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Mort d'une duchesse

Mort d'une duchesse

Titel: Mort d'une duchesse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elisabeth Eyre
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maître. Elles étaient en train de
balayer le grand salon du rez-de-chaussée quand… elles avaient entendu… des pas
à l’étage ! Elles étaient aussitôt accourues pour voir si tous leurs hôtes
étaient là ou si l’un d’eux s’était rendu dans la chambre du maître  – et
ils se tenaient tous devant elles ! Pourtant elles avaient bien entendu… toutes
les deux, et elles avaient appelé l’intendant… qui les avait entendus lui aussi…
elles ne pouvaient demeurer dans la maison… des pas, des pas légers, allant et
venant dans la chambre du défunt.
    — Piero fait la grasse matinée aujourd’hui, remarqua
son collègue. Ferait mieux d’être debout quand le prêtre viendra voir le jeune
Bandini.
    — C’est vrai que le Bandini a fait venir une pute hier
soir ?
    — Sacré lascar !
    — Maudit gaillard, oui. Mais ce sera la dernière fois.
    — Jamais. Piero l’aurait jamais permis.
    — Même avec une bourse bien pleine ?
    — Quelqu’un lui a porté à manger ?
    — Piero n’aime pas ça. Bah, que cet assassin aille à la
mort le ventre vide ! Tu te rends compte qu’il dormait quand j’ai regardé
par le judas ? Et puis à quoi bon se remplir la panse quand on va t’ouvrir
les tripes, hein ?
    Personne ne put parler au duc Ludovico ce matin-là.
    Il était d’une humeur massacrante. Même son frère l’évitait.
Seule dame Violante, qui promenait son demi-frère sur la loggia, se vit
gratifiée d’un mot aimable quand le duc s’arrêta pour contempler son héritier
désormais privé de mère. Les dames de compagnie gardèrent leurs distances. Elles
connaissaient cette pâleur et ce regard de faucon.
    Sur le large rebord d’une des fenêtres à barreaux du palais,
une femme avait disposé ses marchandises, sacs de joncs tressés et paniers d’osier.
Deux hommes du duc Ippolyto s’arrêtèrent devant elle, sous le regard des badauds.
    — Dieu du ciel ! Quels sont donc ces drôles d’objets ?
    — Les gens d’ici s’en servent comme chapeau, tu n’as
pas remarqué ?
    Tandis qu’ils s’éloignaient en riant, un nain du palais se
présenta, saisit un des paniers entre pouce et index et déclara en imitant leur
accent :
    — Chez nous, on s’en sert comme assiette. Bien sûr, on
est obligés de lécher le jus sur la nappe, mais bah…
    Un éclat de rire tonitruant accompagna les deux hommes, mais
ils préférèrent faire mine de ne pas entendre. Ça n’était pas le moment de
déclencher des bagarres avec les citadins. Coiffé du panier, le nain continua à
divertir la petite foule amusée qui s’était assemblée.
    Des étendards drapés de noir avaient été hissés au sommet
des poteaux disposés autour de la grand-place.
    Leur répondaient, aux fenêtres des nobles demeures, des
bannières bordées de noir. On lançait des pierres et des détritus contre le
palais barricadé des Bandini, et, de l’autre côté de la rue, un chansonnier
égrenait La Complainte de Leandro, composée sous forme d’aveu pathétique :
     
    Tant et tant fus repoussé
    Par vertueuse chasteté
    Qu’en vicieuse luxure
    et haine cruelle
    J’ai frappé. Et ma main, oh !
     en fut sitôt paralysée !
    Et de pourpres pourpres flots
    jaillirent de son flanc…
     
    Mais un officier du duc, par impatience ou parce que les
vers lui rappelaient trop de choses désagréables, le chassa.
    La matinée avança. Le chapelain de dame Donati pratiqua un
exorcisme dans la chambre hantée, au grand soulagement de la famille de l’intendant,
qui refusa d’ailleurs d’y assister, sans que l’on sache si c’était par peur de
la possession ou par crainte de voir l’esprit.
    Les messages portant le sceau du conseiller Di Torre parvinrent
aux portes de la ville. Bandini et l’homme qui l’escortait rejoignirent Il Lupo
et ses mercenaires sur la lande, non loin de la frontière entre les deux duchés.
Le cardinal Pontano présenta les condoléances du Saint-Père au duc Ludovico ;
il avait remarqué, mais n’en fit pas mention, qu’une fois encore on nettoyait
le sang qui avait été projeté sur les portes et les marches du palais. Il offrit
ses propres condoléances au duc Ippolyto et l’assura que tout ressentiment lié
à l’épreuve que traversait sa famille devait trouver son apaisement dans la
douloureuse expiation qu’on allait imposer au jeune Bandini.
    Il ignorait à cet instant qu’on faisait justement attendre
le prêtre mandé pour recueillir la confession dudit

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