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Mathieu et l'affaire Aurore

Mathieu et l'affaire Aurore

Titel: Mathieu et l'affaire Aurore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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le nez de l’accusée le fameux manche de hache, mais aussi le fouet, les harts, le tisonnier, le fer à friser, la corde tressée. Les douze jurés apprenaient à faire le lien entre ces instruments de torture et les sévices constatés sur le cadavre.
    — Sur ce manche de fourche, docteur, on voit encore des marques rouges. Pouvez-vous me dire ce que c’est?
    L’homme déplaça ses lunettes sur son nez, plissa le front, puis répondit :
    — Cela peut bien être du sang. Je ne peux dire cependant si c’est celui d’un humain ou d’un animal.
    — Quelle horreur ! s’exclama quelqu’un dans la salle. La marâtre l’a battue avec ça !
    Le qualificatif, sans cesse repris dans la presse, collerait pour toujours à la peau de l’accusée. Le juge fit claquer son maillet deux fois, puis il promena un regard sévère sur l’assistance, pour l’amener à plus de retenue.
    — En soi, si je vous comprends bien, énonça avec soin le substitut du procureur général, aucune de ces blessures ne pouvait entraîner la mort ?
    — Non, mais leur accumulation devait plonger la petite fille dans un état d’extrême faiblesse.
    — Si l’accusée lui avait fait donner des soins, aurait-elle pu survivre ?
    — Oui, sans doute.
    Mathieu apprécia la prudence de son patron. Si les jurés trouvaient finalement les châtiments adaptés aux turpitudes de l’enfant,
    un
    verdict
    d’homicide
    involontaire
    pour
    ne pas avoir porté secours à une personne en danger demeurerait toujours possible.
    — Dans votre rapport, vous avez fait état d’une rougeur anormale de l’estomac.
    — Oui, en effet. La recherche de poison n’a toutefois rien donné.
    — Croyez-vous que l’ingestion de Lessi puisse en être la cause ?
    Dans l’esprit des spectateurs, la question prit son sens lentement, puis des personnes placèrent la main devant la bouche, pour réprimer un haut-le-cœur.
    — Objection, Votre Honneur, dit Francœur en se levant.
    Voilà une question hypothétique.
    — Je suis toutefois intéressé à connaître la réponse, rétorqua le juge.
    — C’est un produit irritant, reprit le médecin. Je crois que cela a pu donner cette teinte à la muqueuse.
    Le substitut du procureur, par ses questions, mettait le jury en attente. Les témoins suivants transformeraient les doutes en certitudes.
    — Si aucun poison n’a été trouvé, si les blessures n’étaient pas mortelles en elles-mêmes, quelle est la cause du décès ?

    — Une septicémie généralisée.
    — Pour des oreilles non éduquées comme les miennes, pouvez-vous traduire cela en français ?
    — Un empoisonnement de tout le corps.
    Cela ne se révélait pas vraiment plus clair. Fitzpatrick entreprit de jouer au pédagogue.
    — Un peu comme une blessure infectée ?
    — Oui, sauf qu’elle avait des dizaines de blessures.
    — Docteur, intervint le juge, pouvez-vous nous en donner le nombre exact?
    — Je le pourrais, en consultant toutes mes notes.
    Mais le docteur n’avait pas celles-ci sous les yeux, il hésitait à donner une approximation.
    — Si vous voulez bien effectuer cette addition, décida le juge, et nous faire connaître la somme, la cour vous en sera reconnaissante.
    Cela valait un ordre formel : dès son retour à son cabinet, le médecin s’exécuterait.
    — Dans la vie de tous les jours, reprit Fitzpatrick, comment
    pourrais-je
    constater
    qu’une
    blessure
    s’est
    infectée ?
    — Habituellement, la présence de pus...
    — Vous parlez de ce liquide jaune verdâtre ? Avez-vous vu du pus dans les blessures de la victime ?
    — Ah ! Monsieur, c’est pour cela que je parle de septicémie généralisée. La peau se décollait de la chair en plusieurs endroits, tellement il y en avait. En pressant sur les jambes, les cuisses, je faisais sortir le pus en grande quantité.
    De nombreux visages pâlirent, les haut-le-cœur se multiplièrent.
    — Une blessure en particulier paraissait très purulente, à la lecture de votre rapport, suggéra le procureur. Parlez-nous-en.

    — Deux blessures à la tête, en réalité : l’une au front, l’autre au sommet. Dans les deux cas, la peau se détachait du crâne et, dessous, j’ai trouvé l’os tout rongé, un peu comme le fer sous l’effet d’un acide puissant. Un liquide verdâtre mêlé de sang envahissait ces endroits. .
    — Vous avez une idée de l’abondance de ce liquide ?
    — Seulement sur le dessus de la tête, j’ai récolté plus de six onces de pus.
    Un «Oh !

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