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Marseille, 1198

Marseille, 1198

Titel: Marseille, 1198 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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l’échelle. L’entrée était
rectangulaire avec une épaisse porte cloutée ouvrant vers l’intérieur. Il
pénétra dans une salle voûtée éclairée par deux archères au fond de profondes
embrasures. Trois cadavres gisaient devant lui : une femme dénudée des
pieds à la poitrine et deux hommes, l’un le dos tranché de l’épaule à la
taille, l’autre le ventre ouvert et les entrailles visibles. La femme avait été
égorgée. L’odeur du sang et des excréments le prit à la gorge.
     

Chapitre 4
    —  A rnoux est en haut pour vérifier, mais j’ai l’impression
qu’il n’y a personne de vivant ici, dit Fer en montrant l’échelle intérieure.
    Ibn Rushd s’approcha des corps pour les examiner.
L’homme le plus près de l’échelle avait reçu un coup de hache de combat, sans
doute en tentant de fuir. L’autre avait été tué d’un coup d’estoc. C’était la
blessure d’une épée de chevalier, pas d’un couteau sarrasin.
    — Ce ne sont pas des pirates qui ont fait ça,
dit-il.
    — Je sais, fit sombrement Fer. Celui-là a été
tué avec une bardiche [15] .
D’ailleurs, on aurait vu leur navire depuis la Porte Galle.
    Il montra la table, de simples planches sur
tréteaux, sur laquelle se trouvaient les reliefs d’un repas : des restes
de galettes de pain, des os de volaille, deux gobelets de verre brisés, un
cruchon renversé.
    — Ils avaient mangé. Il y a une paillasse à
l’étage, mais pas de literie. Tout ce qu’ils avaient apporté a dû être volé.
    — Ils n’ont pas volé sa robe ! remarqua
Ibn Rushd en désignant la femme. Tu la connais ?
    Hugues hocha du chef.
    — Madeleine Mont Laurier, veuve d’un tanneur,
une des femmes les plus riches de la ville, dit-il. Il y a cinq ou six
semaines, elle est venue me demander l’autorisation de faire venir des peaux
d’Arles et d’Aguensi [16] car la demande est si forte pour les cuirs tannés à Marseille qu’elle manquait
de peaux. Mais le syndic des bouchers y était opposé, parce que cela aurait
fait baisser le prix auquel ils vendent les cuirs.
    Rushd s’accroupit pour l’examiner. Elle devait
avoir trente ans. Un visage dur aux pommettes saillantes et aux traits marqués,
un nez aquilin, des lèvres fines, des cheveux noirs serrés en tresses,
constata-t-il en se penchant sur elle. Une de ses mains était posée sur son
ventre. Il la toucha, c’était la main calleuse d’une femme qui travaillait dur.
    — A-t-elle été… demanda Hugues.
    — Oui, dit le médecin en regardant son ventre
dénudé et meurtri. Ils l’ont battue et elle s’est défendue. Ses vêtements sont
déchirés à plusieurs endroits, c’est pour cela qu’ils les lui ont laissés. Ils
lui ont aussi brisé le poignet et pour finir lui ont coupé la gorge.
    La tête était presque séparée du cou. Il souleva
un bras raide et remarqua quelle avait la gale.
    — Le sang est coagulé, très sec, ils sont
venus sans doute hier, après dîner.
    — Des rôdeurs ? Des écorcheurs ?
    — Non, ce sont des coups d’épée, ce seraient
plutôt des hommes d’armes, des routiers.
    — Il y a des bandes conduites par le comte de
Forcalquier autour d’Aguensi. Ils ont pu arriver par le chemin sans qu’on les
voie.
    — Possible…
    Ibn Rushd continua d’examiner la femme. On lui
avait arraché ses chausses et déchiré non seulement son bliaut mais aussi sa
robe de dessous. Sa peau blanche était ensanglantée. Ils s’étaient acharnés sur
elle.
    Elle avait mis une jolie robe pour mourir,
remarqua tristement le médecin. Une robe cramoisie en laine épaisse à manches
étroites. Il la rabattit sur son ventre. Elle ne portait pas de ceinture, mais
peut-être en avait-elle eu une en cuir serti d’or ou d’argent comme les riches
bourgeoises, et ils l’en avaient dépouillée. D’ailleurs, elle n’avait plus
d’escarcelle ni d’aumônière. Il remarqua alors qu’une main tenait serré un
morceau d’étoffe. Peut-être une coiffe. Il tenta de détacher le tissu, mais les
doigts de la morte s’étaient agrippés autour comme des serres.
    — Hugues, aide-moi. Je voudrais regarder la
coiffe qu’elle tient.
    Le viguier s’accroupit et parvint à écarter les
phalanges. Il prit l’étoffe et la déploya. Ce n’était pas une coiffe, juste un
morceau de tissu avec une étoile aux rayons brodés en fils d’or. Ibn Rushd
compta seize rayons et interrogea son ami du regard.
    Hugues de Fer s’était redressé, pâle

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