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Métronome

Métronome

Titel: Métronome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lorànt Deutsch
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l’ancien collège de Fortet, fondé en 1394. Silence et luminosité pour cette brèche historique à ciel ouvert au cœur de Paris. Et les volées de cet escalier qui s’élancent, n’en finissent pas, vous donnent des envies d’échapper au monde… C’est justement ce qu’a fait l’élève Jean Calvin, un jour qu’il était poursuivi pour hérésie. Le plus célèbre étudiant de ce collège a gagné les toits pour s’enfuir vers Genève, où il a élaboré sa théorie réformée. Ironie du sort, ce collège de Fortet devint le lieu de naissance funeste d’un mouvement contre-réformiste : la fameuse Sainte Ligue catholique du duc de Guise, créée en 1572, instigatrice de la Saint-Barthélemy.
    À l’opposé de ce radicalisme, le collège Sainte-Barbe, connu pour son ouverture d’esprit, enseigna une discipline aujourd’hui un peu oubliée : la logique. Ce collège se trouve dans la rue Valette et a absorbé l’ancien collège de Coqueret, célèbre pour avoir formé les poètes de la Renaissance Joachim du Bellay et Pierre de Ronsard.
    En 1229, alors que Philippe Auguste est mort depuis six ans, que Louis VIII est mort depuis trois ans et que la France vit sous la régence de Blanche de Castille en attendant la majorité de Louis IX, l’Université se révolte. Les écoliers de ce temps-là ont fort mauvaise réputation : ces jeunes gens, censés représenter l’élite de la nation, font si peur aux bourgeois de Paris que, le soir, les rues sont désertes… On accuse, parfois à raison, les étudiants de voler pour survivre, d’enlever des femmes à travers la ville pour assouvir leurs bas instincts et même de tuer à l’occasion. Pour tenter d’imposer le calme, l’évêque de Paris, Guillaume de Seignelay, menace d’excommunier ceux qui se promèneraient armés. Mais les gaillards se fichent pas mal d’un tel anathème, et poursuivent allègrement leurs exactions. L’évêque se fâche, il ordonne l’arrestation des plus violents et en fait bannir d’autres, qu’il aillent se faire pendre ailleurs.
    Au mois de février de cette année 1229, le jour du lundi gras, après le carnaval, une bande d’écoliers vient s’abreuver de vin chez un cabaretier du faubourg Saint-Marcel. En fin de soirée, passablement éméchés, ils entament une discussion animée sur le prix de la boisson, un peu trop élevé pour leur bourse. Bien vite, le débat pécuniaire s’envenime, le ton monte, aux mots succèdent les coups… Le tavernier gueule, il gueule si fort que des hommes costauds accourent de tout le quartier. Une bataille rangée entre étudiants et Parisiens se déroule dans la nuit, et finalement les mauvais garçons se voient plutôt rudement chassés.

Le lendemain, les écoliers humiliés viennent investir la fameuse taverne du faubourg Saint-Marcel. Armés de bâtons, ils mettent à sac la boutique, et s’en vont de rue en rue à l’assaut d’autres boutiques. Sur leur chemin, ils passent à tabac bourgeois et bourgeoises rencontrés, blessant et tuant au hasard de leur rage.
    Le scandale soulevé par ces excès traverse Paris, et parvient jusqu’à la régente. Celle-ci déclare sans ambages donner raison aux bourgeois contre les étudiants et charge sergents et archers de « châtier les écoliers de l’Université ».
    Rien ne ressemble plus à un étudiant qu’un autre étudiant, alors les gens d’armes ne se préoccupent guère de retrouver les véritables coupables : ils s’en vont gaiement vers les remparts attaquer quelques écoliers qui traînent par là. Armés et casqués, les envoyés de la régente tombent sur ce petit groupe, tuent plusieurs jeunes gens, blessent quelques autres et détroussent tout le monde.
    L’Université de Paris s’estime aussitôt bafouée. Ses privilèges sont mis à bas, son indépendance est contestée, ses étudiants sont menacés. Bref, le savoir universel semble vaciller ! Pour faire pression sur les autorités, maîtres et élèves usent d’un moyen nouveau : ils cessent de travailler ! Aussitôt, l’enseignement est suspendu et les écoles se vident. Le mot « grève » n’apparaîtra que six siècles plus tard, mais déjà il s’agit d’un conflit dur et sans concession. Maîtres et élèves quittent Paris pour aller enseigner ou étudier ailleurs. Angers, Orléans, Toulouse, Poitiers se réjouissent de récupérer à leur profit la splendide réputation de l’université parisienne. Même le roi

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