandes batailles,
mais des combats rapides, meurtriers. D’abord en Samarie, puis dans le port de
Dora, en pays phénicien, où ils avaient capturé une belle cargaison d’armes
forgées de l’autre côté de la mer. Ils en avaient profité pour libérer un
millier d’esclaves. Des Barbares du Nord, dont certains étaient demeurés avec
eux. Ils attaquèrent Sichem et Acrabéta, aux portes de la Judée, narguant les
fils survivants d’Hérode réfugiés dans la forteresse d’Alexandrion.
— Ceux-là,
nous n’avons pas eu besoin de les combattre puisque Hérode, à la dernière lune,
les a assassinés lui-même !
Après
chaque victoire, l’enthousiasme grandissait dans les villages.
— Même
les rabbins ont cessé de nous dénigrer dans les synagogues, ajouta Barabbas
d’une voix blanche. Et quand on entrait dans des bourgs non surveillés par les
mercenaires, les habitants nous accueillaient en chantant et en dansant. C’est
peut-être ça qui nous a joué un sale tour.
Il parlait
et parlait, comme s’il lui fallait nettoyer son esprit de ce qu’il avait vécu
d’intense et d’extraordinaire au cours des derniers mois. Miryem cependant ne
détournait pas son regard d’Abdias. Elle ne montrait aucun signe qu’elle
écoutait alors que, le visage levé vers Barabbas, Rachel et Mariamne ne
perdaient pas une de ses paroles.
Il désigna
Abdias d’un geste douloureux, presque caressant.
— À
lui aussi, ça lui plaisait. Il a toujours aimé se battre. Dans les mêlées,
quand on en est à se cogner les uns contre les autres, la lame à la main, que
ça taille et gueule à tout va, il est à son aise. Il tire avantage de sa
petitesse. De son apparence d’enfant. Mais faut pas s’y fier. Il est plus malin
qu’un singe et plus courageux que nous tous. Oui, ça, il aime se battre. Il
prend sa revanche…
Barabbas
se tut. Suivit en silence la main de Miryem qui caressait le bras d’Abdias,
humectait ses tempes. Il secoua la tête.
— L’idée
de revenir en Galilée pour attaquer la forteresse de Tarichée, c’est la sienne.
Il voulait accomplir un exploit. Non par orgueil, mais pour démontrer enfin à
tous que les légionnaires de Rome comme les mercenaires d’Hérode étaient à
notre merci. Même là où ils se croyaient les plus forts.
« Il
fallait trouver un lieu réputé invincible. On avait songé aux forteresses de
Jérusalem ou de Césarée. Mais Abdias m’a dit : « C’est Tarichée que
nous pouvons prendre. On l’a déjà presque fait. »
C’était
vrai. L’attaque durant laquelle ils avaient délivré Joachim avait exposé les
faiblesses de la forteresse. Les Romains étaient trop bêtes et trop sûrs
d’eux-mêmes pour les avoir corrigées. Stupidement, ils avaient reconstruit les
baraques du marché et les bâtiments en bois qui entouraient
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