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Monestarium

Monestarium

Titel: Monestarium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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sur les vergers et les
pressoirs.
    — Comment ferons-nous pour
passer l’enceinte ? murmura Henriette. Il fait un froid de gueux !
    — Suis-moi. J’ai préparé notre
équipée dès après tierce*.
    Elles filèrent en direction des
étables. La palissade de hautes planches de châtaignier s’interrompait le long
de leur mur. Une porte fermée d’une clenche, impossible à ouvrir de leur côté,
permettait aux « autres », aux semainières d’étable du cloître
Saint-Joseph, de rejoindre La Madeleine. Cependant, on ne les y voyait guère.
Claire récupéra la lame qu’elle avait dissimulée en bas du mur, dans les herbes
folles, et l’inséra entre le chambranle et la porte. La clenche se souleva.
    L’odeur tiède et accueillante des
bêtes les environna. Une dizaine de vaches d’un beau roux sombre les suivirent
de leur regard étonné.
    Les deux femmes ressortirent de
« l’autre » côté. Elles dépassèrent la babillerie et longèrent le
noviciat, inspectant le bas des murs à la recherche d’une entrée dissimulée ou
d’un soupirail. En vain. Henriette souffla de dépit :
    — Rien n’évoque l’entrée des
souterrains…
    Claire ne l’écoutait plus, examinant
le mur qui leur faisait face.
    — Attends, derrière ce mur
devraient se trouver l’escalier des dortoirs…
    — En effet.
    — Or, c’est impossible puisque
le passage qui longe le mur des étuves et relie les jardins de l’infirmerie à
ceux du cloître Saint-Joseph débouche bien avant la façade du noviciat. Se
trouve ensuite l’escalier qui monte au dortoir principal qui ne doit guère
excéder une demi-toise de large. Pourtant, l’espace que délimite ce mur devant
nous doit mesurer une bonne toise de longueur. Où donc est passée la demi-toise
manquante ? Elle dissimule l’entrée des souterrains, je le parierais. Il
nous faut remonter jusqu’au passage de l’infirmerie et traverser ses jardins.
    — Ah mon Dieu, et si l’on nous
surprenait !
    Contrairement à la crainte
d’Henriette, la repartie de Claire fut douce :
    — Nous aurons droit à un long
sermon. Ce ne sera pas le premier. Toutefois, je souhaite de tout cœur que ce
soit le dernier. Pour la vie.
     
    L’agonie du rat désigné d’une croix
dura deux jours. Il se tassa dans le fond du récipient et n’en bougea que
lorsque l’air se refusa à ses poumons. Il fonça alors, griffant les parois de
terre cuite, tentant de les escalader, glissant, pour repartir à l’assaut,
ouvrant large la gueule, se débattant jusqu’au bout contre la paralysie qui
l’asphyxiait. L’autre rongeur, celui auquel Hermione avait offert sa nouvelle
préparation, semblait absent. Il demeura prostré de longues heures. Le
troisième matin, il s’ébroua et tenta de sortir, tout à fait remis. Un serviteur
laïc vint chercher le pot afin de noyer l’animal.
    La fin d’Aliénor de Ludain
s’éternisa cinq nuits durant lesquelles toutes se relayèrent à son chevet. Aux
vives douleurs de ventre avait succédé une prostration dont elle ne sortait,
par intermittence, que pour marmonner des bribes de phrases inintelligibles.
    Hucdeline ne fit que quelques brèves
apparitions dans le chauffoir, étouffant du brasier que l’on y maintenait en
permanence, irrespirable des odeurs d’excréments et de sueur malsaine. À chaque
visite, elle s’immobilisa à cinq pas de la mourante, comme si elle redoutait la
contagion, murmurant :
    — Vous allez vous remettre, ma
chère. Vous me semblez déjà plus vive.
    L’espace d’un fugace instant,
Marie-Gillette crut lire une véritable terreur dans son regard, remplacée bien
vite par une sorte de glace.
    Mademoiselle d’Andremont ne quittait
guère le chauffoir que pour se rendre aux offices ou se reposer quelques heures
dans sa cellule toilée du dortoir. Il lui arrivait de sauter des repas sans que
la faim ne la tenaille. Une sorte d’inertie l’engourdissait. Un néant, somme
toute agréable, accaparait son esprit, repoussant toute velléité de réflexion.
Elle ne veillait pas la sous-prieure. Elle attendait, elle ne savait quoi. Pour
la première fois depuis quatre ans, la peur l’avait abandonnée. D’un coup. Lors
de cet interrogatoire dans le scriptorium. Sans même qu’elle s’en rende compte
sur le moment. Elle en était sortie comme happée par le vide, marchant sans
avoir la moindre conscience de ses mouvements. Depuis, elle attendait donc. Une
seule certitude l’habitait : tout se nouait

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