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Mort à Devil's Acre

Mort à Devil's Acre

Titel: Mort à Devil's Acre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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C’est aux mères, par
tradition, qu’incombe le soin d’instruire leurs filles des choses du mariage. Pour
un père, c’est une tâche difficile qui ne peut que causer de la gêne. Mais il
aurait pu lui parler de vertu et de moralité. Ne l’ayant jamais fait, il avait
peut-être une lourde dette envers elle. Et il en était en quelque sorte
redevable à Alan.
    Il leva les yeux et croisa le regard attentif de son gendre.
Celui-ci se doutait-il des pensées qui le tourmentaient ?
    — Christina connaissait Adela Pomeroy, remarqua
celui-ci avec un léger froncement de sourcils.
    Le nom ne disait rien à Balantyne.
    — Adela Pomeroy ?
    — L’épouse de la dernière victime, le professeur qui a
été assassiné à Devil’s Acre.
    — Oh… Comment se fait-il que Christina ait pu
rencontrer la femme d’un professeur ? s’enquit Balantyne, après réflexion.
    — Une jolie femme qui s’ennuie, répondit Ross d’un ton
douloureux, cherche sans doute à se distraire en joyeuse compagnie.
    Il ponctua sa phrase d’un geste vague, comme s’il cherchait
à en minimiser la portée.
    Que diable entendait-il par là ? Des milliers de femmes
s’ennuyaient dans le grand monde. Il n’était pas facile d’agrandir le cercle de
ses relations et de s’élever en société, à moins d’être très jolie et prête à
tout. Adela Pomeroy était-elle aussi une femme perdue ? Mais dans ce cas, pourquoi
son mari avait-il été assassiné ? Logiquement, c’est elle qui aurait dû
disparaître.
    Une multitude de questions assaillaient Balantyne : Bertie
Astley avait-il été l’amant de Mrs. Pomeroy ? Quel lien unissait le Dr
Pinchin aux trois autres hommes ? Avaient-ils tous été victimes du même
malade mental ? L’un des crimes avait-il été ingénieusement déguisé pour
faire croire à l’acte d’un déséquilibré, alors que l’assassin voulait hériter d’un
titre et d’une fortune, ou se débarrasser d’un époux assommant ; ou bien
encore – il se mit à transpirer à cette pensée – s’agissait-il de la vengeance
d’un mari trompé qui aurait voulu châtier l’homme qui lui avait pris sa femme
et détruit son foyer ?
    — À quoi ressemble l’épouse du médecin ? demanda-t-il
d’une voix rauque.
    Ross détourna les yeux.
    — Je n’en sais rien. Pourquoi cette question ?
    — Pour rien, répondit Balantyne sans conviction, les
traits crispés. Je réfléchissais, voilà tout…
    Il s’obligea à chasser de son esprit l’hypothèse du mari
bafoué ; Ross ne méritait pas de tels soupçons.
    Il déclina le verre de sherry que son gendre lui offrait, sachant
que la chaleur de l’alcool ne parviendrait pas à réchauffer le froid intérieur
qui l’avait envahi. Il remarqua que Ross ne s’était pas servi non plus. Depuis
combien de temps connaissait-il la vraie nature de sa femme ? Il l’ignorait
en l’épousant. La souffrance s’était-elle installée peu à peu ou brutalement, comme
un coup de poignard ?
    Il serait impardonnable d’aborder avec lui un sujet aussi
intime et douloureux. Quoi qu’il ait deviné, Balantyne se devait de garder le
silence. Il ne supporterait pas qu’Alan se doute, ne serait-ce qu’une fraction
de seconde, des pensées qui l’avaient envahi.
    Il aurait voulu s’enfuir vers un pays imaginaire où il
pourrait retrouver Charlotte, lui parler, contempler son visage, la toucher et
apprendre à tout partager avec elle.
    Alan aussi aurait souhaité vivre aux côtés d’une femme
honnête et généreuse. Mais il avait le sens du devoir et jusqu’à présent, l’accomplissait
avec courage.
    Balantyne aurait voulu lui faire comprendre qu’il n’était
pas seul au monde et que, loin de ressentir de la pitié, il éprouvait pour lui
une grande admiration et toute l’estime, proche de l’amitié, qu’un gentleman
peut porter à son prochain. Mais il ne trouvait que des expressions galvaudées,
qui ne parvenaient pas à exprimer sa compassion.
    Ils demeurèrent longtemps silencieux ; la carafe de
sherry était restée intacte ; les bûches se consumaient lentement dans la
cheminée. Au bout d’un moment, Balantyne se leva. Christina n’allait pas tarder
à rentrer et il ne tenait pas à la rencontrer.
    Ils se séparèrent sur des adieux banals, chacun prononçant
la phrase rituelle qu’il avait à dire. Mais tandis qu’ils se serraient la main,
le général eut la brève sensation que les propos implicites avaient peut-être
été

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