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Marie

Marie

Titel: Marie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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la planchette. Le panneau bascula juste
assez pour révéler que le lieu était vide. Barabbas était parti.
    Pas depuis
longtemps, car sa chaleur était encore présente dans la laine. Le châle était
là aussi. Soigneusement plié. Si soigneusement que Miryem sourit. Comme si cela
était un signe. Un merci, peut-être.
    Miryem
n’était pas surprise que Barabbas eût disparu ainsi, sans l’attendre. Cela
s’accordait avec l’image qu’elle se faisait de lui. Incapable de tenir en
place, téméraire, ignorant la paix. Et puis il y avait la pluie, la crainte
d’être vu par les gens de Nazareth. En le découvrant dans le village, chacun
effectuerait le rapprochement avec les garçons que poursuivaient les
mercenaires d’Hérode. Qui sait si certains n’auraient pas eu le désir de se
venger de la peur qu’ils avaient éprouvée ?
    Pourtant,
en refermant la trappe, Miryem ressentit une sorte de dépit. Elle aurait aimé
revoir Barabbas. Lui parler encore. Voir son visage en plein jour.
    Il
existait peu de chances que leurs routes se croisent de nouveau. Sans doute
Barabbas éviterait-il soigneusement Nazareth, à l’avenir.
    Elle se
détourna pour rentrer dans la maison et tressaillit. Le froid, la pluie, la
peur, la rage, tout s’embrasa en elle au même instant. Ses yeux, pourtant
accoutumés à cette horreur, venaient de glisser sur trois croix de bois
dressées en surplomb du village.
    Six mois
plus tôt, les mercenaires d’Hérode y avaient attaché des « voleurs »
capturés dans les alentours. Aujourd’hui, les cadavres des suppliciés n’étaient
que des masses racornies, putréfiées, séchées, à demi dévorées par les oiseaux.
    Voilà ce
qui attendait Barabbas s’il se faisait prendre. Et voilà aussi ce qui
justifiait sa révolte.
     

 
     
     
     
     
     

Première partie An 6 avant Jésus-Christ
     

1.
    Des cris
d’enfants percèrent la torpeur du premier matin.
    — Ils
sont là ! Ils sont là !
    Dans son
atelier, Joachim était déjà au travail. Il échangea un regard avec son aide,
Lysanias. Sans se laisser distraire par ces braillements, d’un seul élan ils
soulevèrent la poutre de cèdre et la déposèrent sur l’établi.
    Lysanias
se massa les reins en gémissant. Il était trop vieux pour ces gros efforts. Si
vieux que nul, pas même lui, ne se rappelait le jour de sa naissance dans un
village lointain de Samarie. Mais Joachim travaillait en sa compagnie depuis
toujours. Il ne pouvait imaginer le remplacer par un jeune apprenti inconnu.
Lysanias lui avait enseigné le métier de la charpente autant que son père. A
tous deux, ils avaient confectionné plus d’une centaine de toits dans les
villages autour de Nazareth. Plusieurs fois, on avait réclamé leur savoir-faire
jusqu’à Sepphoris.
    Ils
entendirent des pas dans la cour alors que les clameurs des enfants
rebondissaient encore sur les murs du village. Hannah s’immobilisa sur le seuil
de l’atelier. Projetée par le soleil rasant du matin, son ombre glissa jusqu’à
leurs pieds. À son tour elle annonça :
    — Ils
sont arrivés.
    Ces mots
étaient inutiles, elle ne l’ignorait pas, mais il fallait qu’ils sortent de sa
bouche, telle une plainte de rage et d’inquiétude.
    — J’ai
entendu, soupira Joachim.
    Il n’était
pas besoin d’en dire plus. Chacun, dans le village, savait de quoi il
retournait : les percepteurs du sanhédrin entraient dans Nazareth.
    Depuis des
jours, ils parcouraient la Galilée, allant de village en village, précédés par
l’annonce de leur venue comme par la rumeur d’une peste. Et chaque fois qu’ils
quittaient une bourgade, la rumeur enflait. On eût cru qu’ils dévoraient tout
sur leur passage, ainsi que les sauterelles lancées sur l’Egypte de Pharaon par
la colère de Yhwh.
    Le vieux
Lysanias s’assit sur un plot en secouant la tête.
    — Il
ne faut plus céder devant ces charognes ! Il faut laisser Dieu décider qui Il veut châtier : eux ou nous.
    Joachim se
passa la main sur le menton, grattant sa barbe courte. La veille au soir, les
hommes du village s’étaient réunis. Chacun avait donné libre cours à sa fureur.
Comme Lysanias, ils avaient été plusieurs à vouloir qu’on ne livre plus rien
aux percepteurs. Ni grain, ni argent, ni objet. Que chacun s’avance les mains
vides et crie : « Allez-vous-en ! » Mais Joachim savait
qu’il s’agissait des mots et des rêves d’hommes en proie à la rage. Les rêves
s’évanouiraient

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