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Marseille, 1198

Marseille, 1198

Titel: Marseille, 1198 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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Un couteau de chasse pendait à sa taille et il tenait un
épieu à sanglier. Sa barbe grise et broussailleuse était salle et couverte de
poux, et s’il n’avait été édenté, il aurait fait penser à une bête sauvage.
    — Je suis un ami de Pierre, dit-il après
s’être s’éclairci la gorge.
    — Qui est Pierre ?
    — Le père du berger pendu hier. J’étais son
parrain. C’est moi qui l’ai accompagné pour ramener le corps à la chapelle
Saint-Martin. Nos seigneurs n’auraient jamais dû le faire pendre. L’enfant
n’avait rien fait de mal, accorder l’hospitalité n’est pas méchanceté. Il était
gentil et ne se rendait pas compte de ce qu’il faisait. On aurait pu le punir,
oui, mais pas le pendre.
    Son ton était si triste, si désemparé que Locksley
en fut ému.
    — Je comprends, mais pourquoi venir me
voir ?
    — Pierre veut venger son fils. Pour causer du
tort à Castillon, il m’a demandé de vous raconter quelque chose qu’il sait. Je
n’ai pas beaucoup de temps, j’ai réussi à me faire affecter à la garde du
couloir, mais le seigneur peut revenir à tout moment. Si je parle, me
donnez-vous votre parole de chevalier que vous ne révélerez rien ?
    — Où est Castillon ? demanda Locksley,
brusquement inquiet pour Anna Maria.
    — En ce moment, à la prison.
    — Je ne m’intéresse pas au seigneur
Castillon. Je ne suis qu’un voyageur qui sera parti dans un jour ou deux, mais
vous pouvez toujours parler, proposa-t-il prudemment. Je ne vous trahirai pas,
ni Pierre. Et mes amis qui sont là (il désigna la custode du lit) seront aussi
silencieux que moi.
    L’homme hocha la tête et commença. Il raconta que
Pierre et lui étaient allés à Marseille, une quinzaine plus tôt, avec toute une
troupe commandée par Castillon. Ils avaient trouvé le vicomte de Marseille,
Roncelin, dans une tour avec une femme et des serviteurs. Roncelin, surpris,
avait tenté de défendre la femme et ils avaient dû le maintenir pendant que
Castillon la violentait. Ensuite ils avaient tué tout le monde.
    Ainsi il avait devant lui l’un des assassins de
Madeleine Mont Laurier, se dit Robert de Locksley. Mais tout cela ne servait
plus à rien puisqu’il savait que Roncelin avait vendu ses parts de la vicomté.
    — En quoi cela me concerne-t-il ?
s’enquit-il avec une fausse indifférence.
    — Je n’ai pas fini, seigneur. Au retour, nous
avons croisé trois hommes avec des chevaux bien chargés. Castillon a décidé de
s’approprier leurs biens et surtout leurs chevaux qui étaient très beaux. Il
leur a demandé de les lui donner mais ils ont refusé et ont voulu se défendre.
Nous en avons tué deux et le troisième, qui a tenté de fuir, a été rattrapé et
ramené au château où il est dans un cachot de la prison. Castillon l’a
interrogé et il a dit être anglais et revenir des croisades. Il avait
d’ailleurs beaucoup d’or avec lui et on a reçu chacun trois pièces d’or. C’est
cela que Pierre veut que vous sachiez. Le seigneur détient un de vos
compatriotes, peut-être un compagnon d’armes que vous avez connu en Palestine.
    En entendant ces derniers mots, un frisson glacial
parcourut Locksley. Castillon détenait son écuyer Cédric. Certainement celui-ci
n’avait-il pas dit qu’il était l’écuyer félon d’un chevalier, sachant qu’il
pouvait être écorché vif pour ça, mais si Castillon le torturait, il pourrait
bien nommer son maître. À ce moment-là, les Baussenques apprendraient que le
comte de Huntington n’était jamais arrivé de Palestine avec Ibn Rushd !
Bien vite il serait soupçonné et il suffirait que l’on torture Hugues de Fer ou
les jongleurs pour découvrir qu’il était de ceux qui devaient délivrer Roncelin !
    Il resta pourtant impavide. Et si tout cela
n’était qu’un piège ?
    — Savez-vous le nom de cet homme ?
Est-il chevalier ? Je pourrais prévenir sa famille pour qu’elle paye une
rançon, proposa-t-il d’une voix détachée.
    — Je ne sais rien de plus, seigneur.
    — Dans ces conditions, que puis-je
faire ? Dire à votre seigneur que je sais qu’il y a un Anglais prisonnier
ici et que je veux qu’on le libère ? Vous finiriez pendu pour m’avoir
parlé ! Le délivrer ? J’en suis incapable. Je vous remercie de
m’avoir confié cela, et je remercie Pierre, mais c’est tout.
    Robert de Locksley portait une escarcelle à la
ceinture. Il l’ouvrit et en tira trois sous d’or.
    — Voici pour

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