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Meurtres dans le sanctuaire

Meurtres dans le sanctuaire

Titel: Meurtres dans le sanctuaire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: C.L. Grace
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Aussitôt Thomasina saisit sa maîtresse par le bras. Dans la Grand-Rue, la clameur s’était tue, et les gens s’écartaient pour laisser le passage à une très volumineuse charrette tirée par deux grands chevaux noirs arborant un maigre plumet rouge entre les oreilles. Le cocher portait sur le visage un masque rouge où l’on avait grossièrement taillé des fentes pour la bouche et les yeux, ainsi qu’une capuche noire. Un collier d’ossements d’animaux pendait à son cou. À son côté, un jeune garçon pareillement accoutré battait une marche funèbre sur un petit tambour.
    — Doux Jésus, protège-nous, souffla Thomasina.
    La charrette du bourreau se frayait un chemin en direction de Westgate. Quand elle passa près de Kathryn, le drap souillé qui la recouvrait glissa, et la jeune femme sentit son coeur se soulever en apercevant les têtes décapitées et les débris humains ensanglantés sur lesquels on avait jeté du gros sel.
    — Que Dieu prenne en pitié ces pauvres défunts ! s’exclama-t-elle.
    — On les charrie hors de la ville, murmura quelqu’un, à côté d’elle.
    — Qui sont-ils ? demanda Thomasina. Ce fut Kathryn qui répondit :
    — Des traîtres qui ont soutenu la maison de Lancastre durant la guerre récente. Des shérifs, des seigneurs, des notables.
    — Et ils n’ont toujours pas pris Nicholas Faunte ! s’écria un marchand ambulant.
    — Qu’importe ! cria Thomasina en retour. La guerre est finie, les victoires s’accompagnent toujours de bains de sang, puis la vie reprend son cours.
    Malgré le très beau temps, le passage du bourreau avait causé un choc dans la foule devenue silencieuse. Même les riches dans leurs coûteux vêtements retenus par des ceintures brodées se parlaient maintenant à voix basse. Kathryn continua à se frayer son chemin jusqu’au Guildhall.
    Devant la bâtisse, au milieu des soldats portant la livrée des York, Kathryn repéra Colum qui l’attendait, en grande conversation avec un sergent. Ce dernier, l’archétype du soldat de métier, avec son crâne chauve et son corps trapu et épais, arborait les couleurs du roi. Se tournant, Colum aperçut Kathryn et lui fit signe d’approcher.
    — Comment allez-vous, Maîtresse Swinbrooke ?
    — Très bien, par ce beau temps.
    Kathryn regarda par-dessus son épaule et ajouta :
    — Nous avons croisé la charrette du bourreau. On avait l’impression de voir passer la Mort en personne.
    — On a exécuté les traîtres hier, sur la place du marché de Maidstone, expliqua le sergent. Sitôt qu’on aura capturé Faunte, et nous savons qu’il se cache quelque part dans les forêts du Kent...
    L’homme se tourna pour cracher par terre et termina :
    — ... Pour nous autres soldats, ce sera fini. Ne resteront que quelques favoris du roi comme vous, l’Irlandais.
    Colum grimaça un sourire qui détendit son visage crispé.
    — Maîtresse Swinbrooke, je vous présente Maître Holbech, sergent de formation, de parents inconnus et originaire du Yorkshire.
    Les yeux bleus du soldat croisèrent ceux de Kathryn, et Holbech inclina légèrement la tête, murmurant :
    — À votre service, Maîtresse.
    Kathryn sourit tandis que, derrière elle, Thomasina toussait et marmonnait assez fort pour être clairement entendue :
    — Un de plus pour le bourreau !
    Se détournant, le sergent lui fit un clin d’oeil et passa la langue sur ses lèvres épaisses.
    — Ne vous avisez pas de porter la main sur moi ! le mit en garde la servante.
    Sentant l’hostilité entre eux, Colum reprit sans attendre :
    — Maître Holbech a été démobilisé de l’armée royale. Je l’ai engagé pour m’aider à Kingsmead, en compagnie de quelques autres pendards, libres depuis que la guerre est finie. Le corps de logis de Kingsmead n’est plusqu’une ruine. Il nous faut des charpentiers, des ferronniers, des forgerons, des artisans de toute sorte et Holbech sait tout faire : il pourrait cueillir une rose dans le jardin de la reine sans qu’elle le remarque. Sous la louange, Holbech se rengorgea. À cet instant, une femme pourvue d’une opulente chevelure rousse qui retombait dans son dos sortit de l’église Sainte-Hélène et traversa la rue en courant pour le saisir par le bras. Dans son visage tout pâle au menton pointu, ses yeux d’ambre évoquaient ceux d’un chat. Malgré le vilain sarrau trop grand pour elle, on devinait les courbes généreuses de ses hanches et de ses seins,

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