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Marseille, 1198

Marseille, 1198

Titel: Marseille, 1198 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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remarqua Bartolomeo d’une voix désespérée.
    Son ton geignard arracha un sourire à Guilhem,
mais pas à Anna Maria qui restait prostrée sur sa paillasse.
    — J’ai déjà été emprisonné, mes amis, leur
dit Guilhem pour les rassurer. La prison n’est pas la mort, gardez
espoir ! Nos compagnons sont libres et sont près de nous. Ils ne vont pas
nous abandonner.
    — À voir la sollicitude du seigneur de
Locksley pour Baralle des Baux, j’en doute, répliqua aigrement Anna Maria.
    — Seriez-vous jalouse, Anna ? s’enquit
Guilhem en se forçant à pouffer.
    Comme elle ne répondait pas, il ajouta plus
gravement :
    — Vous lui faites un mauvais procès.
Vous-même, n’avez-vous rien à vous reprocher ? Avez-vous toujours été
loyale envers lui ?
    — Que voulez-vous dire ? lança-t-elle,
sur la défensive.
    — Vous lui avez caché que vous étiez au
service d’Innocent III.
    Il ne put la voir pâlir, car il n’y avait aucune
lumière dans la pièce, mais son silence était une réponse. Bartolomeo n’ouvrit
pas plus la bouche.
    — Depuis quand le savez-vous ?
demanda-t-elle enfin.
    — Depuis que j’ai découvert la lettre dans
votre psaltérion.
    — Vous l’avez lue ? demanda Bartolomeo.
    — Non, mais vous pouvez maintenant me dire de
quoi il s’agit. Si nous voulons sortir d’ici, il serait temps de nous faire
confiance.
    Elle lui raconta tout, jugeant que cela n’avait
plus d’importance.
    — Quand nous serons interrogés par Hugues des
Baux, vous direz que Fer vous a payés pour l’accompagner, que vous deviez
seulement essayer de le faire entrer dans le château. En ce qui me concerne,
pleurez, suppliez, et jurez que vous m’avez vraiment rencontré à Sallone pour
la première fois.
    — Vous croyez que cela suffira pour qu’il ne
vous pende pas ? demanda-t-elle avec une ombre de mépris.
    — Peut-être pas, mais je ferai tout pour
qu’il me croie, soyez-en sûre.
    Le lendemain, leur estomac criait famine quand on
vint les chercher. Les gardes leur attachèrent les poignets et les conduisirent
à la grande salle. Devant les arcades de la cour, presque toute la population
du château s’était rassemblée, avide du prochain spectacle.
    Dans la salle basse, la table avait été démontée
et Hugues des Baux était installé sur sa cathèdre avec, derrière lui, Monteil
tenant un épieu à sanglier. À sa droite se tenait Rostang de Castillon et à sa
gauche Robert de Locksley. Guilhem en fut stupéfait. Autour deux, sur des
chaises, étaient assis les quatre chevaliers du château et le chapelain Basile.
En face, à l’autre bout de la pièce, deux douzaines de gardes et une vingtaine
de serviteurs attendaient sur des bancs pour assister au jugement.
    Entre eux, debout, attachés aussi, attendaient
Hugues de Fer et un adolescent difforme et boutonneux.
    Guilhem le reconnut. C’était le fils de Pierre, le
neveu d’Antoine qui l’avait hébergé, le jeune berger avec qui il avait fait un
bout de chemin le jour de son départ de Saint-Martin. Que faisait-il là ?
Pourquoi était-il attaché ? Il balaya la salle des yeux, cherchant son
père, Pierre, sans l’apercevoir.
    Dès l’aurore, Robert de Locksley avait en effet
été prévenu par Raimbaud de Cavaillon que le seigneur des Baux voulait qu’il
assiste au procès. Il n’en fut pas trop surpris, car il était fréquent qu’un
hôte prestigieux, de passage dans un château, soit associé comme juge dans des
procédures pénales. Cela permettait de donner plus de solennité à la décision.
Toutefois, quand il arriva, afin de bien jouer son rôle, Locksley demanda qu’on
lui explique de quoi il retournait. Il posa même quelques questions pour donner
l’impression qu’il était totalement étranger à l’affaire.
    Quand ils furent tous installés, Basile se leva
pour prendre la parole.
    — Nous sommes réunis ce matin autour de notre
seigneur pour juger des félons ayant abusé de son hospitalité afin de causer du
tort aux gens des Baux. Nous aurons aussi à décider du sort de Hugues de Fer,
viguier de Marseille, qui voulait pénétrer par ruse et félonie dans le château,
et de celui d’un de nos vilains qui a trahi son maître.
    Le visage tout bouffi de son importance, il balaya
l’assistance d’un regard sévère et s’assit.
    — En ce jour de jugement, où nous déciderons
de la vie ou de la mort, j’ai demandé à mon frère et au valeureux comte de
Huntington qui revient de la

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