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Même les oiseaux se sont tus

Titel: Même les oiseaux se sont tus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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les yeux et, pour la première fois depuis l’attaque de Jan, saisit le regard de la proie.
    – Jan! Jan! Il étouffe.
    Jan fit un signe de tête pour lui faire comprendre qu’il était à peu près temps, les forces commençant à lui manquer.
    – Jan! Je crois qu’il est polonais.
    Jan relâcha son emprise de quelques millimètres et le jeune homme commença à tousser et à cracher. Ils le virent faire un effort pour parler et l’entendirent distinctement dire qu’il venait de Varsovie.
    Ces mots électrisèrent Élisabeth et son frère. Jan lâcha tout et l’étranger tomba à ses pieds, étouffé, les mains sur sa gorge qu’il essayait de soulager de la douleur aiguë qui lui avait presque écrasé la pomme d’Adam après avoir mordu dans les chairs.
    Élisabeth se ressaisit et courut en boitillant vers la rivière, attrapa deux morceaux de drap que Jan avait mis à sécher, les trempa dans l’eau fraîche et revint vers les deux garçons qui se roulaient par terre. Jan de peur et d’épuisement, l’autre de peur et de douleur.
    Élisabeth prit d’abord soin de son frère, lui tamponnant la lèvre avec le coton et essuyant le sang mêlé de salive qui lui coulait jusque sous le menton. Elle se dirigea ensuite vers le jeune homme, qui respirait péniblement tout en les regardant encore d’un œil incrédule et affolé. Elle se mit à genoux à ses côtés, lui demanda de pencher la tête vers l’arrière et lui essuya le cou le plus doucement possible, le simple effleurement de ses mains semblant causer une douleur atroce.
    – Je suis désolée.
    Il la regarda et tenta un malhabile sourire avant de répondre d’une voix rauque qu’elle ne pouvait l’être autant que lui. Jan les observait, et les nerfs complètement déroulés, éclata de rire, au grand étonnement d’Élisabeth.
    – Qu’est-ce qu’il y a de si drôle, Jan?
    – Tout ça. Je n’ai jamais eu aussi peur. Et pour rien.
    Le jeune homme haussa les épaules, hésitant à trouver cela drôle. Il avait la fatigue de tant et tant de jours et de nuits de marche. S’il avait réussi à glaner quelques heures de sommeil ici et là, il n’avait jamais pu fermer les yeux sans se demander si quelqu’un n’en profiterait pas pour lui enfoncer un couteau dans le cœur ou lui tirer une balle dans la tête.
    – Mon nom est Marek. Je marche seul depuis Varsovie.
    Jan parvint à se relever et se dirigea vers la rivière pour s’y tremper toute la figure. Élisabeth le suivit et rinça les morceaux de drap souillés.
    – Et si ma sœur et moi nous vous offrions de dormir toute la journée? Nous ferions le guet.
    Marek les regarda tour à tour et se demanda s’il pouvait leur faire confiance.
    – Je ne sais pas. Avec votre broche qui…
    – Ma corde…
    – Une corde?
    – Une corde de violoncelle. Plus précisément la corde du
do
.
    – Vous jouez du violoncelle?
    – Non, de l’alto.
    Marek avait la voix de plus en plus éraillée et il se tut. Il s’abandonna enfin et ferma les yeux. Élisabeth partit dans les sous-bois chercher son violon. Jan la regarda en grimaçant.
    – Penses-tu que ce soit une bonne idée?
    – Il me semble que ce garçon mérite un peu de musique. Nous l’avons presque tué, Jan.
    – Nous venons de lui sauver la vie. Nous n’allons pas attirer l’attention avec du violon, Élisabeth.
    – Une fois!
    – Non. D’autant plus qu’il pourrait penser que nous l’avons tué et qu’il entend la musique des anges.
    – Cesse de dire des idioties. Moi, je pense à Jerzy. Ils doivent avoir le même âge.
    Jan regarda le jeune homme de nouveau et eut de la difficulté à penser que son frère pouvait être devenu si vieux.
    Marek dormit comme un enfant, surveillé d’abord par Élisabeth armée d’un étui à violon, et ensuite par Jan. Élisabeth s’était elle-même allongée et ils ne s’éveillèrent que lorsque la faim les tenailla au point de les empêcher de dormir. Dès qu’Élisabeth ouvrit les yeux, elle aperçut Marek et, pour la première fois de sa nouvelle vie, alla à la rivière pour regarder son reflet, tenta de se peigner et ajusta ses vêtements dumieux qu’elle put. Jan l’avait regardée faire en hochant la tête, se demandant si sa sœur, tout à coup, ne se prenait pas pour une femme. Ils mirent beaucoup de temps à refaire leurs bandages et ils enfilèrent leurs chaussures en grimaçant.
    Quand, à son tour, Marek s’était levé, il avait plongé dans la rivière, au grand

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