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Mort à Devil's Acre

Mort à Devil's Acre

Titel: Mort à Devil's Acre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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grand tort de vous en mêler.
    Elle s’interrompit avec un léger sourire.
    — Auriez-vous apprécié, Brandon, que mon père vous
dicte votre conduite à mon égard ?
    — Mais je parlais de conseiller notre fille, pas notre
gendre !
    — Auriez-vous accepté une telle attitude, même venant
de votre propre père ?
    Il n’était jamais venu à l’esprit de Balantyne que l’on
puisse se mêler de sa vie privée. C’était effarant. Choquant ! Mais le
problème était ailleurs ; il demandait à son épouse, en tant que mère, d’amener
leur fille à modifier son comportement et à se prémunir ainsi contre de grandes
souffrances.
    Il ouvrit la bouche pour dire tout cela puis, soudain, comprit
à son expression qu’elle pensait exactement la même chose que lui. Il la
remercia du regard, avec un petit sourire.
    — Vous savez, cela ne m’aurait pas dérangé, bien au
contraire, que votre mère vous ait conseillé de vous montrer plus tendre à mon
égard, si elle le jugeait nécessaire, plutôt que de vous rappeler à votre
devoir… Mais j’ignore si elle l’a fait ou non !
    — Elle ne l’a pas fait ! Et je n’offrirai pas mes
conseils à Christina, à moins qu’elle ne me le demande. Sinon, cela reviendrait
à admettre que je sais ce qui se passe entre eux et à lui demander des
explications sur sa vie intime. Je refuse de la mettre dans une position d’accusée
et je ne veux pas qu’elle me croie trop curieuse.
    Balantyne ne trouva rien à dire. Ce n’étaient que des mots. Ils
parlaient de sentiments trop différents. Il laissa le silence clore la
discussion, sans chercher à la relancer. Il ne pouvait s’entretenir directement
avec Christina : il ne saurait par quel bout commencer et surtout comment
éviter qu’elle se moque de lui ou qu’elle prenne la mouche.
    En revanche, il pouvait parler à Alan Ross.
     
    Sans attendre que l’occasion se présentât, il se rendit dès
le lendemain matin chez son gendre, à une heure où il était à peu près certain
de ne pas se trouver nez à nez avec sa fille. Mais si par malchance elle était
là, il ne se gênerait pas pour lui dire qu’il désirait parler seul à seul avec
son mari.
    Il ne cherchait pas une entrevue formelle, car il avait
abandonné toute idée de tourner autour du pot. Depuis que ses sentiments
vis-à-vis de Charlotte avaient été mis à nu, il ne ressentait plus le besoin de
se retrancher derrière le rituel de l’étiquette ; la perspective d’une
franche discussion ne l’effrayait plus.
    Christina n’était pas là. Alan le fit entrer dans son bureau,
où il était en train de rédiger son courrier. Une pièce agréable, très
masculine, un endroit où l’on sentait qu’il passait une grande partie de son
temps et où il conservait des objets personnels qu’il chérissait et utilisait
tout à la fois.
    Ils commencèrent par échanger des banalités, préludes
habituels à une bonne dizaine de sujets de conversation qui les intéressaient
tous deux. Mais ce jour-là, Balantyne était trop préoccupé par le motif de sa
venue pour se contenter d’un dialogue amical. Après le départ du valet, qui
avait déposé sur le bureau un plateau contenant une carafe de sherry et deux verres,
il se tourna vers son gendre.
    — Connaissiez-vous bien Bertie Astley ?
    — Pas vraiment, répondit celui-ci, laconique, mais
Balantyne crut le voir pâlir.
    Il attendit, ne sachant trop comment enchaîner la
conversation. Y avait-il de la souffrance derrière cette réplique polie, le
souvenir de Christina riant aux éclats dans les bras de ses cavaliers ? Alan
n’avait jamais été, au contraire des frères Astley, un brillant causeur, aimant
les mondanités et l’artifice. C’était un homme grave et profond, qui se
laissait difficilement approcher.
    — Je ne le connaissais pas personnellement, poursuivit
Balantyne. Pensez-vous qu’il s’était rendu de son plein gré à l’endroit où on l’a
retrouvé ?
    Ross ébaucha un sourire ; son regard bleu croisa celui
de son beau-père.
    — Cela m’étonnerait. Je l’ai rencontré à différentes
occasions, il m’a paru tout à fait… normal.
    — Vous voulez dire qu’il aimait les femmes ?
    Le sourire de Ross s’élargit.
    — Oui, disons, comme un célibataire qui sent les liens
du mariage se resserrer autour de lui et qui a envie de profiter pleinement de
sa liberté tant qu’il en a le loisir. La mère de Miss Woolmer est un

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