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Mathieu et l'affaire Aurore

Mathieu et l'affaire Aurore

Titel: Mathieu et l'affaire Aurore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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chambre, sur un sac de sel. La petite est descendue. Quand elle est passée devant la pièce, j’ai pris ce rondin pour la remonter. » Elle a dit : « Quand elle a été en haut, elle n’a pas eu envie de descendre de la nuit. »
    « Si les jurés se souviennent de la blessure à la tête, pensa Mathieu, ils trouveront là une explication. » Fitzpatrick ne chercha pourtant pas à établir la date de l’événement pour relier ces informations.
    Le substitut du procureur conclut son interrogatoire par un rappel des différentes visites effectuées chez les Gagnon après les funérailles d’Aurore. Cela lui permit de faire corroborer le récit du détective Couture sur l’état des lieux et les diverses pièces à conviction.
    — J’en ai terminé, Votre Honneur, déclara-t-il à la fin.
    — Maître Francoeur, avez-vous des questions ?
    Autant l’avocat de la défense avait semblé nonchalant avec les deux témoins précédents, autant il parut déterminé en s’avançant vers la paysanne. Son premier souci fut de mettre en évidence un antagonisme entre les deux voisines.
    — Depuis que l’accusée demeure chez Télesphore Gagnon, vous êtes-vous fréquentées régulièrement ?
    — Pas beaucoup, les premières années. Pendant les deux ans où elle n’était pas mariée, je n’y allais pas.
    — Vous n’y alliez pas ?
    — Non.
    L’homme fronça les sourcils, comme devant un manque de civisme inconcevable.
    — C’était pourtant votre voisine la plus proche.
    — N’empêche, je n’y allais pas.
    Francœur hocha la tête, comme si une idée lui venait soudainement.
    — Elle demeurait chez lui sans être mariée.
    — Bien, soi-disant, oui.
    — Pourquoi dites-vous cela ? Vous connaissiez bien leur situation, madame.
    — Bien, vous savez, ce n’est pas moi qui l’ai mariée.
    La répartie provoqua un éclat de rire, la paysanne parut fière de la vivacité de son esprit. L’avocat arbora un petit sourire satisfait.
    — Vous savez aussi que la première femme de Télesphore Gagnon était alors internée à l’asile de Beauport, n’est-ce pas? — Oui.
    — Et vous saviez aussi qu’en plus, l’accusée, ici, était la cousine de cette femme ?
    — Oui.
    «Bon Dieu, pensa Mathieu, existe-t-il deux personnes non apparentées, dans cette paroisse?» Tous ces détails ne rendaient pas l’accusée bien sympathique. Toutefois, le jeune homme commençait à comprendre la stratégie de l’avocat .
    — Cette parenté tient à son premier mariage, n’est-ce pas ? Nous parlons ici de cousines par alliance.
    — De cousines. Je ne connais pas les détails.
    — Quand sa femme a été internée à Beauport, Télesphore lui a demandé de venir pour s’occuper des enfants.
    — A cette époque, aucun enfant ne se trouvait dans la maison.
    Francœur parut un peu surpris. Avait-il négligé de bien faire ses devoirs ?
    — N’y avait-il pas un bébé ? demanda-t-il.
    — Non. Elle est arrivée en hiver, et le bébé au mois de mai, je pense.
    Le petit garçon décédé en 1919 était donc né à l’hôpital, puis la direction de l’établissement l’avait envoyé à la maison après le sevrage. Mathieu s’en voulut un peu de ne pas avoir tiré cela au clair lui-même.

    — Vous jurez ça, vous ?
    Francœur adoptait le ton du défi, la femme le dévisagea sans répondre. Il n’insista pas.
    — Mais elle, elle avait deux garçons.
    — Ils n’étaient pas avec elle. Des membres de sa famille s’en occupaient.
    — Vous êtes positive, madame ?
    — Oui.
    Ce genre de renseignements ne pouvait échapper à une voisine. Marie-Anne Houde était venue s’occuper de la maison de Télesphore. Au début, aucun enfant ne pouvait justifier sa présence. Les voisins demeuraient libres de supputer ses motifs réels.
    — Pendant ces deux ans, vous ne l’avez pas visitée ?
    — Peut-être une fois, au printemps.
    — Dans ce temps-là, vous n’aimiez pas beaucoup l’accusée.
    — Je ne la haïssais pas non plus.
    Un ricanement cynique accueillit sa réplique. Bien campée derrière la barre des témoins, elle relevait le menton et défiait son interlocuteur du regard.
    — Etes-vous certaine de ça ?
    — Comme ça n’adonnait pas, on n’y allait pas.
    — En réalité, vous prétendiez que Télesphore vivait en concubinage avec elle. A cause de cela, vous ne vouliez pas pénétrer dans cette maison.
    — On n’était juste pas sorteux.
    A la campagne ou à la ville, des comportements moraux

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