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Montségur et l'enigme cathare

Montségur et l'enigme cathare

Titel: Montségur et l'enigme cathare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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plus
connue sous le nom d’ amour courtois , n’a rien
de « platonique », rien de chaste ; il s’agit avant tout d’une quête d’amour aux allures initiatiques et aux règles
très précises dont la principale est qu’un chevalier ou une dame ne doit jamais
aimer au-dessous de son rang sous peine de déchéance. Or, d’après le discours
de Trévrizent, « le roi du Graal qui recherche l’amour d’une femme autre
que celle dont le nom est apparu sur la pierre est voué à une dure expiation… Son
cri de guerre était “Amor !”… Dans un combat singulier, il fut blessé en
ses parties viriles par une lance empoisonnée », et cela parce qu’il a osé
aimer une femme qui n’était pas acceptée par le Graal, donc par la communauté
des gardiens du Graal. Il a déchu. Voilà pourquoi Anfortas est blessé et ne
peut guérir par aucune médecine. Il ne peut être délivré que par le chevalier
qui lui posera la question : De quoi souffres-tu ? Alors, il sera
obligé de répondre et d’ avouer son péché . Sa
guérison est liée à un aveu qui néantise sa culpabilité, qui lui fait retrouver
l’état angélique qui était le sien avant la chute. Tout cela reste encore
parfaitement conforme à la doctrine cathare. Et lorsque Kundry la Sorcière, messagère
du Graal, annonce à Parzival que son nom est apparu sur la Pierre, elle s’exprime
ainsi : « Une inscription est apparue sur la pierre et elle ordonne
que tu deviennes roi du Graal. Condwiramur, ton épouse, et ton fils Lohengrin
sont appelés au château du Graal en même temps que toi. » Kundry prend
donc bien soin de préciser que l’épouse de Parzival est agréée : il ne
risquera pas de déchoir en aimant une femme indigne de lui. Et Kundry se met à
délirer astrologiquement en donnant aux étoiles leurs noms arabes qui « étaient
connus du noble et riche Vairefils, qui, noir et blanc tout ensemble, se tenait
assis près d’elle » (trad. Tonnelat, II, pp. 298-299).
    Maintenant, tout est en place. Parzival a déjoué les enchantements
de Klingsor, doublet maléfique d’Anfortas, et dont le château est un faux
Montsalvage. Klingsor, apprend-on, est un ancien duc de Mantoue, châtré par un
roi dont il avait séduit l’épouse. Sa blessure est inguérissable, et il s’est
adonné à la magie afin de se venger sur les autres hommes de l’affront qu’il a
subi. Il fait penser à Khronos châtré et enchaîné par Zeus. Et ce n’est d’ailleurs
pas Parzival, mais Gauvain, comme cela apparaît dans le Peredur gallois, qui, en véritable divinité solaire,
illumine les zones ombreuses du château de Klingsor, éveille les endormis, libère
les chevaliers qui y sont prisonniers, préparant ainsi le passage de Parzival.
    C’est après toutes ces aventures que Parzival peut poser la
question à Anfortas. Celui-ci répond, et il est guéri. Parzival est intronisé
roi du Graal. Son frère Vairefils épousera Repense de Joie, la porteuse de
Graal, et partira avec elle en Orient : ils auront un fils qui sera le
fameux Prêtre Jean, fondateur d’un fabuleux royaume du côté de l’Éthiopie. Quant
au fils de Parzival, Lohengrin – plus exactement le « Lorrain Garin »,
héros de plusieurs chansons de geste –, il deviendra le célèbre « Chevalier
au Cygne » et l’ancêtre mythique de Godefroi de Bouillon ainsi que des
ducs de Lorraine, dont les Guise sont les descendants, éternels prétendants à
la couronne de France. Tout se passe comme si Wolfram von Eschenbach voulait
établir une lignée royale et divine à travers le symbole du Graal.
    Mais la leçon qu’on peut tirer de cette œuvre vaste et composite,
c’est que l’accès au mystérieux château de Montsalvage ne s’obtient pas par une
ascèse personnelle, comme cela apparaît dans les autres versions de la légende.
C’est par un choix qui ne dépend pas du héros qu’on est admis à Montsalvage, par
une sorte de cooptation camouflée en prodige inscrit sur la pierre.
    Il y a là une tendance très nette à un élitisme forcené, à
une exaltation d’une race élue, choisie par Dieu – ou par le Diable ! – pour
accomplir une mission sacrée qui n’est pas seulement la garde du Graal, mais la
régénération de l’humanité.
    Par quels moyens ? Tout est là.
    Le Graal, répétons-le, est un « récipient », même
quand il apparaît sous forme de pierre. Et il contient du sang . Or, selon la croyance hébraïque, le sang est
le véhicule

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