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Marie

Marie

Titel: Marie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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Elle le regarda, froide et calme. D’un geste presque
machinal, elle ramassa une poignée de poussière et la répandit sur sa
chevelure, en signe de deuil. Elle rassembla les pans de sa tunique et se mit
debout, chancelante.
    Là-bas,
près de l’attelage, Rekab esquissa un geste, craignant qu’elle ne s’effondre à
nouveau. Mais elle marcha jusqu’au char. Avant d’y monter, elle se tourna vers
Barabbas. Sans élever la voix, elle déclara :
    — Tu
es stupide et borné. Ce n’est pas seulement Abdias qui est mort par ta faute.
Aussi des femmes, des enfants. Tout un village. Et tes compagnons et ceux de
Matthias. Pour quoi ? Pour quelle victoire ? Aucune. Morts pour ton
obstination. Morts pour ton orgueil. Morts parce que Barabbas veut être ce
qu’il ne sera jamais : roi d’Israël…
    Il vacilla
à ces paroles. Mais ce qui l’anéantissait, c’était le mépris glacé qui
recouvrait le visage de Miryem.
    — C’est
facile de me condamner, moi qui ose.
    — Jamais
tu ne seras le plus fort. Tu n’apporteras que sang et douleur où il y a déjà
sang et douleur.
    — N’est-ce
pas toi qui es venue me chercher pour que je sauve ton père ? Ça ne te
troublait pas, alors, qu’on tue ou qu’on se fasse tuer ! Tu oublies vite
que toi aussi, tu as voulu la révolte !
    Elle
approuva d’un signe de tête.
    — Oui.
Moi aussi je suis fautive. Mais maintenant je sais. Ce n’est pas le chemin. Ce
n’est pas ainsi que nous imposerons la vie et la justice.
    — Et
comment, alors ?
    Elle ne
répondit pas. Elle grimpa dans le char et s’allongea près du corps d’Abdias.
Posant son visage contre la couverture qui le recouvrait, elle l’enlaça.
    Barabbas
et le cocher demeurèrent stupéfaits. Rekab enfin demanda :
    — Que
veux-tu que l’on fasse ? Que l’on retourne à Magdala, chez Rachel ?
    — Non,
murmura Miryem, les paupières closes. Il faut aller à Beth Zabdaï, à la maison
de Joseph. Chez les esséniens. Eux savent soigner et ressusciter.
    Rekab crut
avoir mal entendu. Ou alors que Miryem était un peu folle de fatigue. Il jeta
un regard à Barabbas, s’apprêtant à lui poser une question. Mais les larmes
coulaient sur les joues du brigand que toute la Galilée admirait.
    Rekab
baissa les yeux et prit place sur le banc du char. Il attendit un moment que
Barabbas le rejoigne.
    Comme
celui-ci ne bougeait pas, Rekab claqua les rênes sur la croupe des mules et
remit l’attelage en route.
    *
    * *
    Ils
entrèrent dans Damas un peu avant la nuit. A plusieurs reprises Rekab s’était
arrêté pour laisser reposer ses mules.
    Chaque
fois il en avait profité pour s’assurer de l’état de Miryem.
    Elle
semblait dormir, mais gardait les yeux ouverts. Ses bras demeuraient noués
autour du corps d’Abdias. Rekab avait rempli un gobelet avec l’eau d’une jarre.
    — Tu
dois boire, sinon, tu vas prendre mal.
    Miryem
l’avait regardé comme si elle le voyait à peine. Comme elle ne saisissait pas
le gobelet, il avait osé lui passer la main sous la nuque et l’approcher de ses
lèvres, la contraignant à boire ainsi qu’elle-même l’avait fait, durant la nuit
et le jour précédents, avec Abdias. Elle n’avait pas protesté. Au contraire,
elle s’était laissé faire avec une surprenante docilité, fermant les paupières
et le remerciant d’une esquisse de sourire.
    Rekab
avait été surpris par son visage. Pour la première fois, les traits de Miryem
étaient ceux d’une jeune fille et non d’une jeune femme austère au regard
intimidant.
    À l’entrée
des jardins opulents qui entouraient Damas et la noyaient dans un écrin
splendide de verdure où s’affairait la foule des bas quartiers, Rekab s’arrêta
de nouveau. Cette fois, il referma avec soin les rideaux du char.
    — Ce
n’est pas la peine qu’ils te voient, murmura-t-il en guise d’explication.
    En vérité,
il songeait surtout au cadavre d’Abdias. Que l’un des paysans l’aperçût et cela
aurait provoqué un attroupement de personnes auxquelles il serait bien
difficile de donner des explications.
    Mais
Miryem ne sembla pas l’entendre. C’est seul, un peu plus tard, qu’il s’enquit
du village de Beth Zabdaï. On le lui indiqua sans peine, à deux lieues des
faubourgs. Il était connu par tous comme le village où l’on se faisait soigner.
Et, par chance, le chemin qui y conduisait était assez large pour que Rekab
puisse y engager le char sans trop de difficultés. Situé à l’ouest de

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